Roma ou l'humanité du portrait

  Roma est un film d’une grande élégance. Cuaron sait faire preuve de virtuosité sans pourtant tomber dans le tape à l’œil. Son premier plan en est un beau témoin. Le sol en train d’être lavé. Petit à petit, par le son et le reflet de l’eau, on découvre quelques éléments de l’environnement. La rumeur de la ville, un avion qui passe (et qui terminera aussi le film), le garage d’une maison luxueuse, etc. Ce premier plan est à l’image du film et nous invite ainsi à nous poser la question suivante : comment sublimer le simple par l’élégance de la mise en scène ? 
Dans la maison bourgeoise du quartier de ROMA, Cléo travaille en tant que bonne. Elle s’occupe des enfants et nettoie les crottes du chien : rien d’extraordinaire. Spectatrice au centre de la maison, la caméra dresse, par ses longs panoramiques, un portrait social et personnel, à la fois simple et beau, d’un foyer comme les autres. Le plan séquence lui permet également d’instaurer une certaine tension lorsque Cléo va chercher les enfants qui manquent de se noyer. Un travelling qui rentre dans la mer avant d’en sortir et de nous laisser à nouveau respirer. Il évite l’artifice du découpage lors des scènes clefs du personnage de Cléo en n’hésitant pas à jouer avec le cadre de l’action. On pense alors à la scène rupture dans un cinéma où son amant s’extirpe avant le générique. Une succession de tranches de vie où tout se déroule dans une mesure qui nous touche par son humanité. Pas de longs violons mélodramatiques pour accompagner les scènes fortes, la musique est absente du métrage et laisse place à un travail du son titanesque. Le point de vue, ce que l’on voit par rapport à ce que l’on entend, l’attention particulière prêtée aux bruits du quotidien, etc. Bénéficiant d’un mixage en 7.1, la spatialisation sonore prend ici une ampleur qui me fait me sentir privilégié, le film n’étant distribué que sur Netflix en France. On peut se ravir que ROMA rencontre un public plus large grâce à la plateforme, mais aussi s’attrister qu’un film en scope et au travail du son si minutieux ne bénéficie pas de plus de projections en salle.