Le film conte l'énamoration entre deux garçons, l'un pubère (15 ans), l'autre non (12 ans) durant un camp d'école d'été ("continuation school"). C'est mené avec un mélange de pudeur et de frontalité qui rend le film unique, notamment dans la représentation des corps - dont une scène sous la douche qui rendit l'exploitation du film difficile à l'étranger. Le film est assez revendicatfif ("You are not alone" comme disent la chanson et le titre) mais tente de rester à hauteur de ses protagonistes. Leur romance est filmée avec toute la délicatesse et les non dits propres à cet âge, mais aussi avec une liberté qui tient sans doute au Danemark de l'époque, premier pays à supprimer la censure au cinéma, en 1969. Ce liberté joyeuse et sans complexe permet au récit de ne jamais basculer dans le glauque (contrairement au premier film du duo, LEAVE US ALONE). Après avoir tissé sa toile sentimentale, le scénario désserre progressivement ses fils pour laisser advenir des tableaux (parfois des scénettes plus anodines) et une atmosphère de "sensualité innocente", pour autant que ces deux termes puissent encore s'allier, avant un étonnant dernier mouvement, plus politique et contestataire. Les interprètes sont incroyables de justesse. Seul le personnage du directeur (le père du plus jeune) reste caricatural, trop old school, mais sa nuisance est limitée. L'emporte une couleur lumineuse qui donne toutes leurs chances aux personnages - on est loin de la tragédie des AMITIÉS PARTICULIÈRES, qui résonnait comme une punition. La fin a été rafistolée au montage, les rushes de la vraie fin tournée étant inexploitables à cause d'un problème de lumière. Mais peu importe, l'essentiel est là, enregistré : des gestes (un jeu de tracés sur la peau), des regards (un bras autour du cou qu'on remet gentiment à sa place), de belles idées de mise en scène (le fils disputé off tandis que la caméra balaie sa chambre recouverte d'affiches et bibelots encore enfantins). On comprend que le film soit culte pour toute une génération de gays. Cette idylle frémissante est une sorte de mythe paradisiaque, une consolation envers tout ce que la vie a empêché et que le cinéma permet, par procuration, de vivre et ressentir malgré tout.

LunaParke
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le 6 oct. 2023

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