Amateurs d’immersion, d’aventure et de réalisme, soyez les bienvenus. Si ces 3 mots vous parlent, alors Kingdom Come : Deliverance risque bien de vous faire chavirer comme il m’a fait chavirer. Allez, j’ose l’annoncer dès l’intro, je pense qu’on a à faire à l’un des RPG les plus immersifs de tous les temps, même s’il ne se laissera pas apprivoiser facilement par tout le monde. Mais inutile de tourner autour du pot, passons à la critique en elle-même, garantie 100% sans divulgâchage, comme à mon habitude.



Un RPG médiéval réaliste



Kingdom Come : Deliverance est un RPG à la 1ère personne en monde ouvert (comme les Elder Scrolls) qui se passe dans un univers médiéval réaliste. Quand je dis réaliste, je veux dire par là qu’il est historiquement réaliste. On est au début du XVème siècle en Bohême, dans l’actuelle République Tchèque. On incarne Henry, fils de forgeron dont la vie se retrouve chamboulée lorsque la guerre atteint son village. Dans ce jeu, tout a été fait dans le but d’être fidèle à l’histoire, et c’est particulièrement réussi (dixit de nombreux historiens médiévistes). C’est d’ailleurs le fer de lance de Warhorse Studio. Je ne vais pas m’y attarder car c’est un fait connu.


Voilà qui est dit, KCD est un jeu qui se veut fidèle à l’époque médiévale qu’il dépeint, et sacrebleu que ça fait du bien ! J’aime la fantasy et l’imaginaire en général, ceux qui me suivent le savent, mais que ça fait du bien de changer un peu et d’évoluer dans un univers médiéval réaliste ! Ah, vous venez de lire l’un des maîtres mots de KCD : le réalisme. Car oui, en plus d’être historiquement réaliste, le jeu prend aussi le parti audacieux d’avoir un gameplay réaliste. Morbleu que c’est rafraîchissant ! Autrement dit, vous pouvez oublier les validations de quêtes à tour de bras et les traversées de toute la map en quelques clics.



Prendre son temps pour mieux s’immerger…



Je l’ai dit dans mon intro, KCD ne se laissera pas apprivoiser par tout le monde, notamment à cause de ce parti pris réaliste dont on n’a pas l’habitude. La faute en incombe principalement à la lourdeur générale et au temps que le jeu nécessite pour faire la moindre quête. Puisque le jeu est réaliste, on ne se téléporte pas en voyage rapide à 20km de là. On ne se soigne pas en plein combat, évidemment. D’ailleurs, on ne tue pas un soldat en un coup d’épée, surtout s’il a une armure, chaque combat prend du temps. Et puis la nuit, ne vous attendez pas à trouver quoi que ce soit d’ouvert, il faudra dormir jusqu’au lendemain matin (dans une auberge de préférence) si vous voulez parler à quelqu’un, et d’ailleurs, qui se promène en pleine nuit à part des gens louches ? Jouer à KCD, c’est vivre dans cette époque médiévale et adopter le rythme de vie de n’importe quel autre citoyen. Tout prend du temps, mais on aura compris dès les premières minutes de jeu que c’est dans le contrat. Très vite on est mis au parfum et on sait qu’il faudra prendre son temps. Et vous savez quoi ? Ça rend le jeu tellement plus vrai et l’expérience tellement plus immersive ! Et inutile d’essayer de jouer autrement, le jeu ne vous laissera pas le choix.



… Dans une aventure très bien écrite



Qui dit RPG en monde ouvert, dit forcément quêtes à foison pour s’occuper. Et on peut dire que les gars de chez Warhorse ont particulièrement peaufiné cet aspect, tant chaque quête est scénarisée, originale et intéressante, en plus de pouvoir être validée de multiples façons. Et comme vous ne les enchaînerez pas par paquet de 10, elles s’apprécient d’autant plus et deviennent à elle seules des petites aventures. Et en ce qui concerne les compétences à développer, Warhorse Studio a évidemment choisi la manière la plus réaliste : en pratiquant. Pas de classe de personnage ou de points de compétences à distribuer, mais simplement la pratique qui vous permettra de vous améliorer. Personnellement, c’est quelque chose que j’apprécie beaucoup.


