Pandemonium
7.7
Pandemonium

Film de Toshio Matsumoto (1971)

Une œuvre revêtant son nom à merveille puisqu'il s'agit purement d'une effroyable descente aux enfers, pour les personnages du film, tous autant qu'ils sont, mais surtout d'un tableau chaotique pour le spectateur.
Et le spectacle s'ouvre avec un plan haut en couleur, mais heureusement on sera vite plongé dans la noirceur découvrant un magnifique noir et blanc. Qu'auraient été ces effusions de sang auxquelles on assiste tout au long, elles qui sont déjà si kitsch ! À l'image de quelque ralentis dont on se serait bien passé ou encore de cette tendance qu'ont les acteurs à surjouer... Mais on pardonne tout cela à Pandemonium, tant l'expérience qu'il nous fait vivre demeure intense.
Après tout nous avons là l'adaptation d'une pièce de théâtre.

C'est l'histoire d'un rônin qui, trahi, sombre dans une folie interminable. La cause en est évidemment une femme, ce qui apparaissait comme une histoire d'amour en huis-clos devient le récit d'une vengeance. L'argent aussi est hautement responsable de tout ce chaos.

Ainsi on pénètre dans l'esprit de ce samouraï à travers ses rêves d'abord puis ses nombreuses craintes, illusions et hallucinations qui nous sont présentées sans la moindre transition particulière de manière à ce que l'on y croit vraiment, procédé que l'on retrouve régulièrement dans le cinéma japonais avec plaisir, cela créant toujours des surprises. On nous envoie des images horribles qui nous terrorisent puis on réalise que le personnage ne faisait qu'imaginer, quel soulagement.
Le film et son protagoniste se perdent alors entre le cauchemar et la réalité et sa folie ne cesse de croître, alors que l'horreur est à son paroxysme on ne jouit pas d'un retour en arrière rassurant, le rônin est comme possédé par le démon, il n'agit plus comme un un homme mais seulement comme un monstre sanguinaire et sans pitié.

Le monde dans lequel se situe l'action semble dépourvu de toute honnêteté, tout est faux, tout n'est que mensonge, il n'y a qu'un seul personnage qui paraît réellement bon, lucide et dévoué, il ne s'agit pas d'un membre d'un des couples ou d'une des familles, juste du domestique du rônin.
Désespéré de ce qu'est devenu son maître, il tentera jusqu'au bout de le libérer de cet enfer.

Pandemonium est presque entièrement dépourvu d'accompagnement, la musique est très rare, on retient cet angoissant son comme si sonnait le glas qui revient à plusieurs reprises..
Ainsi l'ambiance est vraiment sombre et macabre mais l'œuvre parvient à susciter de vives émotions à commencer par la terreur. Intense disais-je, scotché au siège les yeux écarquillés on n'arrête pas d'en prendre plein la tête... il s'agit d'un film très violent mais la mise en scène fortement théâtrale limite le dégoût et accentue la dimension esthétique des plans les plus sanglants.

Visuellement on note surtout cette sublime photographie, le film est entièrement tourné en noir et blanc à l'exception d'un plan, pourtant il aurait bien pu être en couleur mais c'est tellement mieux ainsi !
Grâce au contraste très profond les protagonistes surgissent comme des fantômes de l'obscurité ou s'y engouffrent.
On apprécie également l'originalité de la mise en scène de Matsumoto usant toujours de techniques diverses pour véhiculer les sentiments des personnages, l'aliénation surtout.


Il n'est peut-être pas recommandé de le visionner comme moi juste avant d'aller se coucher.. je répète c'est le cauchemar d'un cauchemar, avec ces images qui tourmentent l'esprit ce n'est pas forcément aisé de s'endormir.. Mais c'est ça aussi le cinéma, être choqué, terrorisé, surpris, marqué.. touché
Une expérience surprenante, cruelle et intense.
Dynamite
8
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le 8 mai 2014

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Dynamite

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