Ressentir c'est bien, comprendre c'est mieux

Ça y est, après de longs mois d'attente, de déceptions suite aux reports et d'impatience démesurée j'ai enfin pu voir Tenet, le nouveau film de Christopher Nolan. Un réalisateur que, sans surprise, j'aime beaucoup : Le Prestige, The Dark Knight et Inception dans mon top 20 Films, il était donc évident que j'attendais énormément ce film. Les trailers étaient assez mystérieux et ne dévoilaient pas grand chose, tout était à découvrir : les enjeux, l'exploitation du concept, les personnages... Tenet, c'est aussi le film sur lequel comptent les salles pour retrouver un public et éviter le naufrage, on ne peut pas savoir si ce côté là sera une réussite, on verra ça dans quelques semaines. Ce qui nous intéresse ici, c'est le film en lui-même, que vaut-il ? J'ai beaucoup aimé, la note parle d'elle-même hein. Nolan propose ici (à mon sens) un digne héritier d'Inception, en un peu moins bien, un film d'espionnage classe, avec un excellent casting, un concept de fou, des scènes d'action impressionnantes qui n'hésitent pas à utiliser le concept pour les rendre intéressantes et un scénario captivant qui nous perd un peu sur la fin (en tout cas, qui me perd).



Attention spoilers



Et croyez moi il faut les éviter (et puis vous aurez du mal à comprendre la critique si vous n'avez pas vu le film)


Une des nombreuses promesses du film concernait le casting : principalement, on a d'un côté John David Washington qui après la révélation de BlacKkKlansman doit confirmer qu'il peut devenir une valeur sûre, grâce à sa prestance et son talent. D'un autre côté on a Robert Pattinson qui doit essayer de sortir de son rôle de Twilight aux yeux du grand public et montrer que c'est un très bon acteur, qui pourrait faire fermer des bouches dans son rôle en tant que l'homme chauve-souris. Au final, les deux sont excellents, une très bonne interprétation et surtout une immense classe et du charisme, à l'instar de l'équipe des braqueurs d'Inception. Le contrat est rempli pour les deux, je pense que John David Washington peut devenir un grand acteur, il en a la capacité, il faut juste qu'il continue à jouer pour de grands réalisateurs et Robert Pattinson montre ici qu'il s'est détaché de Twilight (bon la plupart le savait depuis quelques temps déjà) et qu'il deviendra un grand également. Kenneth Branagh dans le rôle du méchant est superbe aussi, il est menaçant et est à fond dedans, avec quelques pics de colère le rendant encore plus inquiétant. Elizabeth Debicki apporte une touche de féminité et prend plus d'importance que prévu, elle s'en sort très bien de son côté aussi mais son interprétation ne me marquera pas plus que ça. Le reste du casting est beaucoup plus anecdotique (oui même Michael Caine) donc c'est assez compliqué de juger leur travail.


C'est une habitude chez Nolan, le prologue du film est excellent et nous plonge directement dans l'ambiance du film. Je l'avais déjà vu mais pas de la meilleure des manières et oui, sur grand écran ça a clairement un autre impact. Un silence interrompu par des tirs de mitraillette, le son dans la salle était assez fort donc ça surprend et la tension monte rapidement. Le bruit assourdissant des balles et de l'excellente musique de Ludwig Göransson rendent ces 10 premières minutes impressionnantes et nous accrochent à notre siège. Contrairement à Inception, ce prologue ne présente pas le concept à l'aide d'images mais est tout simplement une introduction parfaite à l'intrigue et est très utile au sein du scénario.


Tenet est un film d'espionnage et le genre se fait beaucoup ressentir lors de la première partie, on est sur une ambiance à la Mission Impossible-James Bond, un agent mort aux yeux de tous qui semble sur-entraîné chargé d'empêcher une Troisième Guerre Mondiale. Pour ça il doit approcher certaines personnes tout en voyageant beaucoup, et en se battant. Voilà ce sont des éléments qu'on retrouve dans pas mal de films d'espionnage, Tenet en respecte tous les codes. Cette première partie est très rapide, pas de temps à perdre avec des dialogues inutiles, on va droit au but, un personnage dit qu'il faut faire quelque chose, hop ellipse John est à l'endroit où il doit être pour faire cette chose. Il doit contacter quelqu'un ? Hop ellipse il rencontre cette personne. Le rythme lors de cette première partie est donc parfait grâce à un montage efficace et quelques scènes d'action qui font plaisir. Bien sûr, cette première partie nous présente les personnages, les enjeux et nous expliquent un peu le concept d'inversion. Le protagoniste (il n'a pas de nom) doit empêcher une guerre qui a lieu dans le futur, le problème est que ce futur envoie des éléments pour mener à cette guerre. Le but est d'appréhender Sator, un trafiquant d'armes qui retient sa femme afin d'éviter qu'il provoque cette guerre. Les enjeux sont donc assez conséquents...mais trop vite présentés, c'est ce que je reproche au film, on n'a pas le temps d'assimiler les enjeux, de se rendre compte qu'ils sont énormes, c'est l'inconvénient de la rapidité évoquée plus haut. Mais bref, avant d'approcher Sator, il faut approcher sa femme qui amènera le protagoniste à Sator. Avec l'aide de Neil (Robert Pattinson), il finit par y arriver et John (on va aussi l'appeler par le nom de l'acteur) est engagé par Sator pour récupérer une malette de 241. Au final, cette partie est assez classique dans le genre de l'espionnage et n'utilise que peu le concept d'inversion, elle reste quand même très efficace et est nécessaire, c'est durant cette partie que le protagoniste et Katherine vont développer une relation (voire des sentiments), ce qui va servir de justification pour certains événements.


