C'est quand même plutôt paradoxal que le film commence sur la phrase "Les Américains n'aiment pas le changement" parce que bien que le film ait la qualité d'être indépendant, dans la mesure où Tom McCarthy a pu librement mettre en scène son histoire, il est quand même extrêmement convenu. J'avais beaucoup aimé Spotlight à l'époque, probablement parce que le sujet était sensible, et que j'aimais la tentative de parler d'un sujet tabou. Dans Stillwater, tout transpire le réchauffé, c'est plutôt décevant.


Le film s'ouvre pourtant sur 30 premières minutes plutôt convaincantes, le personnage de Matt Damon, Bill, n'est pas parfait, il est très conservateur sur sa façon de voir et de penser, et sa rencontre avec le personnage de Camille Cottin, qui aux premiers abords semble être une femme assez libre, indépendante, avec son caractère de bobo (oui, ça peut faire un bon personnage) nous donne envie de voir ce que pourrait donner un sujet aussi lourd que le deuil et l'acceptation de son destin avec ce duo si différent dans leur culture et leurs caractères. J'ai aimé aussi au début, comment McCarthy filme Marseille : pas comme une vulgaire carte postale, on voit qu'il connait ce qu'il filme, et que son intention est de nous plonger directement dans des quartiers pas très accueillants, et au mieux dans des appartements de 40m2. Le ton monte aussi rapidement dans le montage, le thriller semble arriver tranquillement. Mais une fois le premier climax arrivé, le film tombe dans le mélodrame romantique vu un milliard de fois..


Déjà, je trouve le film très soft dans sa manière de filmer la violence et le mauvais coté de ses personnages, du coup, on a jamais rien à leur reprocher, on est toujours en permanence de leur coté, sans jamais remettre en question leurs actes, spécial dédicace au personnage de Camille Cottin qui, bien que l'actrice l'interprète plutôt bien, est un personnage ultra lambda, n'ayant aucun défaut (elle aime l'humanitaire, elle élève seule sa fille avec le père qu'on ne verra jamais, elle refuse de parler aux racistes etc..) bref le modèle ultime de personnage féminin stéréotypé, qui tombera évidemment amoureux de notre protagoniste, avec toutes les phases qui s'ensuivent : la séduction, le doute, l'amour fou, et enfin la trahison. No Spoiler. Et concernant la violence, comme elle est soft malgré le sujet lourd, on est jamais inquiet, jamais déstabilisé, le film suit ardemment les lignes d'un scénario très prévisible que l'on a vu un bon paquet de fois. Du coup, tout l'est aussi, prévisible. J'ai été capable de deviner dans presque chaque séquence ce qui allait se passer et ce que tel ou tel acte allait amener. Pareil pour la fille de Camille Cottin, très gros cliché de la gamine fan du mec que sa mère rencontre, jusqu'à mentir pour l'aider.


Du coup, le mélodrame tombe dans un pataud super mou, enchaînant des séquences dialoguées qui sonnent presque comme une parodie maintenant. "Tu sais, je l'aimais plus que tout." - "Je n'y serai pas arrivé sans toi." Tant de dialogues chiants où le silence et les regards pouvaient parfois être beaucoup plus intense et suffire largement. Marseille se transforme cette fois en île magnifique où l'on va se baigner dans un beau ciel bleu des Calanques, 20 min après avoir filmé le bas des quartiers Nords. La musique est omniprésente tout le long du film, que ça soit lors des balades des personnages, lors des scènes plus pesantes ou lors des scènes tristes : piano et violon. C'est à la limite du ridicule. Bill, lui aussi, est un stéréotype parfait : américain conservateur je l'avais dis, mais qui a un cœur si bon, et qui veut si bien faire, comment peut-on lui en vouloir de commettre les actes qu'il commet à la fin ?


On connaît la réponse, et la fin résume plutôt bien le film : là où Bill a l'impression que tout a changé, nous, spectateur, restons un peu las de ce long-métrage, qui a des bonnes choses, mais qui est un énième drame familial avec la petite dose de thriller fragile qui, à mon avis, ne fera frémir personne. C'est du vu, vu et revu, malgré les qualités qu'on peut lui trouver, comme le jeu très bon de Matt Damon, ou la mise en scène classique mais efficace au début.

Guimzee
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le 28 sept. 2021

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