Trois minutes de générique de la crête d’une vague californienne au stand de tir et deux personnages sont plantés. Johnny Utah, agent spécial du FBI débarque et prend son premier bain : quatre braqueurs masqués approchent les trente coups sans qu’une piste sérieuse apparaisse. Le coéquipier de Johnny théorise et le jeune flic improvise, se jette à l’eau et sombre. Repêché de justesse par une belle jeune fille, premier point d’ancrage.
Le jeune flic est un ancien footballeur, les surfeurs aiment jouer et c’est le premier contact sur la plage, course le long du ressac. Le surfeur et le jeune flic sympathisent.
« Tout obéit à un cycle »
Thriller policier aux mécaniques agréablement glissantes,
Point Break est le film de surf, la fiction aux gentils méchants philosophes, bienheureux pacifistes antisystème, qui inclut une pratique sportive en relation avec son mode de vie écolo-nihiliste dans une intrigue plus qu’intelligemment nouée, habilement dirigée, et qui sait remettre en question, avec l’art du divertissement cinématographique simple, certains choix de société qui laissent les utopies se briser face aux conséquences dramatiques de leurs tentatives d’évasion.
Mode de vie furtif en adéquation naturelle aux appels maritimes, le surfeur Bodhi est hanté de contradictions naïves sous les obsessions bienveillantes, entier voué à sa passion dévorante, habité de liberté. Sur la vague. Johnny trouve auprès de lui une vision de plénitude, une attirance, une fascination que le spectateur ne peut que partager dans les séquences de surf, magnifiquement filmées, belles et bleues, vertigineuses ou légères, violentes, angoissantes et paisibles, pleines. Libératrices.
« Ça pue les hormones »
Gros calibres, Patrick Swayze et Keanu Reeves font le job jusqu’au bout, repoussent les limites avec une jubilation partagée. Le reste surfe la même implication : Gary Busey sourit en vieux briscard du bureau libre comme la fumée légère de son cigare, John C. McGinley déjà grande gueule sourire large de joyeux sadisme, Anthony Kiedis c’est le pied ! et seule Lori Petty yeux bleu océan sourire conquis porte la sublime touche féminine dans le fatras des hommes testostérone.
Quand Johnny comprend qui sont les présidents, les frontières se brouillent.
Kathryn Bigelow marque un grand coup.
Un amour particulier pour ces premières vagues,
pour leurs morales. Un respect pour l’objet, ciselé dans les reflux et l’écume autant que dans les meilleurs puzzles humains dans les films policiers. Et le bonheur de partager cette fascination bleue, grondante et dévorante : l’incessant ressac de la liberté qui frappe au rivage inlassablement.
T’invite, honnêtement,
à surfer ta vie jusqu’au grand soir.