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Quand j’étais gamin, ma première introduction à la figure populaire du pirate s’est faite par deux canaux : Hook d’un côté, que je continuerais à défendre corps et âme avec une mauvaise foi véhémente tant il a été pilier de mon enfance, et Monkey Island 2 de l’autre, que j’ai d’abord appréhendé en regardant jouer mon grand frère avant de moi même me tordre les méninges sur des énigmes improbables. Et c’était à peu près tout ce qu’on avait à se mettre sous la dent si l’on souhaitait prendre le large en compagnie d’aventuriers hors-la-loi.


Les sept mers était un terrain de jeu propice à toutes les épiques épopées, et il est curieux que personne ne s’y soit attelé sérieusement avant l’arrivée de Pirates des Caraïbes (dans un passé récent j’entends, il faut sinon remonter de quelques décennies pour trouver Moonfleet et autres Sinbad, qui n’ont pas cette envergure boucanière mais en fond plutôt une toile de fond), et que personne ne se s’y soit refrotté par la suite. Disney a flairé le filon, et a prétexté l'adaptation d’une de ses attractions phare pour lancer une franchise mastodonte (le troisième volet à sa sortie était le film le plus cher de tous les temps) qui, au vu de l’actualité, n’a pas fini de faire cracher les billets. A moins que le sixième opus/reboot ne se plante, vu la tournure qu’a pris le studio aux grandes oreilles ces vingt dernières années.


Car The Curse of the Black Pearl, s’il est bien un produit familial estampillé Mickey, n’arbore pas tous les travers actuels de la firme, et procure un plaisir intact, contre vents et marées. Une aventure plaisante, dont les décors tropicaux garantissent de jolis paysages exotiques, qui installe un univers fantastique régi par ses propres règles et où la menace est palpable bien que adoucie par le choix de ses victimes (comprendre que l’on tue à foison, mais seulement des figurants).


Et la comparaison entre le Disney d’alors et le Disney d’aujourd’hui est flagrante au revisionnage. Ici, l’humour est omniprésent mais ne désamorce pas les enjeux, grâce à un équilibre entre les personnages : si Sparrow et Barbossa donnent dans le loufoque, ils sont contrebalancés par le premier degré quasi-permanent de Will et Elizabeth. De même, la franchise ayant relativement peu de matériau sur lequel s’appuyer, Gore Verbinski ne peut pas reposer sur une nostalgie à tous les étages pour amadouer le public, se contentant de quelques clins d’œil au ride Disneyland que seules les personnes y ayant mis les pieds dans les dix dernières années repèreront (le chien et la clé, la chansonnette A Pirate’s Life for Me…). Même Zimmer, auteur des mélodies de la saga (à défaut d’être crédité à la composition finale), n’était pas encore rentré dans ses POUIN-POUIN modernes. Une autre époque vous dis-je.


Mieux encore, le récit est étayé par des personnages hauts en couleur qui ont marqué la pop culture, et dont l’écriture dépasse le simple statut fonctionnel, bien loin des carcans Marveliens actuels. Barbossa est un antagoniste qui n’est pas gratuitement cruel et justement motivé, tandis que le Commodore Norrington évite les clichés du rival belliqueux et s’avère en réalité droit dans ses bottes. Et évidemment il y a Jack Sparrow. Un anti héros à la roublarde duplicité et aux penchants alcooliques, un womanizer aux mains baladeuses et à la morale ambiguë. Son aspect imprévisible et son identité visuelle affirmée était à l’époque une belle trouvaille, que la redite a fini par estomper. Car Sparrow est aussi une malédiction pour la carrière de Johnny Depp qui aura par la suite du mal à se départir du rôle, lui qui cumulait déjà quelques crédits abracadabrantesques auparavant et tombera dans la répétition caricaturale par la suite. Mais ici, ça fait le boulot !

Tout juste peut-on regretter le choix d’Orlando Bloom dont la fadeur généralisée ne sied qu’à l’impassibilité de Legolas et jamais à rien d’autre, et le rôle de demoiselle en détresse de Keira Knightley.


Un premier volet qui lance une trilogie qui, à défaut d’être parfaite, est traversée d’un souffle d’aventure rare. Car au final, le genre, hors même de la piraterie, est assez peu présent, surtout de façon réussie. Et il serait dommage de bouder son plaisir sur une production qui conjugue accessibilité familiale et mise en œuvre compétente. Surtout au vu des volets que n’a pas réalisé Verbinski.


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il y a 3 jours

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Frakkazak

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