Schlock a toutes les qualités et tous les défauts d’une œuvre de jeunesse révoltée, John Landis le réalisant en onze jours suite à son éviction d’un concours d’entrée auquel il avait pourtant était admissible (qui plus est, en première position !). Parmi ses qualités, nous retrouvons la fougue d’une œuvre parodique qui ne se soucie jamais ni du dosage ni de la pertinence de sa matière burlesque : soit une collection d’idées tantôt jouissives tantôt balourdes qui s’enchaînent les unes aux autres sans s’influencer véritablement. Le parcours du gorille préhistorique sert de fil conducteur à une suite de péripéties qui jouent avec les codes du genre de la série B ou Z du cinéma fantastique ou de science-fiction, dans un esprit qui mêle la parodie à une forme d’abstraction : Landis évacue tout enjeu et se contente de filmer un corps dans son interaction avec d’autres corps dans un décor brûlé par le soleil.


Dommage que l’épure adoptée ne conduise le cinéaste à réfléchir davantage sur la figure du monstre, que la clausule tragique ne saurait suffire à ériger en martyr – en martyr de quoi ? L’approche esthétique ne semble pas doublée d’une démarche réflexive aboutie. À mesure que son récit progresse en suivant les cadavres et les peaux de bananes, Schlock change son gorille en personnage principal, plus authentique que les fantoches rencontrés çà et là en ce qu’il détient une opacité fascinante et drôle à la fois. Les nombreux regards face caméra contribuent à briser le quatrième mur et à créer une complicité entre lui et le spectateur : tous deux s’amusent à démasquer la bêtise de l’Amérique profonde, de la small town californienne aveugle et puritaine. L’intrigue commence par s’attacher à un groupe de jeunes mais adopte ensuite une pluralité de focalisations n’ayant en commun que l’animal, pris au piège dans un faisceau d’idioties paranoïaques que manipulent les médias. Il manque alors au long métrage des cibles claires et définies, et non un tir tous azimuts qui ne touche personne et qui disperse son énergie corrosive.


Restent une originalité et une vitalité appréciables, ainsi qu’un gorille plastiquement remarquable – le costume et le maquillage sont excellents et lancent la carrière de Rick Baker, maquilleur spécialiste des effets spéciaux d’œuvre mémorables comme An American Werewolf in London (John Landis, 1981), The Howling (Joe Dante, 1981), Wolf (Mike Nichols, 1994) et Wolfman (Joe Johnston, 2010), pour n’en citer que quatre mettant en scène le loup-garou.

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le 9 mars 2021

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