Le Dernier bus pour l’enfer (ou comment brûler sa conscience)

« Ce n’est pas le feu qui tue, c’est la conscience de brûler. » – (Nietzsche, probablement, après un barbecue raté)


On croyait avoir tout vu : des bus perdus, des héros carbonisés, des drames en slow motion… Mais The Lost Bus – Au cœur des flammes réussit le tour de force d’allumer un incendie non seulement dans la forêt, mais aussi dans nos pauvres neurones de spectateurs en quête de sens.

Le film, qui raconte l’odyssée d’un chauffeur de bus, Matthew McConaughey et une institutrice, America Ferrera, guidant un bus rempli d'enfants pris au piège d’un feu géant, se présente comme un survival, mais finit surtout comme une allégorie de l’absurde. Sartre aurait adoré : L’Enfer, c’est les autres… coincés dans un bus sans climatisation et sans plan d’évacuation. Chaque minute de combustion devient une méditation existentielle sur la liberté : peut-on vraiment choisir sa sortie quand tout flambe autour ?

Le réalisateur, Paul Greengrass, sans doute élève spirituel de Camus, nous invite à contempler la futilité du courage face au chaos. On attend que le chauffeur s’écrie, stoïque : « Ce qui fait obstacle devient le chemin. ». C’est du stoïcisme brut, façon Marc Auréle sous caféine.

Et que dire de la mise en scène ? Caméra épileptique sur des visages suants, plans parkisonniens sur des flammes dignes d’un powerpoint du Jugement dernier… Une esthétique du désespoir où la nature reprend ses droits, tout en offrant au spectateur le rare privilège de se sentir, lui aussi, en surchauffe émotionnelle.

Le film se veut aussi une critique du capitalisme moderne : le bus symbolise évidemment la société, chacun coincé à sa place, incapable de descendre, pendant que le système – ou la forêt – brûle. Marx aurait applaudi, avant de demander un extincteur.

Mais ne soyons pas trop sévères. Derrière la suie et la sueur, The Lost Bus offre une belle parabole sur notre époque : un monde qui file droit vers le désastre, mais qui trouve encore le moyen de diffuser de la musique pop en fond sonore. C’est tragique, c’est grotesque, c’est profondément humain. Bref, c’est du Kant filmé par un pyromane.

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