La tranche de vie est un peu poisseuse, je vous la laisse ?

Entendons-nous bien: ce film n'est absolument pas une bouse, un étron, ou je ne sais quelle appellation ordurière habituellement employée pour décrire un film qu'on a pas du tout aimé.

Pourtant, je ne l'ai pas du tout aimé.
Ce qui explique que je ne n'ai pas mis de note plus basse tient en ces points simples: très bien écrit, très bien joué, terriblement crédible, rien dans le déroulement de l'histoire ne se faisant à un moment dire "c'est pas possible" ou "c'est n'importe quoi" ou quoi que ce soi de ce style.
Ça sonne terriblement juste. Tout le long.

Et c'est bien là qu'est le problème.
J'ai très exactement éprouvé les même sentiments que quand je regarde un film d'horreur type slasher hyper-réaliste ou une émission de trash réalité de TF1 fin de soirée.

Je m'explique.
On voit ici pendant deux heures ce que l'homme (au sens général, hein ?) peut avoir de petit, laid, sombre, compliqué. Ce qui constitue nos faiblesses. Nos failles. Nos doutes.
Alors oui, tout ceci existe, oui c'est important de connaitre cet aspect des choses, mais je préfère (et c'est un choix assumé, qui explique mon manque d'affection pour ce film) en faire l'expérience par moi-même, dans ce que la vie me propose.
Dans une œuvre d'art, je préfère découvrir ce qui est plutôt de l'ordre de l'élévation, de l'espoir, le truc qui me gonfle d'une manière ou d'une autre la poitrine d'un souffle de joie. Même dans les fictions les plus sombres, le plus souvent je trouve ce filet de lumière.
Rien de tout ça ici. D'où ce sentiment de gène.

Généralement, dans ce que je considère comme un bon film, même les personnages les plus abjects ont leur part d'humanité, révélée au détours d'une scène, d'un regard, d'une phrase, un élément qui explique leur parcours ou leur situation. Ici, c'est exactement le contraire: on aime d'abord chaque personnage spontanément, avant, pour chacun d'entre eux, d'en voir la faiblesse, la petitesse, la réaction qui nous en éloigne, parce qu'on ne les comprend que trop.

"Une séparation" est suffisamment réussi pour avoir provoqué cette réaction. Mais, et j'y reviens, comme le ferait un film de torture malsaine. Comme le ferait une émission qui nous montre à quel point on est parfois.... bas, compliqués. Presque aucun personnage ne donne foi en ce que nous pouvons être.
Les situations sont poisseuses, pénibles, écrasantes. Je ne veux rien dire de la trame du film, réellement prenante, mais juste confier cette impression vive que m'a inspiré la vision de cette œuvre. Et me demander comment on a pu s'enthousiasmer pour elle.

Créée

le 22 nov. 2011

Critique lue 2.4K fois

46 j'aime

38 commentaires

guyness

Écrit par

Critique lue 2.4K fois

46
38

D'autres avis sur Une séparation

Une séparation
Chaiev
7

Humain, trop humain

On sort d'Une Séparation en regrettant presque que tous les films ne soient pas calqués sur le bon vieux modèle hollywoodien : des méchants très méchants qui sont punis à la fin, de pauvres gentils...

le 15 juil. 2011

105 j'aime

54

Une séparation
guyness
5

La tranche de vie est un peu poisseuse, je vous la laisse ?

Entendons-nous bien: ce film n'est absolument pas une bouse, un étron, ou je ne sais quelle appellation ordurière habituellement employée pour décrire un film qu'on a pas du tout aimé. Pourtant, je...

le 22 nov. 2011

46 j'aime

38

Une séparation
takeshi29
9

Tranchant comme une lame

Cette "Séparation" est un miracle, une déflagration cinématographique impossible à expliquer. On vit, on souffre, on se débat auprès de ces personnages cabossés, à la fois si éloignés et si proches...

le 16 sept. 2014

37 j'aime

11

Du même critique

Django Unchained
guyness
8

Quentin, talent finaud

Tarantino est un cinéphile énigmatique. Considéré pour son amour du cinéma bis (ou de genre), le garçon se révèle être, au détours d'interviews dignes de ce nom, un véritable boulimique de tous les...

le 17 janv. 2013

343 j'aime

51

Les 8 Salopards
guyness
9

Classe de neige

Il n'est finalement pas étonnant que Tarantino ait demandé aux salles qui souhaitent diffuser son dernier film en avant-première des conditions que ses détracteurs pourraient considérer comme...

le 31 déc. 2015

314 j'aime

43

Interstellar
guyness
4

Tes désirs sont désordres

Christopher navigue un peu seul, loin au-dessus d’une marée basse qui, en se retirant, laisse la grise grève exposer les carcasses de vieux crabes comme Michael Bay ou les étoiles de mers mortes de...

le 12 nov. 2014

296 j'aime

141