Les vues flottantes de l'espace sur un fond orchestral, la solitude des personnages coincés à des milliers de kilomètres de la surface de la Terre, la compagnie artificielle d'un ordinateur de bord, la découverte d'un secret au sein de la mission, l'appartition imaginaire de “l'objet” du désir qu'est la femme, les hallucinationes et le désir de retour... Les similitudes entre Moon et 2001 et Solaris sont certes plaisantes à revoir, mais également nombreuses et gênantes. Gênante car montées bout à bout, elles forment la totalité du film et trahissent un vide important en matière – d'une part – de scénario, et – d'autre part – de spécificité(s) eshétique et/ou narrative.
Scénaristiquement, Moon est une oeuvre pauvre, le sujet a été vu et revu sous de nombreux angles, et traité tant par des Maîtres – Kubrick (2001 : L'odyssée de l'Espace), Tarkovski (Solaris) – que par des réalisateurs moins reconnus - Peter Hyams (2010 : L'année du premier contact), entre autres -. Sans prôner l'abandon d'un thème sous prétexte qu'il a déjà été tourné par un plus grand que soit, il faut reconnaître qu'il s'agit d'un risque majeur d'échec face à la critique et au public.
Moon dure environ une heure quarante, où 2001 et Solaris nous font taire pendant plus de deux heures. Encore une fois, il n'est pas question de renoncer à un film en raison de sa durée, mais ici, la réduction de moitié du temps de visionnage semblait quasi-suicidaire. Celà étant, inutile de préciser l'impression d'ébauche qu'il en découle : Moon ressemble d'avantage à la mise en image rapide d'un scénarion afin d'en observer l'ensemble qu'à un réel travail sur le traitement symbolique et l'interprétatif du sujet. Il en résulte une cadence effrennée, une succession de plans aux raccords parfois difficiles qui nuisent à la compréhension de l'intrigue. Cette insufisance temporelle cause conjointement quelques problèmes de crédibilité : les personnages passent d'un état psychologique à un autre comme ils changent de chemise, découvrent presque miraculeusement l'existente d'une pièce secrette et sa localisation – les probabilités de telles découvertes sont pourtant moindres vu l'étendue de la surface lunaire -. Toujours au sujet de ce souci temporel, on pourra dénoncer un sérieux manque de pauses, pourtant nécéssaires au bien-être et à la compréhension de l'intrigue par le spectateur.
Esthétiquement parlant, l'oeuvre de Duncan Jones est toute aussi vide que son scénario. En vain, et pendant la totalité du pénible visionnage, le spectateur cherche une éventuelle patte, une griffe du réalisateur. L'ensemble est scolaire, trop conventionnel pour marquer et intriguer le public. Les décors intérieurs sont soignés – certes – mais se limitent souvent à une illustration facile de l'état d'esprit des personnages. A l'extérieur, le monde semble avoir été oublié, les plans sont répétitifs, voire même réutilisés – ce genre de montage ne se retrouve que dans les mauvais téléfilms d'action -. La seule trouvaille intéressante réside dans l'illustration de l'humeur de l'ordinateur Gerty par des émoticones sur un unique écran bleu.
Enfin, l'échec de Moon trouve peut-être sa source dans l'interprétation de Sam Rockwell, qui débute pourtant assez bien alors que le personnage qu'il incarne est encore chevelu et barbu. La coupe de cheveux et le rasage anéantissent tout espoir, et le jeu d'acteur sombre dans le stéréotype de l'américain ébranlé, ponctuant chaque phrase de “fuck”, ne se laissant aller à aucun temps mort. Les affronts verbaux entre les deux clones en pâtissent, et il est difficile pour le spectateur de se raccrocher à cet ovni lancé à pleine vitesse qu'est Moon.