Soumise à l’inexorable fuite du temps et aux regards masculins implacables, Elisabeth s’effondre sous le poids d’une beauté marchandisée. Dans The Substance, elle s’abandonne à un fluide malléable, fragile métaphore des artifices modernes — cosmétiques, chirurgies, filtres numériques. Cette matière tangible, promesse éphémère de splendeur éternelle, devient dépendance et poison. Chaque dose la modifie, la fait miroir des diktats sociétaux, où l’illusion de perfection n’est qu’une lente dissociation.

En consommant son propre reflet, elle engendre un double : créature inhumaine, image inversée qui, de rêve de beauté, se mue en allégorie cauchemardesque de body horror, magnifié ici par une palette pop vive. Dans la veine du « corps grotesque » littéraire, Elisabeth incarne la dérive d’un idéal devenu prison, une identité remodelée jusqu’à l’aliénation.

Ainsi asservie à l’image qu’elle a façonnée, Elisabeth devient parasite de son propre monstre, consommée par ses propres aspirations démesurées.

La pop éclatante de The Substance, agit comme un leurre, et dissimule la brutalité d’une norme qui dévore les singularités, marquant une évolution naturelle de la narration visuelle. En filigrane, l’ombre de Cronenberg, (mais pas que) où le sublime et le grotesque s’enlacent en une symphonie de chair et d’effroi.

cadreum
9
Écrit par

Créée

le 31 oct. 2024

Critique lue 155 fois

11 j'aime

cadreum

Écrit par

Critique lue 155 fois

11

D'autres avis sur The Substance

The Substance
Rolex53
9

Elle en pire

Elisabeth Sparkle (Demi Moore) ne fait plus rêver. Son corps se fissure un peu plus chaque jour sur Hollywood Boulevard. Une étoile sur le Walk of Fame qui ressemble désormais aux scènes fanées d'un...

le 10 oct. 2024

150 j'aime

8

The Substance
Sergent_Pepper
6

Substance (without subtext)

Idée maline que d’avoir sélectionné The Substance en compétition à Cannes : on ne pouvait rêver plus bel écrin pour ce film, écrit et réalisé pour l’impact qui aura sur les spectateurs, et la manière...

le 6 nov. 2024

74 j'aime

6

The Substance
Behind_the_Mask
3

Le voeu de la vieille

The Substance vient tristement confirmer qu'entre Coralie Fargeat et le masqué, ce ne sera jamais une grande histoire d'amour.Car il a retrouvé dans son nouveau film toutes les tares affectant son...

le 8 nov. 2024

57 j'aime

14

Du même critique

Diamant brut
cadreum
8

Quoi qu'il m'en coûtera

Dans une poursuite effrénée d'un rêve, le film dévoile l'absence de conscientisation de ses actes. Pourtant, Liane, bluffante d’intensité, n’est jamais jugée ni dénigrée, et ce portrait sincère ne...

le 3 oct. 2024

13 j'aime

1

La Plus Précieuse des Marchandises
cadreum
9

Des ombres qui brillent

Grumberg choisit la fable et Hazanavicius l'animation pour aborder la dés.humanisation, et ainsi transcender les limites de sa représentation. La simplicité apparente de la forme, qu’il s’agisse de...

le 1 oct. 2024

13 j'aime

1

Wicked
cadreum
7

Réinvention imparfaitement sublime de Oz

Dans l’écrin chromatique du pays d’Oz, Wicked déploie un tableau où le familier et la ré-inventivité se répondent. Les palais scintillent d’émeraude, les prairies s'étendent, et les costumes...

le 1 déc. 2024

12 j'aime