« I'm a mean, servant of God. » JACOB FULLER

Un jeune cinéphile érudit est embauché chez Video Archives, une célèbre boutique de location de VHS à Los Angeles. Là-bas, il se perd dans les arcanes du cinéma bis, mais en profite aussi pour cultiver son irrésistible passion pour les productions asiatiques. Ce jeune homme, un certain Quentin Tarantino, finit par vivre dans ce magasin entouré de milliers de films. Avec l’aide de son ami Roger Avary, ils vont écrire deux scripts finalement vendus à deux réalisateurs bien installés dans la profession, True Romance pour Tony Scott et Natural Born Killers pour Oliver Stone. Déçu de ne pouvoir mettre en scène ses deux idées originales, le scénariste élabore un nouveau scénario qu’il entend écrire en solo. La vente de ses deux précédents scénario lui permettent de récolter l’argent nécessaire à la mise en chantier de son projet.

Avec un budget extrêmement serré, Quentin Tarantino s’attèle au tournage de ce qui deviendra Reservoir Dogs. Jusqu’à ce que la célèbre scène de l’oreille coupée ne lui pose problème. L’effet spécial, complètement hors budget, met le jeune réalisateur dans la panade. C’est ainsi que ce dernier fait la rencontre de Robert Kurtzman, un maquilleur et technicien des effets spéciaux. Celui-ci propose un deal à Tarantino : l’effet spécial de l’oreille coupée contre son aide pour mettre sur papier son idée de film de vampires. Tarantino accepte directement. Cette rencontre scellera un fructueux partenariat entre les deux hommes. L’histoire de Kurtzman se concentre sur le combat contre des vampires dans un saloon mexicain. Tarantino décide d’y ajouter une exposition pour étoffer le coeur de son intrigue et mélanger les genres sans transition entre les deux grandes séquences.

En 1994, Quentin Tarantino explose pour de bon tous les compteurs et rafle la mise grâce à l’illustre et iconique Pulp Fiction. Miramax, distributeur et producteur derrière le succès du film, donne désormais carte blanche à sa nouvelle poule aux oeufs d’or. Tarantino se souvient alors de son vieux projet de film de vampires abandonné dans un tiroir, jadis refusé par toutes les sociétés de production. L’envie de réaliser ce projet illustrant la difficulté de son entrée dans le monde du cinéma l’emplit d’une grande joie, d’autant plus que les frères Weinstein lui accordent un budget très confortable.

Les producteurs souhaitent ainsi le voir venir à la réalisation, mais Quentin Tarantino sait qu’il ne peut pas assurer pleinement tous les postes, occupant déjà celui de scénariste et voulant prendre à sa charge l’un des rôles principaux. Plusieurs noms sont dès lors envisagés pour prendre sa relève, mais Quentin Tarantino n’en veut qu’un : Robert Rodriguez.

Quentin Tarantino et Robert Rodriguez ont déjà collaborés ensemble sur Desperado, Robert réservant à son ami Quentin un cameo savoureux dans l’épopée vengeresse du mariachi campé par le caliente Antonio Banderas.

Scénario réécrit et finement peaufiné, Robert Rodriguez et Quentin Tarantino peuvent passer à l’étape suivante et indispensable : la recherche des acteurs et actrices capables d’incarner une brochette de personnages haut en couleurs. Quentin Tarantino se réserve un des rôles principaux, mais il faut trouver le rôle de Seth Gecko, la matière grise des frangins mafieux. Le rôle échoue à un charmant acteur d’une trentaine d’années que Tarantino et Rodriguez ont découvert dans une série médicale très en vogue, George Clooney (le réalisateur est d’autant plus convaincu par le talent de l’acteur qu’il vient de le diriger dans un épisode de Emergency Room). Malicieux, Tarantino se plaît à l’imaginer dans un rôle à total contre-emploi où George Clooney envoie ses victimes à l’hôpital.