Quelques mots également sur l’excellent travail du studio sur la façon quasiment toujours très réaliste dont les quêtes sont amenées (ah, tiens !), de sorte qu’il ne paraît pas du tout choquant que notre apprenti forgeron aide tel seigneur ou tel paysan. Je vais me répéter, mais parbleu, que c’est rafraîchissant !



Un enrobage graphique et sonore digne de ce nom



Je vais commencer par une simple anecdote : je devais rejoindre un seigneur à l’aube pour l’accompagner à la chasse. J’ai donc pris une chambre dans une auberge aux abords de la ville. Je me suis réveillé vers 5h du matin, alors que le ciel avait encore cette teinte rosée caractéristique des premières heures de la journée. A cette heure-là, il n’y avait pas âme qui vive. J’ai donc traversé la campagne baignée de rosée, en marchant, profitant de cette tranquillité et de cette ambiance qu’on ne peut trouver que très tôt le matin, pour me diriger vers l’enceinte de la ville. Ce que je vous ai décris là, je ne l’ai jamais ressenti à ce point dans un jeu. Pour la première fois, j’ai réellement envie de prendre mon temps parce que le jeu s’y prête et parce que je me sens vraiment au Moyen-Age ! Parce que j’aime me balader dans la campagne, parce que j’aime chasser dans les forêts européennes (on a vraiment l’impression de parcourir nos forêts, c’est fou !), parce que je profite de chaque instant passé dans ce jeu. A ce point-là, ça ne m’était jamais arrivé.


Les graphismes sont très beaux, notamment grâce aux jeux de lumière d’excellente qualité, mais aussi grâce à la très belle reconstitution des villes, des villages, des campagnes et des forêts. On s’y croit vraiment ! Le monde ouvert est parfaitement maîtrisé et on ressent un immense sentiment de liberté.


On pourra pester sur les animations faciales qui sont dans l’ensemble assez moyennes, mais ce défaut est rattrapé par un doublage d’excellente qualité en anglais (la VF est bien moins bonne, je vous la déconseille). L’environnement sonore a lui aussi été très travaillé et participe à cette immersion réussie. Enfin, la musique de style évidemment médiéval est tout à fait dans le ton et colle parfaitement au jeu.



Une grande aventure



Je terminerai cet éloge en abordant l’aventure formidable que nous fait vivre KCD. C'est à l’échelle d’un homme qui vient du peuple que vous la vivrez, cette aventure, un homme qui cherche à se rendre utile auprès de son seigneur pour des raisons que je ne divulguerai pas ici. Henry est dépassé par tout ce qui lui arrive, il n’est pas l’acteur de son histoire, c’est l’histoire et tous ceux qui gravitent autour de lui qui permettent d’en faire le héros. Cette aventure est d’autant plus réussie qu’elle est parsemée de passages scénarisés, de dialogues intéressants et bien écrits avec des personnages qui le sont tout autant. On est loin d’un Elder Scrolls ou les personnages et les dialogues ne sont que des prétextes pour donner des quêtes.



Kingdom Come s’adresse-t-il à n’importe qui ?



Non, clairement pas. Mais je pense aussi qu’il y a beaucoup de fans qui s’ignorent. Je ne veux pas insister sur les côtés prétendument négatifs du titre parce que j’ai peur de faire fuir des gens qui pensent ne pas pouvoir apprécier un tel jeu simplement parce qu’ils n’ont pas l’habitude (comme la plupart des joueurs). Il est clair que tout le monde ne peut pas aimer KCD, mais on est tellement habitué à ce que les jeux nous facilitent tout et soient les plus simples possibles que beaucoup de joueurs ne peuvent pas savoir s’ils vont aimer celui-là avant de l’avoir essayé. Je me répète, mais j’étais à peu près certain de ne pas accrocher plus que ça à Kingdom Come, ça a été une véritable surprise pour moi.


