Zootopie nous fait découvrir un monde dans lequel les animaux ne sont plus soumis à la chaîne alimentaire et au règne animal : désormais, ils vivent libres, égaux et sans s'entre-dévorer ! Les animaux sont civilisés et vivent ensemble.
Comment fonctionne une telle société ? Des animaux d'espèces différentes peuvent-elles tomber amoureuses ? Que mangent les prédateurs ? Où sont les oiseaux, les poissons et les primates ? On s'en fout ! Et c'est normal. Le film ne cherche pas à établir un univers ultra-cohérent, mais plutôt à transposer de manière fun le multi-culturalisme des grandes villes d'aujourd'hui. De nombreuses villes sont des "villes-mondes" où la population est originaire de pays du monde entier. Ces populations vivent ensemble, ont des religions différentes, mais comment ? C'est drôle car j'ai justement vu récemment le documentaire "In Jackson Heights", sur un quartier périphérique de New-York où 167 langues sont parlées ! A un moment donné, un employé de pizzeria, qui vient d'Amérique du Sud, se plaint dans une réunion d'être très mal payé, on lui demande d'où ses patrons sont originaires jusqu'à ce que quelqu'un remarque que les origines ne devraient pas avoir d'importance pour eux. Je peux très bien imaginer ce genre de scènes dans Zootopie, en remplaçant les origines par l'espèce animale.
Zootopie présente donc en apparence un projet utopique, jusqu'à ce qu'on gratte un peu sous le vernis. L'héroïne, première lapine à intégrer la police, se retrouve ainsi assignée à mettre des P.V… L'assistante du maire (une proie aussi) est plutôt une secrétaire peu considérée… Etc. Et puis, dans la deuxième partie du film, la discrimination se retourne : ce sont les prédateurs qui font peur au reste de la population.
A la fin du film, on se rend compte que l'idée est traitée sans naïveté, et de manière extrêmement fine et nuancée. Zootopie devient beaucoup plus réaliste que ce qu'on aurait pu attendre mais il reste un beau projet que chacun doit s'efforcer de faire continuer de vivre.
De manière pratique, l'emploi de différentes espèces animales permet de jouer sur les quartiers de la ville, les échelles, les clichés inhérents à chaque espèce et en tirer des gags… Imaginer une ville compatible avec tous ces mammifères est un exercice qui résulte en un foisonnement visuel très riche. Le film exploite son idée jusqu'au bout, que ce soit dans l'humour, la richesse visuelle, le propos…
Enfin, l'univers est tellement riche qu'on imaginerait bien une suite sur des endroits et des personnages encore inexplorés de ce monde.
Post-scriptum : une mention spéciale pour la scène du camp nudiste, qui tente de suggérer l'embarras de la nudité par différents moyens, alors qu'ils ne peuvent pas présenter de parties génitales… ou quand les contraintes créent du challenge !