Derrière ses airs de petite comédie inoffensive se cache, en réalité, un regard acerbe porté sur la société d’aujourd’hui, en particulier sur le pouvoir d’attraction qu’exerce une infime et pourtant influente portion d’hommes et de femmes friqués dont l’unique passe-temps consiste à exhiber des objets aussitôt portés aussitôt périmés. Dans cette mode du jetable s’effectue un glissement symbolique des accessoires vers les corps qui s’en parent : c’est attester la profonde superficialité de ces êtres interchangeables et coupés de leurs racines. La percée de deux amies issues des banlieues dans ce microcosme fermé sur lui-même offre au film un point de vue qui tend à se doubler à mesure que les relations s’enveniment : le personnage de Lila subit de plein fouet l’aveuglement face à « tout ce qui brille », soit la débauche de luxe dans lequel le sensible n’occupe aucune place. Son processus psychologique s’apparente à une entrée en aliénation et gagne l’écran sans divulguer sa violence intrinsèque : certaines scènes suscitent l’effroi et glacent le sang d’un spectateur surpris de trouver là un tel déchaînement de formules injurieuses, blessantes et dégradantes.
La mise en scène repose sur la répétition d’un cérémonial : de nombreux plans fixes exposent le quotidien de nos protagonistes principaux, marqué par l’architecture des immeubles, les colonnes de boîtes aux lettres, les petits boulots à la caisse d’un cinéma etc. L’univers de la bourgeoisie huppée vient casser cette immobilité au moyen de plans plus dynamiques, et donc plus instables, se jouant de l’animation communautaire des soirées pour mieux isoler les deux intrus. Un autre cérémonial se met alors en place et entretient avec le premier un rapport antithétique : l’adresse à Neuilly, la garde d’un enfant, l’échange de vêtements... Prendre un taxi devient le symbole de cette caste bourgeoise qui se plaît à emprunter un moyen de locomotion impersonnel que l’on peut appeler pour circuler dans la capitale de l’anonyme présence ou, au choix, se débarrasser d’une conquête embarrassante. Portrait au vitriol de cette frange bourgeoise de la population dont la pseudo-réussite ne tient, en fin de compte, qu’à la convergence entre leurs apparats terriblement creux et le matérialisme triomphant de nos sociétés contemporaines, Tout ce qui Brille n’oublie pas de bâtir, en réaction à cette démarche polémique, un beau récit d’amitié entre deux femmes que vient compléter la délicieuse Audrey Lamy en coach sportif, LA trouvaille du film. Une comédie à la fois fort drôle et sans concessions sur le milieu qu’il investit.