le 30 sept. 2025
La bataille à chier
Un film qui donne finalement plus envie de passer son permis que de faire la révolution, il fallait y penser, Paul Thomas Anderson l'a fait. Précédé d'une immense attente, nourrie à la fois par le...
Application SensCritique : Une semaine après sa sortie, on fait le point ici.
Toujours compliqué de parler de film qui brasse tellement de thèmes en les mélangeant, parlant de l'un, de l'autre, sans jamais perdre son fil rouge. Le film d'un cinéaste qui a déjà fait son film somme avec There Will be blood, c'est compliqué aussi.
La première chose peut-être qu'il est important de dire, quand bien même ça saute aux yeux, c'est le rythme. Quand PTA a sorti Licorice Pizza, j'avais eu le sentiment d'un film qui revient à la base, un récit scandé des petites histoires de son personnage principale sous couvert de coming of age décalé. Je trouvais que ça donnait presque un côté "premier film".
Plein de légères péripéties, toutes portées par l'énergie de ces jeunes acteurs (avec déjà une idée de transmission en prenant le fils de Philip Seymour Hoffman). Et ces chapitres permettaient une variété de décors, de situations et de mise en scène auxquelles PTA s'adapte à chaque fois.
Ici, c'est quasiment l'inverse, le film se veut comme une seule et même ligne rythmique qui ne s'arrête qu'au générique de fin. Il prend tout son savoir-faire, de sa passion pour les films choraux, les sagas à échelle humaine, les personnages isolés, écrasés par quelques chose qui les dépasse. Ces quelques chose étant souvent un élément personnel. La célébrité dans le X, l'appel de l'industrie du pétrole, ou même son propre génie du textile.
En mélangeant tout ça, on a Bob, par DiCaprio, qui lie toutes les péripéties. Mais la caméra va se permettre des détours par des personnages tous différents puis revenir à lui dans une fluidité dingue.
Dans Boogie Night, qui possède aussi ce rythme effréné, on y voit tout de même une rupture de rythme net. Elle s'adapte simplement au rise and fall de son personnage principal. Le rêve puis la désillusion. Ceux qui ont vu le film voient de quoi je parle. Ici, la baisse de vitesse, que j'ai ressenti vers l'église pour ne pas spoiler, arrive progressivement. Je m'en suis rendu compte, ça ne s'est pas présenté. Et ce jusqu'à une course poursuite finale qui reste spectaculaire, mais donne une sensation plus réfléchie que précédemment, moins chaotique.
Bref, c'est un modèle de rythme. J'en place une pour la musique qui joue presque le jeu inverse d'un Oppenheimer, avec lequel je trouve une similitude de mouvement incessant, montré par une musique poussé par des cordes qui ne font que monter en puissance. Ici, on privilégie du piano et de la guitare sèche, avec des notes isolés, détestables. Ça agit presque comme un métronome qui s'adapte aux scènes.
J'ai évoqué la richesse des thématiques, allons-y. Car au travers d'une fresque politique sur le fascisme, et un regard sur la transmission, il traverse beaucoup de thèmes qui y sont liés en étant souvent assez précis. L'écart générationnel, la projection et la perte de soi dans sa passion (ici son combat), une mise en garde contre l'autoritarisme, l'Amérique qu'on ne voit pas, etc.
J'aime assez par exemple l'idée que ces hommes qui se croient et se disent supérieurs, finissent toujours par s'entre-tuer pour des différences de points de vue, même quand l'idéologie est la même. Le personnage du colonel dans le film est bien sûr un raciste au même titre que le club privé qu'il veut adhérer. Mais sa vision des femmes noires est celle d'un homme puissant qui cherche la femme sauvage, ce n'est pas celui des autres membres qui trouve ça sale. L'idéologie est la même, pas le point de vue. Ce qui les rend encore plus ridicules. À l'image récemment d'un Trump et d'un Musk par exemple.
Le personnage de la mère également est un bon exemple de la subtilité. On échappe aàla manière classique de vouloir apporter de la nuance chez les révolutionnaires. Plus que vouloir dire "c'est une bonne révolutionnaire, mais une mauvaise mère", on nous montre bien que c'est avant tout une personne qui a trouvé du sens à sa vie dans son combat. Donc oui, voir un enfant prendre plus de place dans sa vie n'était pas prévu et elle ne va pas le supporter. Elle va d'ailleurs commettre un acte impardonnable. Ce qui montre une humaine, complexe.
PTA passe donc d'un point de vue à l'autre, prends la longueur de son film comme un moyen de parler de beaucoup de chose en prenant sont temps, mais en les faisant évoluer en même temps. On parle un peu des communautés mexicaines qui sont opprimées, mais qui sont soudés, puis à un homme qui se rend compte qu'il a vieilli et un peu trop sombré dans l'alcool et la défonce, à une gamine qui dévoile qu'elle n'a pas toujours respecté le protocole de son père. Le plus fascinant est bien comment il lie tout ça visuellement. Un peu avant le milieu du film, DiCaprio et sa fille sont séparées et on va passer un moment avec sa fille, un long moment avec Bob et les personnages qu'il va croiser, puis revenir à elle. On va suivre tout ça dans une seule et même nuit qui tombe progressivement. Y compris au sein des scènes, il ne perd pas le point de vue. Le personnage de Benicio Del Toro sait parfaitement ce qu'il fait, mais on veut garder un sentiment de chaos, l'élément narratif est Dicaprio qui veut charger son téléphone et qui essaye à chaque pose. La fin de la scène étant quand il peut le brancher évidemment.
Ça serait dommage de ne pas souligner l'audace de faire un film populaire où les méchants sont les flics, symbole de l'ordre des US. Le tout dans une période qui ressemble à la nôtre, mais n'est jamais vraiment précisé. Une manière de dire que ce n'est pas un film de SF, qu'il commente le présent tout en soulignant un désir autoritariste qui sommeil depuis un moment. PTA a déclaré qu'il a mis 20 à faire le film.
Et bien sûr, en parlant de transmission entre un père et sa fille, on parle aussi de la transmission de la révolution et du désir de liberté qui ne mourra jamais. On finit donc par sortir de la salle, non pas déprimé, mais avec une envie féroce de mettre fin à ce fichu capitalisme.
Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2025
Créée
le 17 nov. 2025
Critique lue 5 fois
le 30 sept. 2025
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