Alors oui, c’est exigeant, oui chaque action prend du temps, mais il n’y a pas de difficulté artificielle. Ce n’est pas un jeu masochiste, simplement un jeu qui, contrairement à tous les autres, choisit de s’attacher au réalisme. On pourrait penser que trop de réalisme irait à l’encontre du plaisir de jeu et j’étais d’ailleurs le premier à craindre un tel écueil. Mais nos développeurs tchèques ont réussi à allier brillamment les deux, en créant du fun avec le réalisme, de sorte que l’ensemble se tient à merveille et nous offre un jeu d’une grande cohérence.
En gros, pour schématiser : chaque action prend du temps (on le comprend dès le début), du coup on profite plus de tout ce qu’on fait (et la qualité des quêtes et du reste est une sorte de récompense pour notre implication), du coup le réalisme prend tout son sens et s’intègre dans notre gameplay et dans le roleplay, du coup on n’hésite pas à prendre notre temps, et ainsi de suite.


KCD n’est pas un jeu facile et encore moins un jeu accessible. Il est clair qu’il faut vraiment aimer les RPG et chercher avant tout l’immersion pour pouvoir l’apprécier. Mais si vous êtes dans ce cas, oubliez la lourdeur et l’exigence, car ces défauts deviendront des qualités pour vous, ou au moins des composantes nécessaires à un formidable RPG qui favorise immersion et réalisme, sans jamais tomber dans l’excès (hormis pour les temps d’attente peut-être). Laissez-vous tenter, vous risqueriez d’être aussi surpris que moi par la qualité du titre.


Une petit mot sur l'état actuel de KCD : rassurez-vous, le jeu est désormais dans un état tout à fait correct. Il reste des bugs, c’était couru d’avance, mais rien de vraiment gênant. Quant à l’optimisation, je n’ai jamais ressenti le moindre ralentissement sur PS4. En revanche, les temps de chargement sont très longs !


Puisque j’ai écrit beaucoup de choses, je vais résumer un peu tout ça pour les moins motivés :
Kingdom Come Deliverance, c’est :



  • Un jeu médiéval réaliste, avec un vrai effort sur la reconstitution de l’époque qu’il dépeint

  • Un gameplay réaliste qui oblige le joueur à prendre son temps

  • Une immersion incroyable, du jamais vu pour ma part

  • Une aventure passionnante

  • Un magnifique monde ouvert et de splendides environnements

  • Des quêtes toujours intéressantes et originales

  • Un Elder Scrolls réaliste et plus immersif

  • Un Elder Scrolls avec une histoire et des PNJ bien plus intéressants et mieux écrits


Mais c’est aussi :



  • Quelques bugs non résolus, mais jamais réellement gênants

  • Des temps de chargement trop longs

  • Un jeu qui sera trop lent pour certains et qui ne pourra pas plaire à tout le monde

  • Trop d’attente (pour plus d’immersion) quand on dort, quand on voyage ou quand on est en prison.

  • les menus très chargés et écrits en tout petit.


Kingdom Come : Deliverance est un RPG d’une qualité surprenante. J’ai été le premier surpris. Oubliez tous les jeux du genre que vous avez pu faire, car ici on parle de réalisme. Réalisme historique, et réalisme dans le gameplay. Ça pourra en désarçonner certains, tant on a peu l’habitude de voir ça, mais sachez que c’est exécuté avec brio. La conséquence, c’est un jeu qui oblige le joueur à prendre son temps et, de ce fait, à apprécier d’autant mieux son séjour dans la Bohême du début du XVè siècle. L’immersion, aidée par un environnement visuel et sonore d’excellente facture, n’a jamais été aussi réussie. En fait, c’est tout simplement le jeu le plus immersif auquel j’ai joué ces 15 dernières années. L’aventure vécue avec Henry, les dialogues et les personnages rencontrés, le réalisme en toutes choses, la beauté du monde ouvert et évidemment ce formidable pouvoir immersif permettent à KCD de se classer parmi l’un des meilleurs RPG de tous les temps.

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le 3 janv. 2019

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roifingolfin

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