Nous rencontrons des problèmes techniques sur la partie musique du site. Nous faisons de notre possible pour corriger le souci au plus vite.

Réalisateur inconnu en ce qui me concerne, Adam McKay vient de livrer The Big Short, analyse cinglante et glaciale de la crise des subprimes de 2008, ses causes et ses conséquences. Dans la droite lignée de Wall Street d'Oliver Stone, le cinéaste tente d'expliquer comment l'aveuglement des financiers à pu conduire le monde droit dans le mur, alors même que beaucoup d'entre eux savaient qu'un effondrement du système était envisageable. Et le résultat final est un tour de force.


Le film est servi par un casting aux petits oignons : Christian Bale (acteur que je trouve d'habitude assez mauvais) campe ici avec brio le docteur Michael Burry, figure du loser magnifique, qui va mettre en péril toutes les économies de sa société pour tenter un coup de poker à plusieurs milliards. Steve Carell incarne avec beaucoup d'humour Mark Baum, manager de fonds d'investissement qui n'a pas sa langue dans sa poche. Ryan Gosling, délaissant pour une fois son monolithisme habituel, interprète le salaud de la bande, un petit arriviste du nom de Jared Vennett persuadé d'être plus doué que tout le monde. Quant à Brad Pitt, il incarne un rôle plutôt secondaire et son interprétation n'a malheureusement pas grand-chose de neuf à offrir. Je m'attarderais donc plus sur Finn Witrock et John Magaro, deux révélations à suivre qui incarnent ici deux jeunes loups de la finance. Tous sont des personnages plus ou moins amoraux ou profiteurs qui vont découvrir avant tout le monde que le système s'écroulera un jour ou l'autre, pour le meilleur et pour le pire...


Qu'y a-t-il donc de si passionnant dans ce film ? Tout d'abord, sa mise en scène. La caméra est toujours proche des acteurs, virevoltant au milieu des bureaux, toujours en gros plan. La volonté du cinéaste est donc de ne pas perdre une miette des visages des acteurs, puisque le film est une suite d'échanges de regards. Car même si The Big Short est foncièrement très bavard, le film joue beaucoup sur les non-dits, fléau ultime du milieu financier. De plus, le montage est pensé de manière très innovante. Ainsi, il arrive parfois qu'un dialogue se termine pile à la coupe, enchaînant directement sur une discussion différente à l'autre bout de la ville sans pour autant perdre le rythme. Il est évident que le réalisateur veut nous immerger dans ce milieu qui ne cesse jamais de parler, de crier, de gesticuler dans tous les sens.


Mais là où le film transcende son sujet, devenant un exercice de style, c'est dans l'opposition qu'il met en place entre documentaire et pure fiction. Un exemple concret me revient en tête :


Vers le deuxième quart du film, le personnage de Christian Bale explique sa théorie irréfutable qu'il tente de mettre en place pour devenir immensément riche. Une théorie composée d'abréviations en tous genres et de termes brumeux. En voix-off, le personnage de Ryan Gosling interrompt alors l'intrigue pour nous amener dans la salle de bain de Margot Robbie, la bombe sexuelle de The Wolf Of Wall Street (décidément), qui va alors nous expliquer (dans le plus simple appareil et autour d'une flûte de champagne) le fonctionnement du système, avec un vocabulaire bien plus abordable. Là encore, le film met en avant un effet pervers du monde de la finance, celui d'expliquer calmement des choses amorales (en l'occurence des dissimulations d'arnaques) et de recouvrir le tout d'un vernis très soigné, qui nous rend au final totalement aveugle.


Ce genre de petites saynètes se reproduit au cours du film, ancrant ainsi le film à la fois dans une approche purement documentaire, extrêmement factuelle, tout en l'amenant vers une artificialité beaucoup plus "pop", à base de fractures du quatrième mur donc, mais aussi d'astuces inédites et bienvenues (notamment une scène de discussion recouverte de rires enregistrés de sitcom tellement les magouilles des personnages sont énormes). Le tout portée par une B.O de grande classe.


Et c'est précisément là que The Big Short s'accomplit. Sans jamais devenir lourd ou même indigeste, le film parvient à évoquer avec précision et fantaisie l'une des pires tragédies économiques et sociales que l'Humanité ait jamais connue. Le résultat est incroyable, un vrai film coup de poing et qui fait réfléchir.

Bewaretheblob
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2015

Créée

le 10 janv. 2016

Critique lue 517 fois

1 j'aime

Bewaretheblob

Écrit par

Critique lue 517 fois

1

D'autres avis sur The Big Short - Le Casse du siècle

The Big Short - Le Casse du siècle
blacktide
8

La tour infernale

Depuis Le Loup de Wall Street, le genre de l'économie au cinéma a pris un nouveau tournant. En effet, on assiste depuis peu à une mutation d'un public à la fois avide de divertissement et en même...

le 31 déc. 2015

64 j'aime

8

The Big Short - Le Casse du siècle
LeBlogDuCinéma
7

Critique de The Big Short - Le Casse du siècle par Le Blog Du Cinéma

En voyant arriver THE BIG SHORT, bien décidé à raconter les origines de la crise financière de la fin des années 2000, en mettant en avant les magouilles des banques et des traders, on repense...

le 16 déc. 2015

41 j'aime

Du même critique

L'Astragale
Bewaretheblob
2

Aaah, la vie... C'est pas tous les jours facile, hein ?

C'est ainsi que l'on pourrait résumer L'Astragale, nouveau film de Brigitte Sy, adaptation du roman autobiographique éponyme d'Albertine Sarrazin, jeune femme rebelle et anticonformiste, qui s'évade...

le 15 avr. 2015

11 j'aime

2

Cerise
Bewaretheblob
2

La cerise sans le gâteau...

Fort du succès commercial de son Paulette (que je n'ai pas encore vu), le réalisateur Jérôme Enrico revient avec Cerise, l'histoire d'une adolescente à problèmes, en conflit permanent avec sa mère et...

le 7 avr. 2015

11 j'aime

1

007 Spectre
Bewaretheblob
6

Le début de la fin ?

Mise au point : D’abord enthousiasmé par Spectre, j’en avais écrit une critique dithyrambique, louant ses qualités face à ses nombreux détracteurs (et d’ailleurs, un grand merci aux 639 lecteurs...

le 30 oct. 2015

9 j'aime

2