Oui
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Oui

Film de Nadav Lapid (2025)

Une œuvre fière, instable, vibrante, qui ose mêler désir et politique, caresse et révolte.

Un pays en apnée, un couple qui vacille.

Dans Oui, Nadav Lapid scrute Israël après le 7 octobre, quand la ville vibre d’une inquiétude sourde. Y., saxophoniste en quête de cachets, et Jasmine, danseuse au corps épuisé, se vendent pour survivre : leur art, leur sueur, leurs fragments d’âme deviennent monnaie d’échange. Au détour des clubs et des appartements anonymes, ils offrent musique et étreintes comme un dernier souffle.

La caméra de Lapid se fait funambule. Elle avance, recule, s’arrête brutalement, capte les silences et les battements du cœur collectif. On ressent l’électricité de ses précédents films, mais ici l’urgence politique prend une forme plus intime, presque chuchotée.

Ariel Bronz incarne Y. avec une intensité nerveuse, comme un saxophoniste qui jouerait sur une anche fêlée. Efrat Dor, en Jasmine, irradie un mélange d’abandon et de résistance : chaque mouvement de danse est un geste de survie. Les seconds rôles – Naama Preis, Aleksei Serebryakov, Pablo Pillaud-Vivien – surgissent puis disparaissent comme des notes de contrepoint, brefs éclats d’humanité.

Quand l’État confie à Y. la tâche insensée d’écrire un nouvel hymne national, la fiction se tend : comment composer une mélodie d’unité quand le sol se fissure ? La bande-son, entre jazz effiloché et nappes électroniques, griffe l’air d’une inquiétude permanente.

Mais la durée – deux heures vingt-neuf – finit par peser. Certains plans s’étirent jusqu’à l’hypnose, et la virtuosité de Lapid tourne parfois au vertige contemplatif. L’émotion se dilue, la transe se fissure.

Reste une œuvre fière, instable, vibrante, qui ose mêler désir et politique, caresse et révolte. Oui est un chant d’amour écorché, un poème de cuivre et de cendre.


14/20 : un film habité, exigeant, que l’on admire plus qu’on ne le chérit, mais qui continue de résonner longtemps après l’écran noir.


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Le-General
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