Un David Fincher au sommet de son art, une mise en scène méticuleuse et des personnages charismatiques au possible. Voilà ce que nous offre ce film créé en 1995, vendu comme LE thriller qui a réinventé les codes de son genre. Avec une enquête haletante et des rebondissements inattendus, ce long métrage de deux heures nous plonge dans une ambiance sombre d’encrage, caractéristique du style du réalisateur, notamment le fameux sang coulant noir ou l’étalonnage des plans jouant sur les contrastes sombres que peut nous offrir chaque couleur. Le monde tel qu’il est représenté nous paraît alors morbide de sens, presque irréel. Mais comme souvent avec Fincher, ce n’est pas sans lien avec le prisme des personnages. Notamment celui de l’inspecteur joué par Morgan Freeman, qui nous offre une vision ternie de la société. En effet, avec ses décennies en tant qu’inspecteur, il dresse un constat noir de la nature humaine, perverse à souhait, où la place de l’enfant ne lui semble d’ailleurs pas légitime. L’opposition des deux personnages principaux est loin d’être équivoque, avec le nouvel inspecteur plein d’ambition et celui proche de la retraite, perdant par la répétition de tâches sordides la passion de son métier. J’y trouve une bonne alchimie entre les deux personnages, sublimée par un jeu d’acteur naturel au possible, et deux perceptions de vies intéressantes.
⚠️ Attention spoiler
Ce film sort dans un contexte cinématographique où le « happy end » semble irrémédiable à chaque nouveau film d’Hollywood. Ce film dénote totalement de cet a priori, en nous offrant un twist connu et reconnu comme déroutant et choquant. Néanmoins, cette fin semble être relativement incomprise quant au concept même du film : les 7 péchés ne comptent que 6 morts et 1 victime collatérale (la femme de Mills), où la « Colère » n’est pas punie mais décrite comme une simple vengeance de l’Envie. N’y avait-il pas nécessité de la punir ? Je m’attendais réellement à ce que David Mills aille jusqu’au colis et se suicide, achevant ainsi l’œuvre de John Doe, l’antagoniste. Mais était-ce réellement son but ? Ne cherchait-il pas un simple prétexte pour torturer par passion, et par la même occasion influencer une nouvelle vague de tueurs en série comme décrit dans la scène de la voiture ?
Il n’en reste pas moins que ce dénouement tragique n’est pas faute d’être annoncé par la mise en scène sombre ou la vision de William Somerset, l’inspecteur plus expérimenté. La profession d’inspecteur existe parce que le monde est, et sera, sujet de crimes toujours plus horribles les uns que les autres. Ainsi vient la morale de l’histoire dans l’épilogue : le monde est peint comme pourri et vide de sens, mais il mérite une justice battante. Point de vue que partagera sûrement l’inspecteur veuf de sa femme et de son enfant, sur le chemin d’une vie renouvelée par le sang.
Pour parler rapidement du méchant incarné par Kevin Spacey, je le trouve très efficace, autant dans son interprétation que dans son concept. J’exprime comme seul regret une iconographie moins percutante que celle de ces autres méchants à l’empathie froide, comme Hannibal Lecter ou encore Jigsaw. Évidemment, le propos s’appuie sur le fait que c’est le produit de l’humain aussi normal soit-il, pourtant on observe des bribes de quelque chose, comme avec les pansements sur ses doigts pour effacer ses empreintes. Je sais pas, rasez-lui les sourcils, faites un truc…
Pour finir, et parce qu’il faut que je révise mon Capeps, Se7en a su s’imposer comme un immanquable du genre. Jeu d’acteur au top, Brad Pitt a su se montrer convaincant dans son rôle, même si j’aurais aimé un peu plus de profondeur dans son personnage (pas toujours foncer tête baissée). Bonne photographie, la pluie constante donne un vrai attrait à l’œuvre, l’idée est originale et géniale, bref je recommande !
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