Une journaliste new-yorkaise effectue avec son père, rescapé des camps, un voyage en Pologne. Elle l’a longuement préparé afin de retrouver les racines de sa famille juive. Le père, lui, n’a pas vraiment envie de ce retour aux sources de sa tragédie mais accepte quand même de l’accompagner. Sa motivation n’est pas très claire : « la Pologne c’est dangereux » laisse-t-il entendre à plusieurs reprises. En tout cas ce père (très bon Stephen Fry) ne s’apitoie jamais sur son sort alors que c’est le cas de sa fille en pleine crise existentielle d’où ce voyage vers le passé où elle s’immerge jusqu’à lire les mémoires de Rudolf Höss et le journal de Goebbels et, comble de l’indécence, s’injecte sous la peau de l’encre avec un stylet pour y inscrire un numéro à la façon des déportés.

On comprend au fur et à mesure que le poids des non-dits de son père et de sa mère décédée l’ont conduite à son mal-être (prise de poids, boulimie, régime, rupture avec son ami). Le père lui s’est construit une carapace faite de silences et de volonté d’être (Carpe Diem).


Le film se met difficilement en place ; on ne comprend rien à la première scène dans l’aéroport : qui attend qui ? Quelles raisons à ce décalage dans l’arrivée des deux personnages ?

Puis le film avance doucement et met progressivement en place le caractère du père et de la fille avec leur difficulté de communication. Les couleurs du film sont assez ternes pour ne pas dire glauques, c’est la fin de l’hiver, nous sommes en 1991, les lambeaux propres aux pays de l’Est sont encore là – maisons délabrées, usines désaffectées, vétusté des infrastructures, etc. - il y a de la fatigue dans l’air, le ciel est bas. Le film déroule les couleurs de la dépression. Et pourtant c’est un film où très peu d’émotions transparaissent.


Une scène émouvante tout de même lorsque que le père retrouve le manteau de son propre père.

Une scène de comédie aussi : lors de la visite d’Auschwitz ; celle-ci se fait en voiturette électrique (scène assez incongrue il faut dire, et filmée comme telle). La guide dit : « Les survivants ont le privilège d’être conduits en voiturette électrique ». Le père répond : « C’est déjà ça de pris ».


On peut prendre ce film mais il n’y a pas urgence à le faire.


philipperbs
6
Écrit par

Créée

le 16 avr. 2025

Critique lue 27 fois

Philippe Erbs

Écrit par

Critique lue 27 fois

D'autres avis sur Voyage avec mon père

Voyage avec mon père
SeverineGodet
10

Poignant et plein d'humanité

Une partie de la famille de Stephen Fry a été assassinée dans les camps nazis et il a déjà collaboré à de nombreux documentaires sur ce sujet. Le film est donc incarné par des gens qui comme lui ont...

le 2 févr. 2025

4 j'aime

7

Voyage avec mon père
Selenie
7

Critique de Voyage avec mon père par Selenie

Le film sort malheureusement après le succès "A Real Pain" (2025) de et avec Jesse Eisenberg qui est également un périple familial à la recherche d'un passé traumatique dans les camps de la mort...

le 10 avr. 2025

1 j'aime

Voyage avec mon père
Fatpooper
4

Girl

Je l'ai choppé parce qu'il y a Lena Dunham que je trouve sexy mais que je n'avais pas encore vu depuis son gain de poids. Elle est toujours aussi magnifique, peut-être même mieux, car mieux...

le 6 août 2024

1 j'aime

Du même critique

Le Chaos qui vient
philipperbs
6

Big data & gros bêta

Le livre de Peter Turchin exploite d’immenses données historiques (big data) couvrant quelque 10 000 ans d’histoire et des centaines de sociétés afin d'expliquer pourquoi de nombreux États se sont...

le 26 oct. 2025

3 j'aime

Rembrandt
philipperbs
3

Sortie de route

Claire et Yves sont ingénieurs dans le nucléaire. Ils participent à des projets industriels démesurés. Le début du film donne la dimension des ambitions et montre bien la responsabilité des...

le 30 sept. 2025

2 j'aime

L’Intermédiaire
philipperbs
5

Patatras !

Sarah Grant est une scientifique qui découvre des preuves indiquant que les cultures génétiquement modifiées de son employeur pourraient être nuisibles aux consommateurs. Résolue à faire éclater la...

le 27 sept. 2025

2 j'aime

2