Un prophète par Capii

Je crois que j’apprécie de plus en plus ce cinéma du réel, cette chronique sociale, qui s’infiltre partout, qui filme les existences sans fards avec la brutalité du présent.

On passe ici des murs de béton froid, à l’effusion de sang : c’est le festival de la brutalité carcérale. Je trouve que l’immersion est forte, caméra portative, on s’identifie facilement à prophète, tout est fait pour. Visiblement étranger à ce milieux, entouré de bourreaux et de caïd, il se détache, il est à part, avant de se plier peu à peu malgré lui, aux à la loi de la survie, aux règles de la prison. Alors qu’il devient un protégé, et pense devenir maitre de la situation celle-ci ne fait que l’enchainer d’avantage. Poursuivie par ses fantômes, traqué par des mafieux, il se démène et entrevoie la lumière de l’extérieure enfin, aux prix du sang, au prix de la vie.

C’est un film lucide sur une prison qui broie et, parfois, transforme de petits voyous en grands criminels. Mais c’est aussi un lieu où l’apprentissage existe encore, où la lecture et la maîtrise du verbe sont des armes pour s’imposer. Connaître une autre langue, une autre culture : autant de clés qui permettront à prophète de tirer parti des situations. Prophète ressemble à tout le monde mais n’appartient à personne, il se tient comme une passerelle entre les communautés.

Un Prophète touche par sa justesse, il émeut par l’entrelacs constant du bien et du mal, de la brutalité et de la tendresse, du sang et des mains tendues. Violence et paix s’y répondent et se toisent, formant ensemble l’univers clos et paradoxal de la prison en miroir de la société.