Guillermo, des projets, il en a par poignées. Peut être trop même, parfois. La boulimie et la générosité du bonhomme résident aussi dans cet aspect de sa filmographie, jalonnée de purs fantasmes (son adaptation du classique Les Montagnes Hallucinées) de projets beaucoup plus personnels qui ne verront sans doute jamais le jour et de suites enterrées (Hellboy forever).


Au moins tourne-t-il régulièrement, c'est déjà ça, en assurant, presque à chaque fois, de sacrés chefs d'oeuvres.


Hasard ou coïncidence, 2018 voit portés sur les écrans deux de ses projets. La Forme de l'Eau, il a finalement décidé de le réaliser lui-même. Avec le succès que l'on sait. Il a donc dû abandonner son Pacific Rim Uprising, au terme d'un sacré retard à l'allumage, de circonstances un peu troubles et des éléments de langage habituels, le mexicain gardant un poste de producteur.


Cette caution supposée morale, à la fin de la séance, on se dit cependant qu'elle a fait long feu. Avec une certaine forme de déception et de tristesse. Car de scénario crétin en protagonistes anonymes, de mauvais traitement de la mythologie installée par le film précédent en raccourcis énormes, il faut se rendre à l'évidence et constater que cette suite a perdu beaucoup de ce qui faisait le charme du Pacific Rim original.


A tel point que pendant longtemps, on se surprend à éprouver pas grand chose, à se dire que certains nouveaux modèles de mecha sont tout droit tiré des Transformers ou des Power Rangers tellement ils sont bigarrés et rutilants. Et aucun nouveau design de Kaiju à l'horizon. Et là, on est à deux doigts de hurler à l'escroquerie.


D'autant plus que toute la patte et la maestria du réalisateur mexicain sont passées à la trappe, faisant dire qu'il frôle, dans l'entreprise, l'emploi fictif, encore plus évident que sous Tibéry à la mairie de Paris, c'est dire.


C'est que Pacific Rim Uprising est à deux doigts de l'anonymat, à des années lumières de la recherche graphique de Guillermo, de ses jeux de couleurs et de ses références constantes aux personnages. C'est que Pacific Rim Uprising ne fait ressentir que dans deux ou trois occasions un jeu d'échelle impressionnant, même en 3D, ou encore le poids de ses protagonistes. L'atmosphère s'est aussi fait la malle, la pluie, la tempête et les éléments déchaînés, écrin à nul autre pareil des affrontements, laissant la place à un soleil aveuglant sans aucun caractère. Tandis que les mecha sont beaucoup plus rapides et souples, leur chute n'entraînant jamais un anéantissement. Enfin, rien ne rappelle que leur aspect relevait avant tout de l'utilitaire et du fonctionnel avant d'être joli. Rien ne rappelle la rouille ou les pièces de récup. Pacific Rim est donc assez loin.


S'y rajoute un manque d'idée assez flagrant, là où le fan espérait des nouveaux design robotiques et des nouveaux streums à ne plus savoir qu'en faire.


Jusqu'à cette scène finale, où l'équipe de préviz' et des SFX lâchent littéralement les chevaux. Enfin, le gangbang promis est au rendez-vous, le 3 contre 3 destructeur. Enfin, les attentes du fan de démolition à grande échelle et de spectaculaire bourrin sont satisfaites. Et l'on renoue pour une vingtaine de minutes avec l'esprit de l'original et cette jubilation régressive, qui monte là où les immeubles s'abattent et s'éventrent sous les coups de belligérants. Au point de transformer le 4 déceptif d'abord envisagé en un timide 5 symbole de l'aspect terriblement down de l'entreprise en comparaison de son aîné, mais qui, de justesse, propose, par à coups, ce que celui qui a payé sa place est venu chercher.


Même si au bout du compte, il n'est pas interdit de penser qu'en choisissant de réaliser La Forme de l'Eau, Guillermo semble avoir eu le nez creux sur ce coup là.


Behind_the_Mask, mecha-nique.

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le 23 mars 2018

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