Après le succès commercial et critique incroyable d’Uncharted 2, il semblait évident de poursuivre la série sur sa lancée, c’est ainsi qu’Uncharted 3 arrive en toute logique 2 ans plus tard pour conclure la trilogie Uncharted de la Playstation 3 et celle dirigée par Amy Hennig. Les premiers trailers promettaient un spectacle à couper le souffle, ce en quoi on pouvait croire assez facilement vu que c’était largement maîtrisé dans le précédent volet de la série, mais ce n’est sans doute pas assez pour faire un grand jeu et la question se pose de ce que le jeu a d’autres à offrir. C’est à cette question que je vais répondre pendant cette critique durant laquelle je vous propose l’écoute de cette reprise symphonique de deux thèmes représentant bien le jeu.



RÉALISATION / ESTHÉTISME : 8 / 10



Autant le dire d’emblée puisque c’est le constat le plus objectif qu’on puisse faire et l’une des plus grandes qualités que l’on peut reconnaître au titre : on atteint, ou bien on frôle de très près, les limites techniques de la Playstation 3. C’était peut-être même de trop près pour les toutes premières PS3 qui avaient du mal à le faire tourner et ont rencontré beaucoup de problèmes à son lancement, un travail d’optimisation que l’on aurait pu espérer un peu meilleur. Cela dit, je comprends qu’en 2 ans de développement et avec de telles ambitions techniques, c’était loin d’être facile et pour obtenir l’un des plus beaux jeux de la console en 2011, 2 ans tout de même avant la sortie de la Playstation 4, le compromis est acceptable.


Les animations contextualisées de Nathan Drake sont beaucoup plus poussées, Nate agitant facilement les bras en toute cohérence avec son environnement, le genre de petits détails qui montrent l’envie de pousser la technique pour plus d’immersion, un effort que l’on ne retrouve pas forcément ailleurs mais on aura l’occasion d’y revenir. La physique générée par les flammes, l’eau, le sable… est très développée et bluffante. C’est assez difficile de trouver des déchets visuels à l’écran, seul certains effets d’escalier sur des ombres peuvent faire un peu tâche sur le tableau, et encore il faut y regarder de près.


Tout le passage sur les bateaux, celui sur l’avion cargo au-dessus du désert... offrent de dignes successeurs à ceux d’Uncharted 2 dans leur cascade de mises en scène bouleversantes chapitre par chapitre. C’est très impressionnant, non seulement techniquement mais aussi pour le talent de mise en scène qui est mis en avant lors de ce type de séquence. Un gimmick propre à celle-ci c’est que la caméra va souvent dézoomer et adopter des plans débullés très efficaces, plus qu’avant et ça permet vraiment de donner cette dimension renversante à la réalisation. On s’y attendait vu les standards acquis par la série, mais ça reste une très belle réussite.


De plus, durant ces passages très chargés en détails et en mouvements à l’écran, le 30 FPS tient le coup avec seulement quelques légers drops à peine perceptibles. Naughty Dogs était tellement conscient de cette force qu’ils ont même dédié des chapitres complets à des exercices de réalisation sans quasiment aucune situation de jeu, un parti pris radical que personnellement j’ai su apprécier parce que ça permet de souffler après des phases plus complexes et/ou frustrantes sur lesquels je reviendrai plus tard.


Par contre, ces 2 ans de développement, et l’équipe réduite pour le début du développement de The Last of Us en parallèle, pour autant de grandes forces s’accompagnent tout de même de quelques écueils techniques secondaires. Des bugs d’animation sont assez présents, plus que par le passé, si on saisie un ennemi, qu’on le repousse et qu’on le crible de balles, il sera encore dans l’animation d’étourdissement sans que les balles semblent l’impacter alors qu’en fait il sera déjà mort. J’ai eu aussi une fois la modélisation 3D de mon arme qui a disparu de mes mains, plus de bruitage aux coups de feu, mais on voyait les trajectoires des balles et les ennemis prenaient les coups. On peut aussi noter une tendance au recyclage de skins pour les ennemis, c’est pas bien méchant.


L’OST est toujours signé par Greg Edmonson et elle est toujours assez efficace en reprenant les thèmes les plus emblématiques et en empruntant également des instruments et styles de voix chantée propres aux cultures auxquels le jeu peut faire référence. Le sound-design et les doublages sont également de bonne facture comme ils l’étaient dans la saga, pour un blockbuster pareil, c’est normal, pas grand-chose à redire. D’une façon générale, le jeu est à la hauteur de ses ambitions malgré quelques écueils secondaires et légers problèmes d’optimisation sur les PS3 de première génération, rien de trop problématique. Malheureusement, ce n’est que sur cette partie que le jeu m’a réellement satisfait.



GAMEPLAY / CONTENU : 6 / 10



En toute logique, la formule de base n’a pas tant évolué que ça, on reste dans une proposition vidéoludique proche de ses aînés avec un jeu de tir à la troisième personne comprenant des phases de parkours et d’énigmes entre ses fusillades, qui restent le cœur du gameplay quoiqu’il arrive. Les phases de parkours sont plus lisibles que jamais dans la saga grâce à une utilisation très pertinente de la caméra et d’indices visuels assez subtils. Par exemple, on voit un chemin en face très clair sur lequel se trouve des oiseaux, puis on cherche le chemin et on voit des oiseaux donc on se dit que c’est par là qu’il faut aller, puis maintenant que notre regard a été aiguillé vers les oiseaux, le chemin suivant est décrit par l’envol de ces oiseaux.