Avant d'aborder la deuxième partie, il est important de parler du fameux concept, ce qui donne une plus-value et de l'originalité au film. Ce n'est pas un secret, Nolan aime jouer avec le temps, il commence par la fin dans Memento, il utilise la dilatation temporelle et la relativité dans Interstellar (merci Google, ceci dit j'ai toujours pas trop compris ce que c'était et pas sûr que ce soit ça, je recopie ce que j'ai vu en tapant « le temps Interstellar »), il utilise la relativité dans Inception, il alterne passé et futur dans Le Prestige, bref Nolan aime jouer avec le temps et tout ce qui permet de le déformer. Ici il ne fait pas de voyage temporel mais il inverse le temps, ce qui fait qu'on a une seule timeline, mais que certains vont vers le futur et d'autres vers le passé (chronologie inversée, ça j'ai compris). Au début du film, ce sont seulement des objets qui sont inversés, on ne tire pas la balle, on la reçoit, on ne ramasse pas l'arme, c'est elle qui vient à nous. Ces objets viennent du futur (de cette fameuse guerre j'imagine) et vont vers le passé.


Là où ça se complique, c'est dans la deuxième partie du film, après la poursuite en voitures pour récupérer le 241. A partir de ce moment là, on a tout d'abord ceux qui vont vers le passé et ceux qui vont vers le passé qui communiquent, je pense que là Sator (qui va vers le passé) dit tout ce qu'il a à dire et à faire, quoique réponde John, il convainc donc John de lui dévoiler l'emplacement du 241, il s'inverse et écoute ce que John a à lui dire. Et ensuite, le protagoniste et Neil vont s'inverser pour aller vers le passé afin de reprendre le 241 (pour éviter la guerre) et sauver Katherine, qui s'est fait tirer dessus. Bon...là faut se dire que c'est pas le plus compliqué, j'ai compris assez facilement, on vit ce qu'on a vécu durant la première partie, mais à partir de la fin, c'est-à-dire à partir de la poursuite. Et si y'a bien un moment durant lequel je me suis dit « c'est bon je vais mettre 9 » c'est le moment où on revit l'aéroport d'Oslo, quand on découvre que le protagoniste s'est en réalité battu contre lui même, je sais pas c'était sûrement prévisible mais déjà, quand je regarde un film je ne cherche pas les twists et j'ai trouvé de toute façon que c'était très malin...c'est un peu une manière de dire que le plus grand ennemi, c'est nous-mêmes, ça montre aussi qu'il se débarrasse du lui d'avant, celui qui voyait le monde d'une seule façon, alors que maintenant il comprend et réfléchit avec l'inversion. Maintenant vient le climax et là j'ai chialé, j'ai chialé parce que c'est vraiment très compliqué de suivre. Le but du climax est de faire exploser le 241 pour que Katherine puisse tuer Sator sans qu'il déclenche Tenet, autrement dit : la guerre. 2 équipes (des connaissances de Neil) : une en bleu qui va vers le passé et une en rouge qui va vers le futur, la rouge est chargée de faire exploser le 241 l'autre de...euh bah je ne sais pas trop, je retiens juste que dedans il y a Pattinson qui doit sauver le protagoniste et Ives. En fait on alterne les points de vue et il y a parfois des retours en arrière pour voir les conséquences de ce qu'a fait une équipe sur l'autre, Pattinson qui change de rôle...En fait ce n'était pas si compliqué que ça, c'est juste que j'avais inversé le rôle des équipes et du coup ça m'a complètement perdu parce que le dialogue avec Sator ou encore à la fin quand ils parlent sans masque, c'était pas possible en inversé et je pensais qu'il y avait de grosses incohérences...mais non...juste mon cerveau :/


Breeeef, que retenir de tout ça ? J'ai totalement validé le concept, c'était assez malin et Nolan l'a bien exploité, au final je ne trouve pas le film super compliqué, après avoir pris le temps de réfléchir, j'ai compris le plus important. J'ai adoré voir comment Nolan s'est servi de l'inversion pendant les scènes d'action et comment il a géré la partie où les personnages revivent ce qu'ils ont vécu...mais à l'envers. De plus, les règles de l'inversion sont très claires et ne changent pas toutes les secondes, ce que faisait un peu Inception.


