Est-il nécessaire de rappeler l'historique de pixar et son parcours quasiment parfait dans le cinéma d'animation ? Je ne vais pas aller par 4 chemins, Vice Versa poursuit cette route du "sentier de la gloire." ( Même si Toy story reste mon numéro un ! )
Pete Docter réalisateur de Là-Haut et du merveilleux Monstres et Cie se retrouve encore une fois derrière la réalisation d'un Pixar, qui est sans contestation son meilleur film.
- Points positifs : Ce qui frappe dès le début dans ce film c'est le concept même des émotions dîtes " vivantes", l'introduction nous explique parfaitement le rôle de chacun des personnages, l'affinité se crée directement entre eux et le spectateur. Riley fille de 11 ans va devoir gérer ses émotions quant à ce qu'il attend, " un déménagement à San Francisco. L'hypersensibilité de cette préadolescente va se faire grandement ressentir, et ce sera à Joie, Tristesse, Peur , Dégoût et Colère de trouver l'harmonie parfaite correspondant à la situation. Ce qui est génial dans ces 5 personnages, c'est leur spontanéité. Nous savons qui ils sont, ce qu'ils représentent, ils n'ont rien à cacher, et cela créer un rythme très agréable. Ils sont assez hilarants grâce à cette absence de bon sens qui se créée lorsque Joie n'est pas présente. Tout est misé sur le comique de situation qui marche très bien . Dégout Peur et colère forment un trio d'enfer. Joie nous faire sourire pour son entrain, sa bonne humeur. Tristesse nous attendrit, et nous ne désirons qu'une seule chose...la prendre dans nos bras et manger un pot d'1 kilo de glace haagen daz à ses côtés en lui disant que la vie n'est pas aussi triste qu'elle ne le prétend.
Au passage la vf est sublime ! La notoriété de certains acteurs français a sans doute suscité l'attention pour qu'ils fassent le doublage, mais cela n'est absolument pas un problème puisque les acteurs prennent à cœur le rôle de leur personnage.
J'en oubliais l'animation qui reste parfaite. J'avoue avoir eu un peu de mal avec cette sorte de peluche qui entoure les personnages, et ces "cheveux perlés " et brillants qui attisent parfois un peu trop l'attention.
Le film est court puisqu'il dure 1h30. Mais je n'ai jamais vu une telle maitrise de la mise en scène. Il est impossible d'en demander moins. Pete s'est débarrassé de toutes les scènes qu'il a jugé inutiles et n'a gardé que l'essentiel. Je ne vois pas un seul plan qu'il aurait fallu jeter ! Cette métaphore du passage à l'adolescence est dévoilé avec brio. Il a plusieurs sens de lecture bien évidemment et s'adresse aussi bien aux enfants qu'aux adultes. Même si personnellement je qualifierai le film de "voyage philosophique", qui confronte l'optimisme ( Joie ) au défaitisme ( Tristesse ).
Je ne peux par raconter ce que nous voyons dans la tête de Riley pour ne pas spoiler, mais il y a tout ce qui existe dans notre psychisme, c'est fou ! La notion de sacrifice, d'oubli, est traitée avec une grande noirceur...mais qui est malheureusement vraie, surtout quand l'on grandit. Je suis content d'avoir vu le petit prince avant, car une phrase qui m'a marqué représente vraiment l'humain lors de sa croissance. " Grandir, ce n'est pas tellement ça le problème...le problème c'est d'oublier."
- Points négatifs : Ce qui est dommage c'est que le cas de Riley n'est que partiellement intéressant. Bien évidemment elle est la protagoniste de l'histoire, mais elle n'est pas totalement celle du film ( qui est Joie ). Sachant que l'on suit les 5 émotions de la jeune fille nous pouvons assister, à ce qu'elle même perçoit à travers ses émotions, ce qui pousse beaucoup trop le spectateur à apprécier ces 5 personnages, et à donner cette sensation de contrôle d'autrui qui permet parfois de se dire que nos choix ne sont pas si arbitraires qu'il n'y paraisse. Mais bon c'est un des rares points noirs du film. Je me plaindrai aussi des musiques qui sont trop timides à mon goût, bien que j'ai été sensible à certaines scènes, il aurait fallut une petite musique pianotée pour me faire couler une petite larmichette.
Ce qui scinde le film en deux, c'est l'histoire de Riley qui doit faire face à une aventure difficile en l'absence de joie et de tristesse. Et de l'autre l'ambition de Joie qui ne désire qu'à procurer du bonheur à Riley, mais elle cherche aussi à comprendre la quête existentielle de Tristesse qui dans un premier temps n'est présente pour déprimer Riley. Le problème de l'histoire de Riley c'est qu'elle manque de dramaturgie, on cherche tellement à mettre en avant le concept des émotions que les décisions dans la vie de Riley ne mènent pas à un fort enjeu dramatique. Le coup du déménagement est très bien, ainsi que de la perte de repère face à cette ville qu'elle ne connait pas, mais il aurait fallut s'attarder un peu plus sur elle, j'aime tellement les passages avec ses parents que j'aurai voulu les apprécier autant que les 5 émotions. Après je pense que le problème se justifie du fait que l'histoire ne veuille pas se concentrer uniquement sur cette petite fille, mais sur l'être humain en général, et que l'on nous propose une alternative aux questions que l'on se pose par rapport à nos envies, nos peurs, nos haines etc...
Conclusion : Les émotions permettent de définir qui nous sommes. Le film montre leur individualité pour expliquer leur rôle, mais leur fusion créée une harmonie qui justifie l'existence de chacune d'elles. Même si la peur, la colère, le dégoût ou la tristesse peuvent paraitre comme une faiblesse, elles permettent à la joie qu'il y a en nous de surmonter ces émotions, cette mélancolie, et de nous rendre plus fort. Ce contrôle de la mélancolie est très intéressant. Cette notion même de contrôle l'est. "Nous agissons grâce à nos émotions" elles nous guident, nous font aimer, détester quelque chose, ou quelqu'un.
Ce film est une fable métaphysique remplie de bonne humeur et d'humour. Et même si Vice-Versa développe aux premiers abord l'histoire de Riley, elle en raconte une autre plus personnelle...la nôtre.