Quentin Tarantino se réserve, lui, le rôle de Richie Gecko, son frère. Il faut dire que l’idée d’être devant la caméra pour ce film a germé dans son esprit depuis l’écriture du scénario. Il s'est en effet taillé ce rôle sur-mesure et souhaite donner corps lui-même à son interprétation.

Pour Jacob Fuller, le pasteur ébranlé dans sa foi, la production n’hésite pas un instant à sortir un nom de son chapeau magique : l’illustre Harvey Keitel. Ce choix obligera George Clooney à muscler son jeu pour assurer son statut de mâle alpha face au charisme naturel de son prestigieux partenaire. Il sera épaulé par Juliette Lewis et Ernest Liu jouant ses enfants.

Ambiance mexicaine oblige, Robert Rodriguez fait appel à ses fidèles camarades de l’autre côté de la frontière. Le cousin éloigné du réalisateur, Danny Trejo, incarnera ainsi un employé du Titty Twister à l’identité suspecte, tandis que Cheech Marin campera à lui seul trois personnages. Monument du cinéma de genre, Tom Savini rejoint la distribution du film à la demande de Rodriguez, sans aucun doute fervent amateur de son travail. Fred Williamson, figure de proue de la blaxploitation, incarne un vétéran du Vietnam. Mais le rôle secondaire le plus impactant est celui de Satanico Pandemonium écrit pour Salma Hayek, à un détail près. Le personnage, qui doit son nom au film Satanico Pandemonium de Gilberto Martinez Solares, doit danser avec un serpent. L’actrice se désiste dans un premier temps, effrayée à l’idée de devoir tourner avec un reptile. Le réalisateur parvient à la piquer dans son orgueil en lui révélant que Madonna est en passe de reprendre le rôle. L’actrice américano-mexicaine se ravise. Elle passera les deux prochains mois chez un psychologue afin de vaincre sa phobie.

From Dusk till Dawn sort dans nos salles de cinéma en 1996.

La bande son est composé par Graeme Revell. Si il faut reconnaître la présence de son nom au générique, sa musique, elle, parait inexistante ne laissant aucune marque au spectateur lors du visionnage. Fort heureusement, Robert Rodriguez, aidé de Quentin Tarantino, a choisi pour rythmer son film de l'agrémenter de bons morceaux de Texas Blues, Rock et Latino histoire d'accompagner toutes les séquences. Ainsi, chaque scène tire profit d’un choix de bande-son travaillée au cordeau, mettant en valeur l’histoire et l’ambiance générale là où la partition de Graeme Revell fait désespérément choux blanc.

Si on se souvient encore aujourd'hui du film, c'est notamment pour la scène de danse de Salma Hayek. Alors que les protagonistes principaux sont dans la bar, Salma Hayek se présente soudain sur la piste de danse en bikini et avec un python sur les épaules. Les premières notes de guitare du morceau After Dark se font entendre et la voilà qui se lance dans une danse lascive accompagnée de quelques jets de flammes. Une séquence envoûtante qui laisse bouche bée l'audience présente dans le bar et les spectateurs pour deux raisons. Premièrement on atteint un sommet d'érotisme et deuxièmement c’est le point du récit où l’histoire bascule du côté horrifique et fantastique dont j’aimerais en dire que très peu pour laisser la surprise à ceux et celles qui ne l’ont pas encore vu.

From Dusk till Dawn n’obtient pas immédiatement son statut de film culte. Au total, le film va tout de même tripler son budget. C’est son exploitation en vidéo qui lui permet ensuite de devenir culte. Parfait mélange entre deux univers qui étaient faits pour se rencontrer, le film offre le meilleur de ce que peut offrir le duo Quentin Tarantino et Robert Rodriguez. Parodiant à merveille les classiques de séries B dont il ne garde que l'essence, il entraîne les spectateurs dans un univers complètement barré que les cinéphiles ont plaisir à retrouver.

StevenBen
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le 28 août 2023

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Steven Benard

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