Yves Montand joue un réalisateur qui est chômage depuis Mai 68, qui ne met en scène que des publicités. Sa femme, jouée par Jane Fonda, est une correspondante américaine d'une radio française, et elle veut l'emmener dans la réalité du terrain, en l'occurrence suivre une grève dans une usine de charcuterie.


A cette époque, Jean-Luc Godard réalisait ses films en binôme avec Jean-Pierre au sein du collectif Dziga Vertov, un groupe situé à gauche qui faisait surtout de l'expérimental, et rien ne sortait en salles. Tout va bien est l'occasion, par l'intermédiaire du producteur Jean-Pierre Rassam, de revenir dans un cinéma plus traditionnel, tout en restant dans cette mouvance politique, avec l'emploi de deux grosses vedettes, qui tournent eux surtout pour le prestige Godard en ne se rendant pas vraiment compte que le réalisateur va se moquer de leurs engagements, en particulier Jane Fonda sur la guerre au Vietnam. On voit aussi que c'est un portrait désabusé de la gauche en 1972, qui a l'air moribonde, d'où l'utilisation ironique du titre, et une chanson finale de Stone et Charden qui sonne vraiment comme une conclusion en soi.

Pour être franc, je n'ai pas tout compris politiquement parlant, mais au niveau du cinéma, il y a quand même des moments passionnants, comme ce long travelling le long des caisses d'un supermarché, occasion de critiquer la société de consommation, mais aussi et surtout un sublime plan de coupe où on voit toutes les pièces de cette charcuterie, comme si on était dans une maison de poupée, avec la plupart des personnages du film.


Le film a été tourné dans des conditions difficiles, en particulier pour Godard qui souffrait encore des séquelles de son grave accident de moto survenu quelques mois plus tôt, Yves Montand qui ne supportait pas d'être rabaissé par le même, ou alors Jean-Pierre Gorin qui ne pouvait pas tourner une scène du duo principal, mais il reste un instantané d'une époque, celle d'une gauche qui se cherche encore. Mais tout cela va voler en éclats avec le choc pétrolier l'année suivante. Je dirais que c'est un film difficile, exigeant sur le forme, d'une grande beauté formelle, du Godard pur jus.

Boubakar
6
Écrit par

Créée

le 4 août 2023

Critique lue 22 fois

2 j'aime

Boubakar

Écrit par

Critique lue 22 fois

2

D'autres avis sur Tout va bien

Tout va bien
Jean-Mariage
9

Entre rage et désespoir !

À partir de 1968 Godard va s'employer avec persévérance à détruire son statut de vedette et va disparaître dans le groupe Dziga Vertov, ne réalisant plus que des films militants qui ne sortiront pas...

le 17 juin 2019

6 j'aime

Tout va bien
Johannes_Roger
8

Critique de Tout va bien par Johannes Roger

S’il y a un film de Jean Luc Godard à redécouvrir c’est bien celui là. Tourné quelques années après les évènements de mai 68, Godard et son complice Jean Pierre Gorin capte, souvent avec humour, le...

le 17 avr. 2017

6 j'aime

Tout va bien
JJC
9

Critique de Tout va bien par JJC

Un film de Godard ? Oui, effectivement. Qui a dit « incompréhensible » ? Ou encore « inaccessible » ou « trop cérébral » ? Peu importe les a priori de certains, limitons-nous tout simplement à...

Par

le 28 mars 2012

5 j'aime

Du même critique

Total recall
Boubakar
7

Arnold Strong.

Longtemps attendues, les mémoires de Arnold Schwarzenegger laissent au bout du compte un sentiment mitigé. Sa vie nous est narrée, de son enfance dans un village modeste en Autriche, en passant par...

le 11 nov. 2012

44 j'aime

3

Massacre à la tronçonneuse
Boubakar
3

On tronçonne tout...

(Près de) cinquante ans après les évènements du premier Massacre à la tronçonneuse, des jeunes influenceurs reviennent dans la petite ville du Texas qui est désormais considérée comme fantôme afin de...

le 18 févr. 2022

42 j'aime

Dragon Ball Z : Battle of Gods
Boubakar
3

God save Goku.

Ce nouveau film est situé après la victoire contre Majin Buu, et peu avant la naissance de Pan (la précision a son importance), et met en scène le dieu de la destruction, Bils (proche de bière, en...

le 15 sept. 2013

42 j'aime

9