Des choses gentilles à dire sur ce film :

Gros gros point fort du film, le son du début, une espèce de dialecte robotique, salmigondis de paroles à l’envers ressemblant à s’y méprendre aux sons émis par les droïdes sondes de Star wars (mais 8 ans avant L’empire contre-attaque !) et qu’on va entendre très régulièrement tout du long pour ponctuer des moments officiellement estampillés étranges par Jesús Franco, le réalisateur aux mille talents.

Déjà là, j’étais tout spasme dehors à me bidonner. Stordinaire.

Mais les qualités de Vampyros Lesbos ne s’arrêtent pas là, que nenni. J’ai particulièrement apprécié :

  • un bon petit paquet de regards caméra, plus ou moins appuyés, notamment d’Omar (Andrea Montchal), le compagnon de Linda (je commence une collection de GIF sur le thème) ;
  • le cadrage approximatif mais pour autant très étudié, qu’on pourra plutôt qualifier de cadres hors du commun, qui se veulent en décalage mais on sait jamais bien en décalage par rapport à quoi ;
  • et pour faire la paire, pas mal de mise en scène énigmatique à base de déplacements très lents, de regards fixes et tout le bordel ;
  • les changements d’atmosphères, aussi réguliers que brutaux, en témoigne la scène de rencontre entre la comtesse (Soledad Miranda) et Linda (Ewa Strömberg), venu en Turquie pour régler une succession au profit de la dite comtesse, qui commence directement par « Allons nager avant de parler affaire » et se poursuit par un bain de mer suivi d’un bain de soleil à poil sur la plage ;
  • les extrêmes gros-plans de regards mal cadrés ;
  • du zoom, du zoom et encore du zoom très brefs sur un point lumineux. Ou centrés sur des cris perçants (un zoom de cri qu’on appelle ça dans le jargon, vous verrez c’est formidable) ;
  • de la couleur en veux-tu en voilà : du jaune (beaucoup de jaune), du vert et du rouge (beaucoup aussi) en grands aplats typique de l’époque ;
  • de la mise au point floue pour faire bonne figure avec le reste.

Plusieurs scènes sortent du lot dont l’attaque fabucroyablement drôle du docteur Seward par Morpho dans les escaliers (meilleure scène du film) ou la mort par harakiri de Morpho… avec un clou !

Quoi d’autre ? Eh bien la musique, enchantement dans son jus de passages à l’orgue qui trémolote en passant par les petits whoua whoua joués au sitar.

L’histoire on s’en fout un peu d’autant que des pans entiers ont vraisemblablement été coupés (ou jamais filmés), ce qui rend parfois incompréhensible l’intrigue, mais à la mérite d’obliger à un travail d’imagination salutaire.

Et avec tout ça pas plus de 20 ingrédients au bingo des clichés de films ?!

Bé oui. C’est qu’il ne se passe pas grand-chose grand-chose entre les scènes de spectacle de cabaret mettant en valeur des corps féminins dénudés à grand renfort d’érotisme trouble et intense suscitant plus de sourire qu’autre chose. Et qui plus est, sutout quand ce pas grand-chose ne brille pas par son dynamisme.

Mais ce qui m’a frappé a posteriori avec ce film, malgré toutes ces qualités nanardeuses, c’est bizarrement sa forte personnalité, sa maîtrise improbable : je ne me suis pas ennuyé une seconde et au final, sans que je sache bien comment ni pourquoi, le film se tient bien tout seul comme un grand, et s’extrait du nanar pour devenir un mutant cinématographique, par une sorcellerie tout droit sortie des enfers.

Comme dit l’adage : « Méfions-nous des comtesses d’Anatolie ! ».

Jouez au bingo des clichés avec ce film (18 ingrédients)

https://www.incredulosvultus.top/vamyros-lesbos

Personnage > Agissement

Avait pourtant été prévenu·e de ne pas faire ça

Personnage > Caractéristique

Loose | S’évanouit exagérément

Personnage > Citation

Questionne | « Y’a quelqu’un ? »

Réalisation

Escalier en colimaçon filmé en plongée - Fin | Image figée - Fin | Le mot FIN apparaît en toutes lettres à l’écran - Grammaire | Passage musical - Grammaire | Sauts de peur et hurleurs

Réalisation > Accessoire et compagnie

Tension | Gros plan sur les aiguilles d’une horloge qui avancent

Scénario > Dialogue

Gémissements, geignements ou cris répétés

Scénario > Ficelle scénaristique

C’était juste un rêve... - Cauchemar | Se réveille en hurlant/en sueur/en sursaut - Empoisonné·e - hey hey heeeeey !

Thème > N’importe quoi

Accessoire | Garde son caleçon ou sa culotte pour baiser - Non-suspension d’incrédulité | Personnage ou objet qui arrive dans le cadre sans jamais avoir été vu ou entendu avant

Thème > Sexisme hostile à l’égard des femmes

Objectification sexuelle | Nichons, fesses - Objectification sexuelle | Tenues légères - Violence sexuelle | Syndrome de la femme secouée pour qu’elle reprenne ses esprits

---

  • Barème de notation :
  • 1. À gerber
  • 2. Déplaisir extrême et très limite sur les idées véhiculées
  • 3. On s'est fait grave chier
  • 4. On s'est fait chier mais quelques petits trucs sympas par-ci par-là
  • 5. Bof, bof ; pas la honte mais je ne le reverrais jamais ; y'a des bons trucs mais ça ne suffit pas
  • 6. J'ai aimé des trucs mais ça reste inégal ; je pourrais le revoir en me forçant un peu
  • 7. J'ai passé un bon moment ; je peux le revoir sans problème
  • 8. J'ai beaucoup aimé ; je peux le revoir sans problème
  • 9. Gros gros plaisir de ciné
  • 10. Je ne m'en lasserais jamais
IncredulosVultus
8

Créée

le 14 janv. 2023

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