Le retour de Wallace et Gromit sur un écran est accompagné d’un délicieux plaisir nostalgique. Alors que Wallace ingurgite dans le traditionnel petit-déjeuner d’ouverture, des tartines barbouillées de confiture, le flâneur cinéphage/phile, amoureux de pâte à modeler se délecte avec une certaine avidité de sa madeleine de Proust, ravi dès les premiers instants de retrouver l'inventivité élégante/la subtilité des scènes animées par Nick Park.
Nous avons tous grandi, un peu mûri peut-être , vieilli certainement avec l’inventeur fou et son compagnon perspicace, (dans une nostalgie peut-être des créations en pâtes à modeler de notre enfance),mais ce retour des héros des studios Artman, partenaires désormais de Netflix était précédé de craintes bien légitimes tant les hommages, recyclages ou réinventions d’anciennes idées sont devenues légion au cinéma, traduisant un manque de créativité flagrant avec à la clé des résultats décevants la plupart du temps.
Pourtant dès les premières images il est palpable que Nick Park a apporté le plus grand soin à cette suite . D’un point de vue purement graphique, le « job » réalisé par le modeleur fou est enthousiasmant, les personnages, décors ont évolué sans être dénaturés, les nouveaux gadgets du quotidien sont novateurs au possible et que dire de Norbot (la meilleure invention de tous les temps de Wallace !"selon Park, nain de jardin robotisé hyperactif censé s’occuper entre autres de la taille des haies et doté par Wallace d’une intelligence autonome, mais évidemment artificielle. C’est évidemment autour de ce robot que va s’articuler le propos du métrage et inévitablement le discours qui le sous-tend.
Rapidement, « La palme de la vengeance » fait montre d’une grande sensibilité, celle-là même qui finalement fait tout le sel de la saga , lorsqu’imperceptiblement le robot hilare (adversaire de taille de Gromit) devient le nouveau jouet préféré de Wallace, reléguant Ostensiblement Gromit au second plan. Plus encore Le gnome barbu va précipiter nos deux héros au cœur même de la thématique du film : l’homme (et son chien) face à l’IA, lorsqu’un pingouin voleur de diamant ( Feathers McGraw mis sous les verrous à la fin d’ « Un drôle de pantalon »), adversaire de taille lui aussi va resurgir 30 ans plus tard, prendre le contrôle de l’entité et l’utiliser à des fins diaboliques.
Nous sommes certes dans la pantalonnade délirante, mais de grande envergure, (le manchot n’est pas sans rappeler Lex-Luthor), la dernière partie sera évidemment plus aventureuse, mais également plus convenue paraissant parfois paresseuse dans son développement en miroir du court-métrage de 1993, donc cet opus est la suite directe. Paresse qui ne sera cependant, pas de nature à gâcher totalement le plaisir d’avoir retrouvé pour un temps des jouets en pâte à modeler devenus avec le temps (et le travail au long cours de 200 artisans) plus modernes, plus luisants, mais toujours aussi attachants.