Palme d'or du festival de Cannes 2018, ce film mérite très certainement cette récompense pour sa réalisation particulièrement soignée, ses images d'un Japon inhabituel et suburbain et son excellente interprétation. A côté de cela, j'ai trouvé le rythme un peu lent : il ne passe pas forcément toujours grand chose dans cette chronique douce-amère d'une famille, ou plutôt d'une communauté, quelque peu décalée.


Même si le film interroge - et c'était sans doute le propos du réalisateur - sur la notion de famille, je passerai assez vite sur ce côté là des choses. En gros, la question posée se rapporte aux poids respectifs, dans la vie, des liens du sang et des liens sociaux. Sur un sujet aussi sensible, que dis-je controversé, "Une affaire de famille" évite tout de même l'écueil de tomber dans le gros mélo bien larmoyant. Si le réalisateur prend parti, il le fait en finesse, par petites touches, sur des situations quotidiennes tout ce qu'il y a de plus banales. La contrepartie, déjà évoquée ci-dessus, en étant un manque de rythme, que je n'irai toutefois pas jusqu'à assimiler à des longueurs, même si le film dure deux heures. Il y a de la nuance dans cette affaire, qui est distillée avec virtuosité dans le moindre des dialogues. Et encore, le spectateur français que je suis fut bien incapable de saisir les nuances linguistiques de la langue nippone.


Mais un autre côté intéressant réside dans cette volonté affirmée, assumée de vivre en marge de la société, disons le de façon simplificatrice, de consommation. Isolement revendiqué, en milieu urbain surpeuplé et non pas sylvestre comme dans "Leave no trace". Mais on retrouve ici le même bonheur simple d'un groupe de personnes qui ont décidé de vivre en ermites, ou pour mieux dire en vase clos. Composant une micro société, cherchant en permanence à se ménager une place dans le vaste monde, mais dont les valeurs apparaissent finalement moins détestables et plus humaines que celles, justement, du vaste monde. Car bien que vivant littéralement les uns sur les autres, nos six personnages non seulement se supportent, mais en plus s'aiment. Leur isolement n'est pas solitude, bien au contraire.


Et il en ressort finalement peut-être que la question véritablement posée par ce film porte plutôt sur la tolérance que peut avoir notre société vis à vis de ces initiatives de vie totalement à la marge de ses normes et de ses usages.

Marcus31
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le 14 déc. 2018

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Marcus31

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