Nombreux, sont ceux qui à l'époque se sont moqués de ce faux plan séquence qui ouvre brillamment "Snake eyes", considérant De Palma comme un poseur, un simple formaliste, imitateur sans talent du grand Hitchcock.


S'il est vrai qu'ici comme chez Hitch, les éléments de résolution de l'intrigue et même les preuves nous sont jetées au visage bien souvent dans le tumulte d'une scène durant laquelle le réalisateur porte notre attention dans une autre direction, si la blonde d'apparence Hitchcockienne ici Carla Gugino (... ailleurs Mélanie Griffith), sont des références récurrentes chez l'américain et même s'il la revendique avec fierté, De Palma s'est très souvent affranchi de l'influence du maitre anglais.


Snake eyes est avant tout un film ancré dans son époque, thriller conspirationniste (l'assassinat politique), militaire (qui n'est pas sans rappeler parfois des hommes d'honneur) et frénétique, accompagnant donc Rick Santoro flic haut en couleur (Nicolas Cage) au milieu des travées du casino D'Atlantic city où 14000 personnes s'ont massées pour suivre un combat de boxe.

Ce long plan probablement coupé plusieurs fois, à la faveur d'un dos d'un gros plan sur un visage..., est une incroyable prouesse technique nous menant de l'extérieur du bâtiment là où une journaliste présente la rencontre et l'arrivée d'un secrétaire d'état, pour nous faire entrer dans les couloirs du complexe puis dans la salle, assister au meurtre dudit secrétaire dans le même mouvement de caméra, pour finir par écorner l'image de la blonde hitckockienne, lorsque la principale suspecte perdra sa perruque dans une fuite, entravée dans ses mouvements par une robe maculée de sang.


Si tant est que l'on puisse ici accuser notre cher Brian d'emprunts , les références sont plutôt dirigées vers Scorsese et son plan d'ouverture des "Affranchis" ou Leone et sa majestueuse scène de la gare dans "Once upon a time in the west".

La suite, brillant exercice style, (nous sommes chez De Palma), alterne split screen (s), travail sur le flou, lorsque la caméra adopte le point de vue de la suspecte myope (qui se mue en témoin puis en victime) ; panoramiques à 360 degrés vertigineux travelling en plongée avec vue sur les chambres de l'hôtel accentuant le sentiment le sentiment d'immensité du lieu et la perte de repères ; images intenses d'un ouragan naissant à l'extérieur confortant encore le sentiment d'insécurité, maintient une tension permanente.


C'est au cœur de ce tourbillon qu'évoluent en presque huit clos les personnages, l'inspecteur donc, Julia la fausse blonde (Carla Gugino) et le commandant Dunne responsable de la sécurité (excellent Gary sinise) meilleur ami du policier. Personnages "De Palmesques" par excellence, à commencer par ce flic assez peu scrupuleux qui n'est pas sans rappeler le personnage de Travolta dans Blow Out, pauvre ère impliqué bien malgré lu,i dans ce qui semble être une machination, ayant de graves implications politiques (Si l'on vous dit que Brian a été profondément marqué par l'assassinat de Kennedy....)


La sororité entre les deux œuvres deviendra de plus en plus ténue au fil de l'accomplissement du récit, lorsque les images vidéos du premier plan analysées, livreront la vérité, comme les sons enregistrés lors de l'accident de Blow Out.


Et c'est tout naturellement que le métrage se conclura ,faisant écho toujours au chef d'œuvre de 1979 par une scène épique d'une incroyable virtuosité confrontant le destin incertain de personnages devenus très attachants à la menace extérieure du déchainement de la tempête, la réponse étant peut-être cette fois soufflée par le vent?


Yoshii
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le 25 mars 2024

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