Le mois de mai rime souvent avec les partiels et examens en tous genres mais chez nous, amateurs de cinéma, cela rime aussi (et surtout) avec Festival de Cannes. Bon certes nous sommes en juillet, mais en tant qu'étudiants nous venons de traverser le mois de la mort et le mois de juin fut consacré à un repos bien mérité. Néanmoins nous avons survécu pour vous livrer de nouvelles analyses cinématographiques encore plus folles! Les bons films seront vantés, les grands films encensés, les mauvais incendiés et les moyens on en parlera même si tout le monde s'en fout. Aujourd'hui plein feux sur le nouveau film de Wes Anderson (Fantastic Mr Fox, La famille Tenenbaum...) qui a fait l'ouverture du festival de Cannes cette année, à savoir Moonrise Kingdom. Cinéaste indépendant américain au style si particulier, à la fois gai et mélancolique, il s'agit d'un réalisateur qui a déjà fait ses preuves dans le passé et qui continue de monter, gagnant en notoriété et proposant des films atypiques globalement très savoureux. Et pour cette nouvelle oeuvre, Anderson s'est entouré d'un casting XXL avec des acteurs que personne n'aurait pu forcément voir un jour dans un de ses films. La question avant de voir ce nouveau film était de savoir si notre ami Wes allait confirmer le talent qu'il a su nous montrer lors de ces précédentes oeuvres. Verdict.



Wes Anderson a souvent mis en scène des adultes qui avaient du mal à franchir le cap du passage à l'âge adulte justement, des personnages à première vue en marge, des adulescents en quelque sorte. Cette fois-ci le cinéaste rajeunit son approche puisque l'intrigue sera davantage centrée sur une amourette entre deux pré-adolescents sur une île de la Nouvelle-Angleterre au coeur des années 1960.
L'introduction du film ne laissait planer aucun doute. En effet nous sommes bien dans un film de Wes Anderson, sa patte est tout de suite reconnaissable. On aurait pu penser un bref instant que le cinéaste tendait vers l'autoparodie ou allait finir par se répéter et s'essouffler mais cela aurait été le sous-estimer cruellement... Anderson se renouvelle peu et pourtant il nous offre une nouvelle fois une aventure fraîche et originale qui nous transporte dans un état de positive attitude du début à la fin (et oui moi aussi comme Jean-Pierre Raffarin je cite Lorie, il n'y a que les mâles alpha qui peuvent se le permettre)


Moonrise Kingdom est une ode à l'enfance, période pour laquelle Anderson a une certaine tendresse, d'ailleurs ce film suinte la nostalgie sans manquer d'évoquer notre propre enfance. Ces deux gamins intrépides, qui vivent dans leur monde sans se soucier de la réalité n'est pas sans rappeller notre période "400 coups". C'est un monde innocent et insouciant que peint ici Wes Anderson, nous exposant une jeunesse pure où les sentiments sont décrits avec beauté et émotion.

Ce film est un cocktail de nombreux sentiments. L'amour, l'amitié, la tristesse, la gaieté et surtout un grand goût d'aventure qui baigne dans une ambiance une nouvelle fois très colorée et gentiment farfelue. Quelques situations cocasses et étranges nous décrochent des sourires, ce petit couple qui s'échappe et cherche à se marier est très attachant, de plus les jeunes interprètes sont excellents. Le film entier est juste d'une grande fraîcheur, ce qui peut étonner d'ailleurs c'est que malgré quelques passages relativement tristes, le film semble dénué du côté tragique qui était présent dans certains films du réalisateur (sans que cela rende déprimants les films en question)





Visuellement le film est impeccable. Le plan-séquence du début est bluffant et généralement le film est dôté d'une mise en scène très inspirée, sublimée par une agréable photographie. Anderson se permet des plans audacieux, des scènes improbables. Il possède une liberté créative qui fait vraiment plaisir à voir. Ce cinéaste nous a prouvé par le passé son goût pour la musique pop et aussi sa connaissance de la culture française, il nous le montre encore avec Moonrise Kingdom. Mais quel réalisateur (d'autant plus américain) oserait de nos jours faire danser deux enfants sur un air de Françoise Hardy? Ce petit clin d'oeil à la musique française est amusant, et cette scène est belle. Mais celle-ci n'est pas isolée, le film est parsemé d'instants de beauté, de séquences touchantes... Et ca m'a beaucoup parlé (oui oui ça parle un film). Le découpage est juste ingénieux.

J'avais mentionné dans l'introduction un casting XXL, et celui-ci a su répondre aux attentes. La présence surprenante de Bruce Willis est réussie, son personnage de shérif mélancolique est émouvant. La scène où le gamin lui parle d'amour tout en le conseillant est plutôt drôle d'ailleurs. Moonrise Kingdom est un condensé d'humour subtil très plaisant. On remarquera aussi la prestation d'Edward Norton en chef scout passionné, très convaincant. L'habituel Bill Murray fait de nouveau son apparition aux côtés de Frances McDormand, madame Joel Coen dans la vie, pour incarner respectivement le père et la mère de Suzy, la fille partie en cavale avec son jeune amoureux. Certains caméos font plaisir également, Jason Schwartzman revient de nouveau chez Anderson dans un rôle délirant, Harvey Keitel fait une petite apparition amusante, Tilda Swinton est également de la partie. Du beau monde était présent sur le tournage, et que des acteurs que j'aime. Autant dire que j'ai été comblé, surtout que Wes Anderson sait rendre ses personnages sympathiques avec leurs qualités et aussi leurs défauts.

Moonrise Kingdom a un rythme calme mais captivant de bout en bout. C'est un film très accessible aux néophytes et qui reprend le meilleur du cinéma de Wes Anderson, de quoi ravir les fans du cinéaste. C'est mon premier gros coup de coeur de l'année 2012, en espérant que celui-ci en appelle d'autres. Je ne le répèterais jamais assez, ce film est juste très frais, beau et poétique. Une belle oeuvre qui véhicule de nobles sentiments et sait rendre son sujet touchant sans jamais trop en rajouter. Moonrise Kingdom nous transmet un goût de vacances, nous rappelle que de bons souvenirs. On sent qu'il s'agit là d'une oeuvre très personnelle, peut-être la plus personnelle du cinéaste, et celle-ci m'a beaucoup touché. Le nouvel Anderson est un remède efficace contre la morosité, vivement le prochain!

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le 12 juil. 2012

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Moorhuhn

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