12 jours présente une confrontation.
D'un côté nous avons les fous, parfois se considérant comme tel, parfois niant la nécessité de se faire soigner. Une chose les unies : Ils veulent tous sortir de l'enfermement sous contrainte. De l'autre côté, des magistrats. Ils ne cessent de répéter qu'ils ne sont pas médecin, que leur opération se base sur des écrits de psychiatres, remettent même en question leur utilité. Le verdict est toujours le même : l'internement est prolongée. Un dyptique qui oppose deux logiques. Celle du juge, respectant les termes de la loi, faisant signer froidement un document à celui qui vient de voir sa peine se prolonger. Et celle du patients, ayant sa propre logique face à l'incompréhension de cette justice déconnectée, la pensée tourmentée d'un malade qui vit sa folie qu'on lui impose à coup de mot savant qu'il peine à comprendre. Ce diptyque dans la froideur rigoureuse d'un champ/contre-champ, sépare les situations, déconnecte ces mondes qui semblent ne pas évoluer sur le même plan. Les patients ont une réalité qui leur est propre, avec des histoires, des sensations... les juges sont humains, voient la détresse, la tristesse, mais n'essaie pas d'y remédier. Une sympathie professionnelle, compréhensive mais qui ne guérit pas.


Et si ce diptyque était en réalité un triptyque ?
Un triptyque composé du juge du patient et de son avocat ? L'avocat se présente comme une figure rassurante, une jeune fille souhaite s'exprimer après son avocate, consciente de la difficulté liée à la parole. Cependant, ces autres figures de la justice ne prennent pas réellement défense de leur patients, le pouvoir, l'autorité intellectuelle et incontestable est dans les écrits du médecin


Non, la figure de La Défense est secondaire, c'est la figure du secours qui forme se triptyque. La caméra de Depardon filme les entretiens d'une manière chirurgicale. On observe de plus prêt, on voit chaque détails, chaque tics, les larmes qui ruisselles, quand vont-elles tomber ? Une caméra qui ne prend pas partie dans sa mise en scène. "Zoomez" dit un patient pour que la caméra capte les blessures dû à l'internement. La caméra ne bouge pas. Elle est là, dans la démarche de se positionner ici, elle donne un espoir au patient, une autre oreille, un nouveau moyen de se faire entendre. Mais donne également la parole à ceux dont le statut fait qu'on ne prend même pas la peine de les écouter.


Les patients se retrouvent face à des figures d'autorité judiciaires et artistiques. Il y a une volonté de s'exprimer le mieux possible. Un des patients s'excuse pour son cheveux sur la langue, soucieux du bon fonctionnement de la communication. "Je vous comprends très bien" répond la juge qui prolonge son internement et se fait remercier pour son abus de pouvoir. La communication est au coeur du film est c'est en cela qu'il est touchant. Les mots expriment les maux et nous questionne sur l'origine de cette folie.


Un film vrai, nécessaire, à la fois touchant et terrible, à la fois beau et laid.

LéoPrzyb_z
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le 11 déc. 2017

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Léo Przyb'z

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