Nolan et les scènes d'action, ce n'est pas forcément une grande histoire d'amour. Dans Batman Begins, je les trouve vraiment pas folles, dans Inception et The Dark Knight/Rises, je les aime bien, elles ne me dérangent pas, mais je vois beaucoup s'en plaindre. Dans Tenet, je les trouve vraiment top. Le prologue déjà, bon parfois ce n'est pas très clair mais rien que la bande son suffit à rendre intéressant le tout. La scène dans la cuisine durant laquelle le protagoniste défonce des sbires de Sator est vraiment cool, l'environnement est utilisé correctement, on ressent la puissance des coups, c'est assez violent même s'il n'y a aucune goutte de sang...comme dans tous les Nolan en vrai, c'est un peu un problème je trouve, surtout quand ça se veut réaliste. Celles dans l'aéroport d'Oslo sont plutôt sympas, j'aime beaucoup les chorégraphies avec les inversions, ça donne quelque chose d'assez « impressionnant ». La poursuite en voitures/camions est très bien également, de toute façon tant qu'on comprend ce qui se passe et que ce n'est pas sur-cuté, ça me va, et puis y'a les fameuses inversions qui comme je l'ai déjà dit, ajoutent réellement quelque chose, comme pour Inception. Le climax par contre j'ai un peu de mal (décidément ce climax...), trop brouillon et surtout on voit trop rarement ceux sur qui tirent les protagonistes, on a du mal à s'inquiéter pour les personnages du coup. En résumé, les scènes d'action sont plutôt bonnes, elles arrivent à être impressionnantes et à nous faire kiffer, c'est du grand spectacle original et j'aime beaucoup.


Les personnages du film sont bons. Ils ont une bonne évolution, celle du protagoniste se fait à travers sa compréhension des inversions, à part ça il n'a pas forcément d'évolution, c'est un personnage qui est « parfait » dès le début : courageux, entraîné, humain, il veut aider Katherine en plus d'empêcher cette guerre, ce n'est pas un personnage qui évolue mais qui porte le film et qui le fait avancer. Neil...Neil c'est compliqué, il arrive rapidement dans le film avec peu d'explication et gagne de l'importance et est plus informé qu'on le croit, j'ai beaucoup aimé sa révélation qui fait un peu Terminator, il vient du futur pour empêcher la guerre et vraiment, Pattinson a trop la classe dans ce rôle. Il est là en soutien au protagoniste puis devient un élément important et nécessaire pour John, le duo qu'il forme avec ce dernier est top, une amitié qui se forme grâce à cette mission. Le méchant, Sator, manque d'ambition, il a un cancer du pancréas et veut emporter le reste du monde dans sa chute, je ne sais pas je ne trouve pas ça dingue, c'est un peu étrange. Il constitue néanmoins une menace assez grande et son background est intéressant...et puis comme je l'ai dit, Kenneth l'interprète très bien. Katherine, la femme de Sator est le personnage qui a le plus gros enjeu personnel : arriver à échapper aux griffes de son mari qui a une emprise sur elle et qui n'hésite pas à la frapper. Le fait que ce soit elle qui tue le bad-guy n'est pas insignifiant, c'est un message de lutte on va dire, ça encourage les femmes battues à faire comme elle (bon peut-être pas à tuer mais au moins à se débarrasser de son mari, à ne pas se laisser faire quoi), le protagoniste fait office de policier dans ce cas là, c'est à lui qu'elle se confie et c'est lui qui va l'aider dans sa lutte. C'est un sujet actuel mais ça reste quand même étonnant de le voir dans ce film, je ne m'y attendais vraiment pas.


Voilà, Christopher Nolan a encore frappé, il ne va peut-être pas faire l'unanimité mais personnellement j'ai adoré. Tenet est un film généreux, que ce soit dans l'action, dans son concept, sur sa BO et ou encore son casting...je ne l'ai pas dit mais il ose même un peu d'humour à certains moments. Les 2h30 passent super vite, le rythme est parfait et je n'ai pas eu le temps de m'ennuyer. J'ai été satisfait, je n'en demandais pas forcément plus. Un grand blockbuster comme j'aimerai en voir plus, merci Nolan de me faire kiffer comme ça.

BestPanther

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