Le bras long

Sans aucun doute le meilleur des épisodes de 20mn. Mais c'est pas terrible quand même.

L'auteur se montre bien trop ambitieux par rapport à sa capacité à exploiter ses idées. Ce n'est même pas un problème de budget, juste de temps. Qu'est-ce qu'on s'en fiche de cette histoire de classe : ça ne fait qu'une série de dialogues totalement inutiles qui viennent plomber l'ambiance. Une tentative stérile de créer du suspense lorsque l'héroïne refuse de survivre quand elle est censée mourir la première à cause de son statut inférieur : cela tombe à l'eau parce que le personnage, insipide, accepte les changements sans problème. Difficile du coup de croire qu'elle ait pu vivre sa vie pour ceux qui la gouvernent... En soi ce ne sont pas des mauvaises idées mais c'était clairement impossible de traiter de cela correctement dans un court-métrage.

L'action n'est pas très compréhensible. Non pas à cause du mystère autour du monstre (quelques indices révélés ici et là suffisent) mais simplement parce qu'on ne sait pas trop ce que les personnages cherchent à faire pour échapper au monstre. Le trajet aurait dû être plus clair dès le début, cela aurait permis aux spectateurs de savoir quand l'héroïne était sauve. Parce que là, comme c'est amené, la pièce sécurisée aurait pu être reportée de deux scènes ou bien avancée, ça n'aurait absolument rien changé à ce récit linéaire.

Les dialogues sont pauvres (souvent inutiles même puisque les personnages parlent soit de choses dont on se fout soit expliquent ce que l'on voit et comprend par nous-mêmes), les personnages aussi. Les situations aussi. Cette course-poursuite manque cruellement d'idées, peut-être parce que le lieu n'est jamais développé et que l'auteur préfère parler de la société plutôt que du côté pratique. Même les armes on se demande bien à quoi elles servent. Lors que le monstre tombe, on se demande bien quelle en est la raison, ce n'est pas vraiment logique.

La mise en scène est correcte mais ça fait tout de même cheap. Blomkamp a beau avoir une bonne caméra, des décors construits, des costumes, des acteurs connus, lorsqu'on les voit s'agiter à deux, on ne peut s'empêcher au fait que ce sont juste deux personnes face à une caméra. Les décors ne sont pas si terribles que ça : je dois dire que j'en ai un peu marre des logos et écritures sur les murs de Blomkamp, c'est toujours la même chose voire même interchangeable d'un film à l'autre. Son univers visuels s'arrêtent à peu de chose et j'aurais aimé qu'ils prennent plus de temps sur chaque cours pour développer une identité propre à chaque histoire.

Le découpage est correct. C'est parfois un peu mou mais au moins Neill n'emploie plus une caméra tremblotante comme à ses débuts, ce qui rend l'action plus lisible. Il reste quelques plans plus obscurs, notamment à cause d'un manque de lumière, mais globalement c'est satisfaisant. Certaines scènes rappellent furieusement "Alien" et "Aliens", je suppose que ce court est sa revanche sur son éviction de son projet par Scott. Le montage est également un peu mou par moment : des plans qui n'en finissent pas, une caméra qui s'attarde parfois un peu trop longuement sur des éléments du décors, des images qui illustrent un peu trop directement ce qui est dit.

La musique passe assez inaperçue. Lorsqu'on la remarque, c'est pour constater que c'est un peu trop classique, typique mais aussi froid, sans réelle envolée. Mais au moins elle ne dérange pas. Le jeu d'acteur est plus problématique. Dakota n'est absolument jamais crédible, surtout sur la fin où son boitement paraît beaucoup trop forcé. L'autre est trop bavard et on oublie carrément qu'il est censé être aveugle.

Enfin, la bestiole, il faut le reconnaître, est assez chouette. Un peu grotesque mais aussi un peu effrayante. Les CGI ne sont pas géniaux, on sent le côté numérique en gros plans ou sous certaines lumières, mais Blomkamp parvient tout de même à modérer l'aspect faux grâce à un travail d'éclairage plus ou moins efficace et un découpage qui met souvent la créature en arrière plan. Les cadavres et autres traces de sang sont chouettes aussi (même si l'auteur s'attarde dessus inutilement).

Bref, le meilleur épisode de ce volume 1, du moins dans les courts de 20 minutes, mais c'est quand même pas génial. Blomkamp aurait dû aller à l'essentiel et si ce court se fait en long un jour j'espère qu'il laissera tomber tout l'aspect social qui était déjà une bonne raison de détester "Elysium" et "Chappie".