Revoilà donc nos fameuses tortues ninja mutantes chères à notre enfance, suite directe du reboot plus que douteux sorti il y a déjà deux ans, la production rabat ses cartes avec un scénario tout beau tout neuf en intronisant le jeune réalisateur Dave Green, à qui l’on doit le divertissement SF Echo, ainsi que les méchants cultes Krang, Bebop et Rocksteady, mais étions-nous en droit de penser que ce second volet allait pouvoir ré-insuffler une nouvelle dynamique à une hypothétique saga ? Ma foi je n’avais pas grande espérance, m’attendant plus ou moins à la même soupe que le précédent, assister à un énième viol de ma jeunesse comme m’habitue désormais ces chacals d’Hollywood … et je suis dans l’obligation d’admettre que le moment ne fut pas si déplaisant que cela.


En fait ce que je n’ai pas aimé dans Ninja Turtles c’est ce procédé consistant à se réapproprier les personnages pour les forcer à s’encrer dans un schéma de blockbuster d’action uniforme et interchangeable, on aurait collé des Transformers entre eux que ça n’aurait limite choqué personne, l’atout de cette suite est qu’elle assume entièrement sa matière d’origine : le cartoon. Alors oui l’histoire est très simpliste, pour ne pas dire bête (oui bon c'est complétement con), mais elle demeure au moins lisible, et je trouve que ça fait toute la différence lorsqu’on parle de divertissement ciblé, le film ne se laisse pas aller à des longueurs pour ne rien nous expliquer, non, tout est clair bien que grandement farfelu, mais bizarrement on l'accepte (si on est un minimum bon public évidemment). En gros, après son évasion d'un fourgon de police Shredder passe un pacte avec l'alien Krang pour asservir la Terre, la condition étant de réunir trois artefacts et générer un passage intra-dimensionnel pour faire entrer la surpuissante machine de guerre le Technodrome dans notre monde, aidé du scientifique Baxter Stockman et de deux molosses serviles transformés à l’état de bêtes pour combattre d’égal à égal avec les tortues ninja, qui devront quant à elles contrecarrer leurs plans tout en faisant face à un confit interne entre frères ainsi qu’à la non-reconnaissance des autorités de la ville de New-York, les obligeant à opérer dans l’ombre épaulés par April O’Neill et Casey Jones.


Pour tout dire je n’étais pas convaincu au début, le visuel des tortues me dérange toujours autant et les raccourcis scénaristiques sont parfois difficiles à avaler, la scène de la rencontre entre Shredder et Krang est à se facepalmer joyeusement, tout comme les transformations de Bebop et Rocksteady, on sent vraiment que le film n’en a rien à foutre pour ce qui est de nous fournir quelque chose de tangible, on se rapproche davantage du ton des films des années 90, du divertissement assumé à 100%, et ça se révèle ... cool. Enfin presque, car malheureusement le charme ne fonctionne pas totalement, autant par la laideur de l’esthétique fluo-kitsch que par la concaténation de séquences d’espionnage qui viennent couper l’élan du côté fun-aventure, ce n’est pas toujours plaisant à suivre, je m’interroge aussi sur la pertinence de la présence du personnage de Casey Jones, propret et sans aucun charisme, April aurait très bien pu être seule, même le retour de Vernon Fenwick n’était pas franchement nécessaire. L’intérêt réside dans cette course à l’artefact tout en voyant comment les caractères des tortues vont se débrider et se confronter pour les rendre enfin attachantes, à ma grande surprise ça fonctionne puisqu’on assimile concrètement les traits de chacun, j’ai enfin retrouvé la coolitude de Michelangelo, la lutte d’égos entre Leonardo et Raphael, la science infuse de Donatello, etc, et même si ça n’est bien sûr pas parfait tout du long l’exploit pour ce qui est de faire passer des sentiments au travers de motion-captures est en parti rempli.


