Mis en chantier quelques mois après Un justicier dans la ville (Death Wish), L’uomo della strada fa giustizia reprend l’argument du film de Michael WINNER à savoir la métamorphose lente mais inéluctable d’un citoyen se muant en justicier. Henry SILVA, plutôt habitué aux personnages antipathiques, campe Vanucchi, un père de famille milanais, ingénieur de profession, dont la fillette est assassinée au cours d’un hold-up dans une bijouterie. Dans son dernier souffle, la gamine indique que son assassin porte un tatouage en forme de scorpion. Vanucchi s’en remet d’abord à la Police. L’enquête est confiée à un inspecteur désabusé (Raymond PELLEGRIN). Elle piétine et le père pense de plus en plus à se venger. Son épouse (Luciana PALUZZI), inconsolable, tente de l’en dissuader. Il est approché par un groupe d’auto-défense mais les envoie bouler avant de les recontacter face à l’inertie de la justice et de la Police. La vengeance peut commencer…
Peu s’avèrent meilleurs qu’Umberto LENZI lorsqu’il s’agit de décrire l’Italie des années de plomb, minée par la corruption et la délinquance. Le Milan qu’il dépeint est infesté de truands, de drogués, de prostitués, de travestis (Alberto TARALO), toute une faune parasitaire pour laquelle il ne s’ennuie d’aucune explication sociologique. Les faits sont brutaux et sans concession et la société porte en elle les métastases qui la dévasteront. Piégé par son propre drame et la haine qui l’habite, rongé par un sentiment d’injustice (la bijouterie n’était pas gardée car l’homme de sécurité était détaché pour servir de chauffeur à un notable), ce père s’enfonce peu à peu dans une vengeance implacable, dont la violence n’a rien à envier aux malfrats. La meilleure scène du film, la plus frappante en tout cas, nous montre les adeptes de l’auto-défense, cagoulés façon Ku Klux Klan (mais en noir) mener une expédition punitive chez des petites frappes. Ils les bastonnent allègrement puis leur explosent les mains à grands coups de marteau devant un Henry SILVA impassible et le visage non dissimulé.
Dans les films de vigilante américains demeure finalement une moralité assez manichéenne, évidemment chez les italiens, il n’en est rien. Dans une dernière pirouette, l’inspecteur couvre la vengeance de ce père dévasté et indique qu’en fait, Vanucchi n’a pas éliminé les assassins de sa famille mais d’autres salopards, clouant le bec de notre satisfaction primaire de spectateurs en plein transfert sur cet homme.
Même si nous avons connu polar italien plus pétaradant, l’action ne faiblit pas et les 90 minutes réglementaires passent comme une fleur, agrémentées par une photo impeccable, une musique ad hoc de Bruno NICOLAI et une ribambelle de ganaches hautement appréciées (le toujours flippant Luciano CATENACCI, Claudio GORA, Ray PELLEGRIN,…).
Décidément l’Umberto LENZI des années 70 s’avère réellement un très bon réalisateur. J’estime d’ailleurs qu’il ne fut jamais aussi à l’aise que dans le polar.

Didier_Lefevre
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le 25 févr. 2020

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