Z-Day.
A deviser avec l'amie Louisette sur ce que nous ferions en cas d'attaque soudaine de zombies (Louisette, si tu me lis, je trouve plus de pansements Hello Kitty mais j'en ai des Dora, ça ira ?), moi...
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le 28 janv. 2014
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8
Spaced est une sitcom britannique diffusée à la fin des années 90, elle raconte l’histoire de Tim, un aspirant dessinateur de bande dessinée, et Daisy, une journaliste en herbe, qui décident de se faire passer pour un couple afin de louer un appartement à Londres. Autour d’eux gravite une galerie de personnages excentriques : Mike, l’ami militaire un peu cinglé, la propriétaire bohème Marsha, ou encore Brian, un artiste torturé. La série se distingue par son style visuel inventif et son humour référentiel : chaque épisode regorge de clins d’œil à la culture geek, aux jeux-vidéo, au cinéma, aux comics et aux séries TV. L’humour est à la fois absurde, ironique et profondément humain, mêlant la comédie de situation à une approche visuelle presque cinématographique.
Dans l’épisode Art, Tim consomme des amphétamines après une rupture sentimentale et, sous l’effet de la drogue et de son obsession pour le jeu Resident Evil 2, commence à avoir des hallucinations. Dans sa tête, le monde réel se transforme en univers de jeu-vidéo, et il croit devoir affronter une invasion de zombies dans les rues de Londres. Cet épisode mélange comédie du quotidien britannique et références visuelles empruntées au cinéma de genre. C’est ce segment précis qui servira de base à une idée de long-métrage : transposer cette situation absurde dans un véritable film de zombies.
Edgar Wright, Simon Pegg et Nick Frost forment un trio créatif particulièrement complice sur la série dans les postes de réalisateur, scénaristes et interprètes. Leur alchimie sur le tournage et leur passion commune pour la culture pop nourrissent la série et posent les bases de leur futur travail. Tous trois partagent un goût pour les détournements de genre : prendre des codes narratifs issus de l’action, de la science-fiction ou de l’horreur, et les ancrer dans le quotidien britannique le plus ordinaire. Cette approche, à la fois parodique et sincère, va donner naissance à leur premier long-métrage commun, prolongeant l’esprit de la série tout en lui offrant une dimension cinématographique plus ambitieuse.
En 2004, Shaun of the Dead sort au cinéma et marque le passage du trio Wright / Pegg / Frost à une reconnaissance internationale.
Je ne suis pas particulièrement sensible à l’humour britannique. Ce mélange d’absurde, de nonchalance et de flegme pince-sans-rire me laisse souvent de marbre. Pourtant, ici, Edgar Wright parvient à dépasser ce simple registre comique. Au-delà des blagues et du ton typiquement british, j’ai trouvé un réel plaisir dans la profusion de références, de détails visuels et de clins d’œil qu’il dissémine tout au long du film. Wright ne se contente pas de faire rire, il construit un véritable jeu de piste cinéphile. C’est dans ce dialogue permanent avec le cinéma de genre que j’ai trouvé mon compte : plus qu’une comédie, le film est une déclaration d’amour au septième art.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que le film est profondément référencé. Il s’inscrit dans une tradition de cinéma de genre tout en la commentant avec humour. On y retrouve des clins d’œil constants à la filmographie de George A. Romero, le maître incontesté du zombie moderne, mais aussi à Sam Raimi et ses zooms frénétiques si caractéristiques, à Danny Boyle, ou encore à tout un pan de la série B des années 70–80. La bande-son, les cadrages, les bruitages : tout est pensé pour évoquer les codes du film d’horreur sans jamais les copier servilement. Edgar Wright prouve ici qu’il est avant tout un cinéphile passionné. Son film est à la fois une parodie intelligente et un hommage sincère à ces films souvent méprisés mais essentiels dans l’histoire du cinéma populaire. Regarder le film, c’est aussi s’amuser à dénicher ces multiples références, un peu comme on chercherait les easter eggs d’un jeu-vidéo.
Ce jeu permanent entre hommage et humour n’est pas nouveau chez Wright : c’est exactement ce qu’il faisait déjà dans sa série. Elle posait les bases de ce mélange entre la comédie du quotidien et l’imaginaire du cinéma de genre. Dans sa série, les références servaient à exprimer l’état d’esprit des personnages : leurs peurs, leurs frustrations, leurs rêves. Dans le film, cette idée atteint une forme de maturité : les références ne sont plus seulement des clins d’œil pour initiés, mais deviennent le cœur même de la mise en scène. Wright, Pegg et Frost prolongent ainsi l’esprit de la série en lui donnant une ampleur cinématographique, tout en conservant leur ton décalé et leur attachement à la culture geek.
Mais ce n’est pas qu’un film pour amateurs de culture pop. Sous sa surface comique, il cache une critique sociale étonnamment lucide. Dès le générique, Wright montre des Londoniens errant mécaniquement dans les rues, les supermarchés et les pubs, tels des zombies avant même l’épidémie. La société moderne y apparaît comme une machine qui déshumanise, qui transforme les individus en créatures dociles répétant inlassablement les mêmes gestes. Le véritable dilemme de Shaun n’est pas seulement de survivre aux morts-vivants : il s’agit pour lui de choisir entre la routine anesthésiante de la vie adulte et l’immaturité confortable de son existence avec Ed. Entre conformité et résistance. En décidant de se battre, littéralement, contre les zombies, Shaun affirme son individualité. La lutte contre les morts-vivants devient alors métaphore d’un combat existentiel : refuser de se fondre dans la masse, continuer à exister en tant qu’être singulier.
Malgré mes réserves initiales envers l’humour britannique, j’ai finalement pris beaucoup de plaisir. Les nombreuses références au cinéma d’horreur et aux séries B ont éveillé ma curiosité, et m’ont permis d’apprécier le film sur un autre plan. On sent une vraie affection derrière chaque plan, chaque clin d’œil. Et la plus belle reconnaissance pour Edgar Wright reste sans doute celle de George A. Romero lui-même, qui a déclaré avoir adoré le film. Qu’un maître du genre salue un hommage aussi décalé prouve la sincérité et la réussite du projet.
Shaun of the Dead est bien plus qu’une simple comédie britannique ou qu’une parodie de film d’horreur. C’est une œuvre hybride, à la fois drôle, touchante et intelligente, qui joue avec les codes pour mieux les réinventer. Edgar Wright y affirme déjà un style de mise en scène unique, fait de précision rythmique, de montage expressif et d’un profond amour du cinéma. Même pour ceux qui, comme moi, ne sont pas adeptes de l’humour british, le film se révèle une expérience jubilatoire : un hommage vibrant au cinéma de genre et à la créativité sans frontières.
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Créée
le 20 janv. 2023
Modifiée
le 11 nov. 2025
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