Celui qui prétendrait qu'affliger son personnage majeur d'amnésie, au cinéma comme en littérature, fait preuve de facilité narrative, aurait sans doute raison Ceci posé, Carlos Vermut n'en abuse pas dans Quién te cantará, ce n'est qu'un élément parmi d'autres dans ce labyrinthe sentimental avec effets de miroir à la clé. Moins percutant que son film précédent, le fascinant La Niña de Fuego, il est parfois un peu gâché par quelques afféteries esthétiques lesquelles n'arrivent toutefois pas à totalement détruire un film où 4 protagonistes se détachent, tous féminins. Autant voire plus que Almodovar (ne parlons pas de de Palma, cité de façon abusive par le marketing), c'est bizarrement à Bergman que l'on peut penser dans ces scènes ou seules sont présentes la chanteuse et son double anonyme (notamment celle sur la plage). Quand les deux actrices principales se côtoient, il se passe indéniablement quelque chose, pas d'ordre sensuel en définitive, mais plutôt psychologique tant ces deux femmes se retrouvent en communauté d'esprits, à partager des secrets. Le rapport mère/fille, complexe, est double dans Quién te cantará mais il n'est pas faux non plus de dire que Vermut ne concrétise pas jusqu'au bout cette connivence trouble, comme l'aurait fait un Almodovar, justement, et avec davantage de chaleur, certainement. En équilibre instable, le film chavire du mauvais côté en son dénouement, assez incompréhensible, mais pas de quoi remettre complètement en question la séduction qui opère en grande partie, en particulier grâce aux comédiennes Najwa Nimri et Eva Llorach.

Cinephile-doux
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Au fil(m) de 2018

Créée

le 30 oct. 2018

Critique lue 598 fois

4 j'aime

Cinéphile doux

Écrit par

Critique lue 598 fois

4

D'autres avis sur Quién te cantará

Quién te cantará
mymp
6

L'une chante, l'autre pas

La promotion du film vendait du rêve, annonçant crânement une sorte de thriller psychologique au féminin quelque part entre Almodóvar et De Palma, du moins au temps où ces deux-là faisaient encore de...

Par

le 2 nov. 2018

4 j'aime

3

Quién te cantará
Cinephile-doux
7

Femmes au bord de la crise de mère

Celui qui prétendrait qu'affliger son personnage majeur d'amnésie, au cinéma comme en littérature, fait preuve de facilité narrative, aurait sans doute raison Ceci posé, Carlos Vermut n'en abuse pas...

le 30 oct. 2018

4 j'aime

Quién te cantará
constancepillerault
6

Critique de Quién te cantará par constancepillerault

L'affiche annonce un film "entre De Palma et Almodovar", mais fausse piste : en fait ça aurait dû être "entre Bergman et Almodovar", le film ressemblant plutôt à un Persona revu et corrigé à la sauce...

le 4 janv. 2020

2 j'aime

Du même critique

As Bestas
Cinephile-doux
9

La Galice jusqu'à l'hallali

Et sinon, il en pense quoi, l'office de tourisme galicien de As Bestas, dont l'action se déroule dans un petit village dépeuplé où ont choisi de s'installer un couple de Français qui se sont...

le 27 mai 2022

75 j'aime

4

France
Cinephile-doux
8

Triste et célèbre

Il est quand même drôle qu'un grand nombre des spectateurs de France ne retient du film que sa satire au vitriol (hum) des journalistes télé élevés au rang de stars et des errements des chaînes...

le 25 août 2021

73 j'aime

5

The Power of the Dog
Cinephile-doux
8

Du genre masculin

Enfin un nouveau film de Jane Campion, 12 ans après Bright Star ! La puissance et la subtilité de la réalisatrice néo-zélandaise ne se sont manifestement pas affadies avec Le pouvoir du chien, un...

le 25 sept. 2021

70 j'aime

13