« It's time for me to take you home. » WOODY

Toy Story ayant eu un succès phénoménal, Disney envisage le plus naturellement du monde de lui offrir une suite sans trop se poser de questions. Dans l'esprit des dirigeants de l'époque, ce second opus est prévu pour le marché de la vidéo, histoire d'en justifier son existence et d’obtenir une baisse de ses coûts de production.

Le studio Pixar n’est pas contre les suites, mais pense qu'il ne devrait en faire que si elles peuvent aboutir à une histoire aussi bonne que celle du premier épisode. C’est ainsi que John Lasseter, réalisateur du premier Toy Story, convaincu de son grand potentiel commercial décide de lancer la production de Toy Story 2 pour une sortie cinéma. Une décision qui plaît à Disney.

C’est ce qui va semer les graines de la discorde entre les deux studios car pour Disney, cette production ne faisait pas partie du contrat des trois films (cinq depuis la sortie de Toy Story) signé en 1991. Pixar a demandé qu'il soit inclus dans les films prévus par le contrat, mais Disney a refusé. Pixar se voit donc contraint de réaliser Toy Story 2 sans qu’il soit décompté du contrat.

Toy Story 2 prend des airs de pari cinématographique. Contrairement à aujourd'hui où tous les studios d'animation font de la production de suites, à l'époque les suites ne sont pas entrés dans les mœurs.

Si le cinéma d’animation a résisté longtemps à la déferlante des second opus, le marché de la vidéo s'est révélé beaucoup moins farouche à l'idée. D’ailleurs Disney n’hésite pas à proposer des suites, direct-to-video, réalisées à bas coups et recherchant une rentabilité immédiate et facile. Pixar va avoir fort à faire pour faire oublier les suites en direct-to-video de Disney (Aladdin 3, La Belle et la Belle 2, Pocahontas 2 et Le Roi Lion 2 depuis la sortie de Toy Story).

John Lasseter trouve son scénario assez facilement. Alors qu'il reçoit régulièrement dans son bureau la visite de ses enfants émerveillés par toutes les figurines s'y trouvant, John Lasseter s'évertue sans cesse à leur faire prendre conscience du caractère d'objets de collection et non de simples jouets. Ainsi, quand son fils s'empare de son Woody (dédicacé par Tom Hanks), le réalisateur le stop de peur de voir son fils abîmer son jouet. La déception du môme le convint finalement qu'il fait fausse route. Un jouet se meurt en objet de collection, son véritable but est de combler un enfant. Un jouet est-il mieux traité à l'abri dans une vitrine ou aux mains d'un enfant ? Le questionnement est plus ambitieux qu'il n'y parait aux premiers abords : vaut-il mieux vivre sa vie pleinement quitte à la perdre ou chercher à se mettre à l'abri pour viser l'immortalité ?

Une fois le scénario écrit, il ne reste que la réalisation. John Lasseter se retrouve seul à la tête du projet car les équipes de Pixar sont tous en train de travailler sur 1001 Pattes. Concrètement le studio n'a pas les moyens humains de mener plusieurs projets ambitieux, par manque d'animateurs. Pixar est ainsi dans une situation délicate. Si 1001 Pattes bénéficie à fond du talent de ses créateurs, Toy Story 2 se ramasse lamentablement à cause d’une équipe de second couteau. John Lasseter tranche : Toy Story 2 doit être revu de fond en comble tout juste neuf mois avant la sortie du film sur grand écran en 1999. Une fois 1001 Pattes terminé, Pixar rapatrie toutes les équipes sur Toy Story 2 même si ils sont encore éreintés.

C’est ainsi que Woody le cowboy, momentanément mis au placard, est enlevé par un collectionneur avide de la série Western Woody, dont il fait figure de héros en compagnie de Jessie la cowgirl, de Pile-Poil le cheval et de Papi Pépite le chercheur d’or. Woody se rend compte de sa popularité et se voit proposer une place dans un musée. Ses amis traversent toute la ville pour le ramener chez Andy leur propriétaire.

Toy Story 2 s’ouvre sur une magnifique séquence de Buzz l’Eclair réalisant une mission pour Star Command évoluant en réalité dans un jeu vidéo. L'astuce est brillante, elle permet de débuter le récit comme un film d'action tout en introduisant le lore de Buzz et surtout un personnage d'importance : Zurg. Cette ouverture c’est les prémices de la très sympathique série Les aventures de Buzz l’Eclair sortie en 2000.

La présence de Zurg et du deuxième Buzz offre de belles occasions de quiproquos. Elle permet notamment de faire de formidable clin d'œil cinématographique à Star Wars (le film regorge de clin d’œil : Jurassic Park, 1001 Pattes, Indiana Jones, Star Trek, etc…). Alors qu’on pense que Zurg sera l’antagoniste, l’imposture est totale.

La vraie révélation provient des personnages tirés de la série télévisé de Woody. Parmi eux, Jessie qui comme Woody a été le jouet privilégié d'un enfant, mais contrairement à lui, elle a été abandonnée. Elle se dévoile à merveille rendant le personnage humain comme jamais. Il y a aussi Pile-Poil un personnage dénué de parole, mais particulièrement expressif. Présent également, Papi Pépite qui se révèle être, contre toute attente, le véritable antagoniste de l'histoire. Se présentant d'abord comme le gentil papi, il prodigue d'excellents conseils à Woody qui s'avèrent ne poursuivre que le seul but de conforter son projet de finir, bien au chaud, dans un musée. Et peu importe, pour cela, s'il doit forcer la main de Woody et Jessie. Sa condition de méchant trouve toutefois une circonstance atténuante : il a toujours été dans un carton et n'a jamais connu le plaisir d'être la propriété d'un enfant. Enfermé dans sa boite de présentation, il a perdu ce que les autres jouets du film acquièrent instantanément : leur humanité.

La galerie de personnage est d’une richesse incroyable car on oublie pas tous les personnages secondaires du premier opus. L’animation passe encore un cran au dessous et notamment avec l’animation des humains.

Al le collectionneur et Geri le restaurateur de jouet ont bénéficié d’une animation revu à la hausse qu’on pouvait déjà remarqué dans le court-métrage Le Joueur d’échecs qui a reçu l’Oscar du meilleur court-métrage en 1998. D’ailleurs Geri se trouve être le vieux dans Le Joueur d’échecs.

Le bond technique réalisé depuis Toy Story est tel qu'il est tout simplement incroyable. En seulement quatre années, l'animation par ordinateur a considérablement évolué, à commencer par celui des personnages humains dont l'apparence est désormais convaincante.

La bande-son est tout à fait cohérente. Randy Newman fait le minimum syndical. Cette constatation n’est pas très dommageable quand on sait qu’il réutilise les thèmes du premier opus.

Toy Story 2 rapporte 497.000.000$, il explose les recettes du premier Toy Story et il explose aussi les deux Grand Classique Disney sorti la même année : Tarzan et Fantasia 2000.

Toy Story 2 a prouvé au monde entier que Pixar est un grand dans le monde de l'animation, gage d'extrême qualité, inventif, innovant, décomplexé et surtout, profondément respectueux de son public. Toy Story 2 fait partie du cercle très fermé des suites réputées meilleures ou aussi bonne que leurs films de référence ! À la suite de la sortie de Toy Story 2, Pixar et Disney effectuent un gentlemen's agreement grâce auquel Disney accepte de ne faire aucune suite sans la participation de Pixar.