White God, c'est avant tout un exercice de style.
Ainsi, même si le principe de base semble tiré par les cheveux et même risible, c'est un traitement intelligent qui va donner toute sa légitimité à l'idée.
Je dois admettre avoir très vite été intriguée par ce film. Pour reprendre Ragnarök, "Son pitch nanardesque et sa bande-annonce très sérieuse annonçaient quelque chose de sauvage et de jusqu’au boutiste". Dans les faits, moi, je m'attendais au pire. Mais en dépit d'un certain ridicule hors, et même en contexte, le plan d'ouverture a quelque chose de grandiose. Soit, laissons à ce film une chance de m'impressionner.
Le film, en fin de compte, a un traitement très classique. Trop classique, comme on ne le pardonnerait pas à un film standard. Tout est attendu, stéréotypé. Pourtant, c'est là à mes yeux la plus grande qualité du film. Loin de profiter de son scénario pour partir dans tous les sens, il apparaît au contraire comme une démonstration rigoureuse. Il raconte la même histoire qu'un revenge movie traditionnel, allant jusqu'à reprendre les plans les plus iconiques que j'avais vu la veille dans un thriller coréen. Sauf que si ces grosses ficelles font en général des films de moyenne facture, ici, elles font preuve d'une dérision certaine.
Je l'ai dit, pour moi White God est un exercice de style, qui vise à simplement remplacer dans un archétype des hommes par des chiens. Il ne faut donc pas s'attendre à quelque chose de totalement fou ou débridé.
Il y a, cependant, quelques ombres au tableau. Le début qui semble traîner en longueur, particulièrement. Certes, c'est globalement pertinent scénaristiquement, mais après qu'on nous ai montré le plan d'ouverture en flash-forward, on a envie d'y revenir le plus vite possible. Et puis, du même fait, on s'intéresse finalement peu à Lily, le principal personnage humain. C'est qu'on est venu voir un film qui parle de chiens après tout, et ses déceptions sentimentales nous passent un peu au-dessus de la tête. C'est le problème quand on vend un film sur son originalité : le public est là pour expérimenter la nouveauté, attiré par un certaine radicalité que ce film n'a finalement pas dans la forme. Je comprends ainsi qu'il puisse décevoir.
Néanmoins, je salue l'exercice, dont j'ai été très impressionnée. Peut-être à l'égard d'un Black Sheep, mais en plus sérieux cette fois. Surtout, je salue la réalisation de ce film en images réelles, là où l'animation aurait constitué la solution de facilité. Mais en animation, on serait précisément passé à côté de l'objectif, n'est-ce pas ? Prouver qu'il s'agissait au final d'un film parfaitement classique. Peut-être le format idéal pour faire la promotion de "l'étrange" aux non-initiés bien prompts à nourrir des préjugés.
Shania_Wolf
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Vus à l'Etrange Festival 2014

Créée

le 6 sept. 2014

Critique lue 458 fois

7 j'aime

Lila Gaius

Écrit par

Critique lue 458 fois

7

D'autres avis sur White God

White God
zombiraptor
7

Essaim animé

La bande annonce bombait son torse musclé en annonçant l'arrivée d'une relecture canine des Oiseaux alors que les images, elles, évoquaient plutôt un avatar quadrupède des origines de La Planète des...

le 21 déc. 2014

52 j'aime

14

White God
Fritz_the_Cat
5

Mean Streets

Réduits à des cobayes désignés pour mourir, deux chiens s'enfuient d'un laboratoire. Perdus en rase campagne, ils tentent de survivre. C'est le pitch de The Plague Dogs, beau et méconnu film...

le 21 déc. 2014

38 j'aime

6

White God
Sergent_Pepper
4

Fatal canin

Une belle affiche, une ouverture d’exception, un pitch intriguant : White God excite comme il faut les papilles du cinéphile qui flaire là une petite pépite venue de Hongrie. Il faut dire que Kornél...

le 14 nov. 2017

29 j'aime

2

Du même critique

Split
Shania_Wolf
5

Fin de course ?

On a bien du mal à s’imaginer que la même personne se trouve derrière l’ambiance dosée et maîtrisée de Sixième Sens ou Signes et la mise en scène facile et sans personnalité de Split. C’est que le...

le 19 févr. 2017

134 j'aime

12

La Tortue rouge
Shania_Wolf
7

Une île de poésie dans un océan de blockbusters

Extrêmement épuré, dans l’histoire, l'image comme le son, La Tortue Rouge promet une expérience apaisante, suspendue au-delà du temps. Un instant de poésie dans ce monde de brutes, mais dont les...

le 28 juin 2016

104 j'aime

3

The Assassin
Shania_Wolf
4

Ôde à l'esthète

La forme sans le fond. C'est un regret amer, celui d'un parfum somptueux qui s'évapore aussitôt, d'arômes riches qui ne tiennent pas en bouche. On frôle le sublime mais ne reste que la...

le 18 févr. 2016

101 j'aime

18