Un nouvel anti-héros du cinéma : le bienfaiteur des oubliés disparus

Comment se rend t'on compte qu'on vient de voir un grand film?
Tout simplement quand on met plus de deux heures à s'en remettre et qu'on sort de cette découverte hagard, perdu, bouleversé.


Ce qui vient d'être mon cas.


Ça faisait un petit moment que je voulais voir ce film, pure découverte suggérée par Sens Critique, qui doit savoir mon goût démesuré pour les œuvres à anti-héros.


Pourtant le thème de ce film, omniprésent du début à la fin, non seulement ne met naturellement pas à l'aise mais en plus aurait très bien pu me heurter personnellement. La mort, les cimetières, les cercueils, les cendres... On peut dire que je ne suis pas particulièrement cliente des films qui traitent abondamment ces sujets, pouvant réveiller en moi quelques douloureux souvenirs encore trop frais...


Pourtant , au vu de la bande-annonce, j'a su tout de suite que j'allais me précipiter malgré tout le voir à sa sortie. Et Dieu que je n'ai pas regretté!


Ce personnage un peu triste, à la vie désespérément routinière, perfectionniste à l'extrême, n'a que pour seuls liens sociaux ceux qu'il entretient avec...des solitaires décédés dans l'indifférence la plus totale. Pas de paranormal ici, simplement des photographies qu'il collecte chez les disparus et qu'il recueille religieusement dans un grand album photo. Comme une étrange famille d'inconnus qu'il s'est créée.


John May a pour profession singulière de retrouver les familles et amis de personnes décédées pour qu'il y ai au moins quelqu'un à leurs funérailles...
Notre anti-héros consacre depuis 22 ans sa vie à réunir des indices chez les solitaires décédés pour apprendre à les connaitre post-mortem et rechercher quiconque aurait pu les connaitre.
Il s'engage affectivement dans ces recherches, au point de rédiger lui même les éloges funèbres, organiser les funérailles selon les goûts des disparus et, au cas où personne ne se déplacerait, se rendre seul à leurs obsèques.


La vie de John May s'articule autour de son travail, si bien qu'il fait lui même partie de ces solitaires sans attaches pour qui il se dévoue tant.


C'est un homme triste, très seul, profondément gentil , une sorte de bienfaiteur des oubliés. Avec sa tenue vestimentaire strict et impeccable, sa dévotion réservée aux autres, sa sensibilité, c'est un personnage assez unique, une sorte de héros invisible. Il me fait étrangement penser à un "ange de la mort".
Il a pour pour mission de donner de vraies funérailles aux gens décédés dans la solitude et il ne vit que pour cela, n'a aucun autre but dans la vie, c'est le but de son existence. Il se retrouve malheureusement souvent a faire seul le deuil des disparus, ce qui est infiniment triste à voir...


Lorsque cet attachant personnage se retrouve à devoir s'occuper de sa dernière "affaire" qui n'est autre que son voisin d'en face,dont il ignorait lui même l'existence, il va faire preuve d'une détermination et d'une dévotion encore plus grande et , lentement, va changer ses petites habitudes et apprendre à penser à lui ...et au monde ,bien vivant, qui l'entoure.


La fin du film est sans aucun doute le plus beau moment, le plus touchant... Un vrai moment de poésie , très triste... Difficile de sortir d'Une Belle Fin sans avoir versé au moins une petite larme, que ce soit à la fin ou avant. Certaines scènes sont très émouvantes...


Le film est très bien réalisé mais se déroule assez lentement. On suit la vie quotidienne de John May, les étapes de son travail, on en vient à apprécier très rapidement ce personnage si seul et si dévoué à son difficile emploi.


Suivre la vie de John May peut être assez déroutante, l'ambiance est forcément lugubre, renforcée par le peu de moments "musicaux" du film.
En effet, il y a beaucoup de scènes silencieuses, sans musique ni dialogues, surtout pendant la première moitié du film. Par exemple, il y a pas mal de scènes où John May se déplace, à pied ou en train, rentre chez lui, entre dans son triste et maladivement ordonné bureau... sans musique .
Ce n'est peut être qu'un détail mais pour moi, habituée aux éternels fonds musicaux, j'avoue que cela m'a un peu perturbée.
Mais c'est bien là le seul point noir que j'ai trouvé à redire sur cette oeuvre singulière.


Si je devais le rapprocher d'un autre, que j'ai également beaucoup appréciée, ce serait de "Monsieur Schmidt" avec Jack Nicholson dans le rôle titre. La vie morne d'un homme solitaire et attachant.
Une scène finale touchante. A la différence que celui d*"Une Belle Fin"* est beaucoup plus émouvante...et c'est rare de pouvoir dire que le traduction française du titre est bien trouvée...

Miss_Moustache
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le 18 avr. 2015

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Miss Moustache

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