A peine la salle obscure s'ouvre sur le film, que la satire moralisante, mais diablement efficace, nous ouvre les ailes. Il aurai fallu le regretté Sydney Lumet ou aujourd'hui un Steven Soderbergh pour signer un sujet pareil.
Hélas non, c'est au tâcheron Jay Roach que revient l'honneur de ce pensum étrange, à la fois détestable et délectable.
" Scandale " est une satire syncopée et clinquante, mi-documentaire mi-clipesque, d'une vulgarité plutôt jouissive. On ouvre des yeux écarquillés devant la bêtise de certains dialogues et situations, mais le récit est haletant, et les trois actrices pénètrent bien leurs rôles. Je dit bien " pénètrent " sciamment.
Triste est de constater que le grand film, la grande charge contre le sexisme et le harcèlement sexuel des années # MeToo que pouvait incarner " Scandale ", se transforme ici en sa propre parodie.
Mais revenons d'abord à l'impression de colère que suscite le voile moralisant de cette farce complaisante en talons aiguilles :



  • Le premier des scandales, c'est celui de constater que les mouvements féministes actuels ( #MeToo, # Balance ton Porc, # Femen(s) etc...) sont devenus, en l'espace de peu de temps, les meilleurs représentants du politiquement correct, de la pensée réactionnaire, de la bien pensance policière, accusatrice et terrorisante.


Ces mouvements se définissent également par une pseudo impunité zéro, et un opportunisme médiatique ( ce film en est la preuve ) qui travaille et terrorise nos sociétés contemporaines, pour mieux les hair.


Il y a quelque chose de profondément antipathique mais excitant, dans ce film :



  • Il est le reflet d'une époque ou la grossièreté règne en maître étalon, une époque obsédée par l'urgence, la précipitation, et la simplification de l'information.
    Une époque censée dénoncer le harcèlement sexuel et le sexisme jusqu'à la suspicion contre-productive, voire l'outrance.
    On rappellera que la présomption d'innocence et le Droit, restent des fondamentaux constitutionnels.


A cette hystérie de la dénonciation, comme du scoop permanent, au sein de la rédaction de Fox news ( ici, un véritable poulailler des egos, des postures et des vanités ), répond une sensation de malaise, ou la parole libérée des femmes se doit d'être le doigt sur la détente d'une carabine.



  • Le premier des scandales, c'est celui de constater que Charlize Therone, co-productrice de ce film moralisant et moyen, s'exhibe, à moitié nue, sur tout les écrans et magazines du Monde contemporain, dans des postures ultra-bandantes du sexisme le plus réactionnaire, dans des campagnes publicitaires de firmes cosmétiques mondialisées, tout en se drapant dans ce film du voile puritain de la conscience féministe.
    Ce double-jeu ne trompera personne.


La lucrative double imposture lui rapportera des millions de dollars. Tant mieux pour ses futurs liftings, villas et autres caprices de star vampirique. Vous me trouvez odieux..? Regardez ce film, il l'est doublement.


Je la félicite d'obtenir ainsi la Palme d'or du cynisme et de l'opportunisme pour ce film qui n'a, définitivement, plus peur de rien, même pas du ridicule le plus étourdissant.



  • Si ce n'étais pas déjà là la démonstration parfaite d'un cynisme et d'un opportunisme spectaculaire, je le répète, on aurais envie de pleurer de rire.
    Mais ici, on ne ris plus.
    On ne ris plus devant ces nouvelles féministes, cette nouvelle inquisition de la suspicion
    généralisée, ce nouveau fascisme qui ne dit pas son nom, réduisant les hommes au mieux à des prédateurs froids, au pire à des " porcs " libidineux et dénués de conscience.


Pourquoi en sommes-nous arrivés à un tel niveau de farce et de grand Circus, ( réseaux sociaux, médias, courants de pensée...) à cette pensée qui terrorise l'inconscient collectif..?



