Quand le film est sorti, je me souviens que le pitch m'a interpellé. Pas découragé par mon manque de budget pour le voir au cinéma, je me suis dit que le film finirait bien par être disponible autrement. Quand il est apparu à moi, je me suis dit "ça y est" ; seulement, entre-temps, j'avais complètement oublié le titre. Pas grave, je me lance dans l'aventure.
En lisant maintenant le pitch, je me dis que j'ai bien fait de ne pas le relire. Parce qu'il ne s epasse pas grand chose de tout le film que ce qui est raconté là. En effet, le scénario, ne décolle jamais vraiment. L'auteur présente une situation, une relation dominante-dominée (avec l'idée que la dominante est en réalité dominée par la dominée), dresse un portrait rapide de ses personnages, ... et puis voilà. Les éléments perturbateurs sont rares, on est plus dans une logique de routine. De ce fait, la confrontation tant attendue et espérée entre les deux personnages n'arrivent jamais vraiment. Enfin si, mais cela a lieu beaucoup trop tardivement. Quant à la résolution, il y a de quoi être déçu : l'auteur traite la crise très rapidement puis hop, c'est fini.
C'est dommage parce que j'aime bien le minimalisme. Mais là il ne se passe vraiment rien. Les personnages en deviennent même assez creux tant ils réagissent de manière prévisible tout du long. On dirait plus qu'ils ont une fonction plutôt qu'une vie et des convictions. On comprend assez vite que Cynthia désire une vie sexuelle plus normale, et on attend que le clash arrive ou qu'au moins elle manifeste un peu plus ses envies. Je suis persuadé que ça aurait pu donner lieu à une très bonne scène si l'auteur avait pris la peine d'écrire quelque chose de narratif. Ou alors, il aurait fallu être plus radical dans le côté expérimental.
Je lis qu'il s'agit d'un hommage aux films érotiques des années 70. C'est clair qu'il se dégage une certaine sensualité du film. Et même dans l'histoire, la manière de démarrer l'intrigue, je me suis dit, tiens on dirait un vieux film des années 70 un peu bizarre. Mais de par le procédé narratif, cette construction faite sur répétition sans même se prendre la peine d'érotiser à chaque répétition, il faut bien avouer qu'on finit très vite par bander mou. C'est dommage parce que les actrices sont belles, qu'il y a une déco magnifique (le plus étonnant étant que le papier peint est en fait du papier imprimé par manque de budget) et des costumes merveilleux.
J'avoue n'avoir pas trop saisi la métaphore du papillon et de la chenille, le rapport avec les deux belles demoiselles et leur histoire d'amour. Soit. Cela donne lieu à de belles scènes. Mais là aussi il y a un problème d'écriture. De rythme plus précisément. L'auteur enchaîne ces scènes beaucoup trop vite allant parfois jusqu'à en mettre deux d'affilée. En agissant de la sorte, il détruit toute la poésie de ses scènes, on en regarde une, puis une autre puis on revient un peu à l'histoire puis on repart dans un autre tripe. La mise en scène est quasi parfaite, les ambiances très bien travaillées, mais on se lasse de ce petit jeu. C'est un peu comme quand on goûte un morceau de chocolat de telle marque. Puis un autre d'une autre marque sans laisser le temps au premier goût de disparaître. De la sorte, on gâche le goût du second, et même celui du premier puisqu'il en restait encore en bouche. D'ailleurs, je n'exagère pas, l'auteur a parfois du mal à boucler ses scènes surréalistes : elles se terminent trop brutalement.
Le choix musical fonctionne très bien. Les thèmes sont bien élaborés, un peu différents de ce qu'on entend habituellement. Cela permet d'enrichir l'ambiance déjà établie par l'image. Après, je trouve que ce n'est pas toujours cohérent, la faute à certains morceaux trop aprticuliers par rapport à d'autres qui le sont moins.
Bref, "The duke of Burgundy" est un film réussi formellement, mais qui souffre d'un scénario vide, voire paresseux ; en gros, le réalisateur préfère mettre en scène ses tripes plutôt que d'explorer son univers (trop timide?) et exploiter ses personnages. Dommage.
PS : j'avoue aussi qu'une des raisons pour lesquelles ce film m'a toujours interpellé, c'est son titre : en effet, j'ai cru à un moment qu'il s'agissait d'un autre film sur Ron Burgundy tiré du deuxième Anchorman selon le même concept que "The Lost Movie".