L’esprit des dessins animées des 90s prend vraiment le pas, rien que Krang et son Technodrome, un vrai Shredder machiavéliquement cliché (et non une sorte de pseudo robot pourrave comme dans le précédent opus), Bebop et Rocksteady cons comme des balais, il se dégage un petit sentiment de nostalgie, comme la suite des Tortues Ninja II que j’aurais aimé voir étant gosse, après il est clair que le temps a fait son œuvre et que désormais tout y est enveloppé dans dans un format numérique lisse et sans âme, mais si on se laisse prendre au jeu en grattant un peu à la surface on peut y retrouver cette saveur si particulière. Après j’ai été tout de même déçu par le final qui se dénoue bien trop rapidement en plus d’user d’effets spéciaux à outrance, tellement que le combat entre les tortues et Krang parait gerbant, mais sur le coup, arrivé au générique, je me suis moi-même étonné de ne pas m'être ennuyé, et ça c’est assez rare concernant ce style de block pour être souligné. Mais je ne peux m’empêcher d’imaginer à quel point le film aurait pu être meilleur, surtout avec ce désir manifeste de raviver l'étincelle dans le cœur des fans de la première heure, dommage de ne pas avoir proposé cette simplicité et ces références dans une œuvre originale avec un cadre plus recherché et un fil conducteur encore plus décomplexé et fun, et évidemment d’autres choix niveau casting, j’insiste concernant Casey Jones, et April O'Neill tant qu'à faire.


Ninja Turtles 2 reste donc une suite un minimum sympathique, en tout cas sans trop de difficulté supérieure à son prédécesseur, le film livre sa dose de divertissement tant espérée, évidemment dans le fond comme la forme subsistent des problèmes, c’est encore trop moche et criard en plus d’être une pub ambulante pour jouets passablement puérile, mais voilà il en ressort ce doux plaisir presque inavouable tant le ton nous refamiliarise avec les bonnes vieilles séries B d’antan. C’est cette volonté de ne jamais se prendre au sérieux qui est louable, ce lâcher prise, c’est un véritable pari dans cette époque ayant en majeure partie enregistrée des automatismes d’univers réaliste au cinéma (nul doute que beaucoup détesteront), et je pense que les tortues ninja étaient la matière idéale pour provoquer à nouveau cette sensation, même si je le répète c’est encore loin d’être parfait, peut être pour le troisième volet ? Qui sait …

JimBo_Lebowski
5
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes 2016 : Chronologie cinéma et Les meilleurs films de 2016

Créée

le 14 juin 2016

Critique lue 1.1K fois

18 j'aime

JimBo Lebowski

Écrit par

Critique lue 1.1K fois

18

D'autres avis sur Ninja Turtles 2

Ninja Turtles 2
Jay77
8

Un cadeau pour les fans nostalgiques

Un animé mythique dans les années 80, trois films sortis dans les années 90, une série live (à ne surtout pas acheter tant elle est un vrai souillage à l’univers des tortues), un film d’animation en...

le 2 juil. 2016

13 j'aime

5

Ninja Turtles 2
Behind_the_Mask
5

Pour votre santé, mangez au moins cinq fruits et légumes par jour

Pizza, coca et frites... Avec un tel régime alimentaire, il peut paraître surprenant et pas très réaliste que des tortues, même si elles sont ninjas, soient bâties comme des armoires normandes sans...

le 1 juil. 2016

13 j'aime

3

Ninja Turtles 2
Franck_Plissken
6

Eggshell Ricochet...

Après un premier reboot regardable mais brouillon, nous voilà avec la suite, melting pot -tout aussi brouillon- des persos de l'anime '87 et de quelques touches du TMNT 90. Là où le premier essayait...

le 14 juin 2016

7 j'aime

7

Du même critique

Birdman
JimBo_Lebowski
7

Rise Like a Phoenix

Iñárritu est sans aucun doute un réalisateur de talent, il suffit de jeter un œil à sa filmographie, selon moi il n’a jamais fait de mauvais film, de "Babel" à "Biutiful" on passe de l’excellence au...

le 12 févr. 2015

142 j'aime

16

Star Wars - Les Derniers Jedi
JimBo_Lebowski
4

Il suffisait d'une étincelle

Mon ressenti est à la fois complexe et tranché, il y a deux ans je ressortais de la séance du Réveil de la Force avec ce sentiment que le retour tant attendu de la franchise ne pouvait m'avoir déçu,...

le 13 déc. 2017

137 j'aime

18

Mad Max - Fury Road
JimBo_Lebowski
8

Valhalla Riding

La hype était irrésistible, les premières images plus que palpitantes, moi même qui n’ai pas été véritablement convaincu par la saga originelle je n’ai pu rester insensible aux vrombissements des...

le 15 mai 2015

134 j'aime

17