  • La réponse est simple:
    Ce sont ces mêmes courants de la nouvelle pensée féministe et policière, qui ont poussés Hollywood, dans le cynisme le plus absolu, à surfer sur la nouvelle tendance lucrativo-féministe en produisant ce film efficace mais pétri de simplifications, ou les femmes y sont représentées en victimes permanentes et vénales. Victimes ET complices des faits reprochés.
    Le système machiste, lui, est toujours coupable.
    Le film évite donc soigneusement de nous dévoiler la voracité et l'ambition carrièriste de ses trois héroines, " prêtes à tout " ( cf Nicole Kidman dans ce film de Gus Van Sant dans un personnage très proche de celui-ci ) pour la bonne cause: #MeToo...? Non....Leur carrière, leurs intérêts, leur égocentrisme médiatico-égotiste. En somme c'est toute l'ambivalence d'une Amérique à la fois puritaine et putassière qui se cristallise dans " Scandale " .
    C'est toute la zone grise de l'ambition humaine, et des moyens d'y arriver, avec ici une salle de rédaction sans aucune solidarité, qui amènera finalement Gretchen Carlson ( Nicole Kidman ) à terrasser son patron.


  • Nicole Kidman ( visage inexpressif, refait, plâtreux ) humiliée et perdue, Charlize Therone ( visage félin et froid, jouant une Megyn Kelly remarquable ) et Margot Robbie ( plus oie blanche bimbo-isée que jamais dans un rôle difficile de potiche en demande d'ascension ) , rivalisent de ténacité pour finalement convaincre le spectateur.
    Parfois, l'agacement et l'exaspération montent, assortis d' un récit syncopé, clipesque et lourd. Très américain, et si manichéen, que le film nous lâche, et n'en devient qu'un long tract pour les valeurs du parti Démocrate.
    Le souci, c'est surtout qu'il en devient populiste et sexiste malgré lui. Hillary Clinton en aurai-t'elle avalée son dentier..?



Trois anges du nouveau puritanisme qui ont, sciamment décapités la masculinité sur l'autel du suspect permanent, du " porc " en puissance, si possible, allons-y pour les clichés... Quinquagénaire et adipeux, toujours manipulateur et grossier ( Roger Ailes, pdg de la Fox, victime expiatoire de l'ère Trump et finalement personnage qui en devient attachant, malgré lui, devant tant de cynisme ).
Son interprète, John Lithgow, est remarquable et son jeu, plus nuancé, dans une partition de patron alternant un sexisme à la bon papa et un paternalisme sympathique, incarne ici un bénisseur d'ambitions et un tonitruand capitaine du vaisseau Fox News.



  • Les trois anges, le film enfin achevé, nous paraissent trois garces tacticiennes, ou finalement émerge une victime : Roger Ailes, vaincu, écrasé et humilié par une machine bien-pensante et artificielle ou la moindre allusion de séduction, la moindre gaudriole allusive, devient accusation outrée et capitale.
    Un Monde froid nous attends, celui on l'on ne pourra plus rien dire, ni exprimer, ni séduire. Un Monde lisse, plat, sans dragueurs maladroits ni bimbos hésitantes, politiquement correct et si bien peigné qu'il ne respirera que de son propre ennui.


Quel manichéisme imbécile.



  • Une chose est certaine, c'est que ce film portes bien son nom...A trop vouloir dénoncer le sexisme, il s'est transformé lui-même en sa propre parodie. Un film de vengeance, ultra réjouissant malgré lui, car d'une efficacité évidente et cinglante.


    Mais " Scandale " n'est donc pas l'incarnation artistique de la dénonciation d'un scandale, mais bien, malgré lui, une - farce aux clichés - , une - valse des pantins - tonitruante, et l'incarnation ultra-contemporaine du vrai scandale, celui de la vacuité et de la bêtise d'une époque, la nôtre, et du Monde tel qu'il va.


Ferenzino47
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le 22 janv. 2020

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Patrick Mille

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