Cette enivrante mélodie qui vous bouffe de l’intérieur... mais tout en douceur.
Après un insupportable jeu de séduction dans le premier film de Joseph Gordon- Levitt, avant de devenir la nouvelle héroïne de Luc Besson et avant de nous offrir sa plastique de rêve dans la combinaison moulante de Black Widow, Scarlett Johansson prend un risque. Elle déforme sa silhouette, se teint les cheveux et se glisse dans la peau d’une alien mangeuse d’hommes.
Difficile de résumer l’histoire de ce long métrage britannique. Une extraterrestre arrive sur Terre pour se repaître d’hommes. Dans ce film au rythme lent, le réalisateur utilise les plans fixes comme pour nous inciter à suivre l’odyssée de cette mante religieuse intergalactique, à partager son parcours à travers les rues, les plages ou les campagnes écossaises, dans sa fourgonnette peu accueillante. Il faut retenir deux choses d’Under the Skin : sa mise en scène glaçante qui plonge le spectateur dans une sorte de malaise inconscient, dans lequel il ne sait pas vraiment ce à quoi il a affaire, mais reste fasciné devant la beauté de certains plans (les scènes de mise à mort notamment, qui sont d’une beauté visuelle spectaculaire) ; et sa bande-son, tour à tour envoûtante et inquiétante, où le thème redondant épouse les battements de cœur des hommes troublés par la beauté simple, froide et enivrante de l’actrice hollywoodienne. Le film, à la limite du cinéma expérimental, est une fable sur le pouvoir de séduction, mais aussi sur l’innocence et la volonté d’appartenir au monde qui nous entoure. Oui, le monstre n’en est pas (totalement) un, puisqu’elle épargne ce John Merrick des temps modernes. Mais cette fable sur l’innocence est mise à mal car le réalisateur nous prouve que notre monde est cruel et que l’innocence est ébranlée. En effet, la femme fatale Johansson tue l’homme de la plage, laissant ainsi un enfant (innocence) à la merci d’une nature déchaînée. La femme fatale Johansson épargne l’homme déformé par la maladie (innocence) mais celui-ci sera tué par l’homme à la moto, protecteur et/ou commanditaire des agissements macabres de l’alien. Enfin, la femme fatale Johansson, après avoir découvert sa véritable nature (innocence), connaîtra un brûlant et funeste destin. La prestation de Scarlett Johansson est, d’une façon certaine, la troisième chose à retenir de cet ovni cinématographique. L’actrice offre à la caméra son corps nu et déformé dès les premières minutes, et joue la naïveté autant lorsqu’elle souhaite séduire, tuer, manger, que lorsqu’elle découvre qu’elle n’est pas de ce monde. Il n’y a pas de retenue dans ce jeu de l’innocente séduction. Pas de prise de risque réel de la part de l’actrice si l’on fait abstraction de sa métamorphose physique. Mais n’est-ce pas là ce qui fait la force énigmatique de son personnage ?
On peut reprocher la lenteur du récit. On peut reprocher le manque d’empathie envers certaines victimes (on ne ressent ni tristesse, ni satisfaction dans leur mise à mort). On peut reprocher le flou scénaristique et le caractère creux de certains dialogues. On pourrait reprocher un grand nombre de choses à Under the Skin, mais une chose est sûre, c’est qu’en quittant la salle, on ressort avec une drôle d’impression, ni négative ni positive, un sentiment étrange qui s’amplifie lorsque l’on repense à la salle noire et au liquide visqueux qui plonge ces hommes dans un nirvana obscur et mortel, teinté d’un bleu envoûtant. On peut lui reprocher bien des choses, oui, mais cette particularité visuelle restera gravée quelque part en vous... quelque part sous votre peau.