Je ne suis pas sûr de l’avoir bien décrit mais l’idée c’est que les développeurs ont vraiment cherché à bien orienter le joueur discrètement pour qu’il est l’impression de toujours trouver naturellement et de lui-même le chemin à emprunter. Loin sont les phases du premier Uncharted où l’on est bêtement bloqué parce qu’on ne voit pas la pierre qui dépasse de deux centimètres pour poursuivre notre avancée. Je dirais que c’est le point d’amélioration le plus notable de cet épisode, donc bien peu finalement. Les énigmes sont quant à elles plus élaborées que par le passé mais j’ai trouvé que certains indices n’étaient pas assez clairs, donc je ne trouve pas l’évolution qualitative si franche que ça.


La difficulté a été revue à la hausse pour les fusillades avec une visée un peu plus lourde et des ennemis plus agressifs, l’avoir fini en difficile aura vraiment été une épreuve pour moi à certains passages où j’ai failli abandonner, ce qui m’était moins arrivé dans le précédent opus au même mode de difficulté. Ça peut tout à fait se comprendre de par le fait que les développeurs peuvent raisonnablement considérer que certains automatismes ont été acquis d’épisode en épisode par les joueurs et qu’ils peuvent se permettre d’être plus durs avec eux. Maintenant est-ce que cette difficulté est dû à de bonnes ou de mauvaises raisons ? Pour moi, c’est le signe d’un manque de maîtrise hérité du premier épisode et c’est le reproche n°1 que je ferais à ce gameplay.


Tous les problèmes de gameplay des anciens opus sont là : la même IA alliée toujours aussi basique, le même problème de contrôle avec une confusion entre les actions mise à couvert / roulade / saisie toutes sur la même touche, la même répartition des check points trop proches les uns des autres qui peuvent en venir à se retourner contre le joueur en le faisant réapparaître systématiquement en mauvaise posture, les mêmes légers soucis dans le masque de collision quand on veut être très précis, le même système de combat au corps-à-corps très permissif et soporifique sans ouvrir de frame d’invulnérabilité… une accumulation de soucis qui est de moins en moins excusable avec le temps.


C’est vraiment dommage car il y a eu un travail assez conséquent sur les arènes de jeu qui font partie des plus grandes et des plus élaborées de la trilogie mais le placement des ennemis, leur comportement agressif et l’impossibilité de sprinter empêchent de pouvoir l’utiliser en difficulté supérieure. On a une grande arène mais on ne peut pas bouger sans se faire tuer, faut juste avoir les bonnes armes et tuer le plus vite possible sans trop bouger, c’est la meilleure manière de jouer et elle est complètement contradictoire au level-design. Les développeurs ont corrigé le problème des arènes petites et étriquées pour les gâcher avec leur équilibrage plus difficile et leur maniement plus rigide, c’est rageant !


Par ailleurs, on a jamais eu un boss final correct dans un Uncharted sur Playstation 3, je vous le donne en mille on en aura pas un avec celui-là puisque c’est un boss final à QTE particulièrement inintéressant à affronter. Mais ce reproche peut être fait pour les boss comme pour les ennemis qui n’évoluent que très peu et sans grande originalité ou avec une manière de se battre complètement différente. Il y avait plus d’ennemis originaux dans les précédents épisodes et on n’aurait pu même s’attendre à ce qu’il y en est encore plus dans celui-ci. Mais ce n’est pas là que ma déception fut la plus grande bien qu’elle soit déjà bien présente.



SCENARIO / NARRATION : 5 / 10



Si la fin d’Uncharted 2 n’impliquait pas nécessairement une suite à l’intrigue, le concept même du chasseur de trésor tenté par la moindre aventure permet de facilement relancer une toute nouvelle intrigue en toute cohérence sans trop avoir à se prendre la tête. Néanmoins, les ambitions d’Amy Hennig, toujours scénariste et même pour la première fois seule à ce poste dans la saga, ont été de reprendre ce qui avait pu être introduit dès Uncharted 1 comme quête et de s’en servir comme prétexte pour faire évoluer la psychologie du protagoniste plus que par le passé, mais je ne trouve pas que cet exercice soit très réussi pour ne rien vous cacher.


On a des moments d’introspection que certains ont beaucoup aimé que j’ai trouvé beaucoup trop ambitieux pour un scénario qui ne les justifie pas à mon sens. Le sens de la quête de Nate se présente comme un dilemme pour lui, poursuivre sa chasse au trésor qui l’obsède depuis gamin ou l’arrêter tant ça devient dangereux pour lui et surtout pour ses proches, mais ces moments où c’est autant mis en avant me semble parfaitement exagérés et j’ai eu du mal à adhérer à ce choix. Dans ce scénario, j’ai juste l’impression que Nate a un égo surdimensionné et doit apprendre à en faire abstraction, ce qu’il n’aura d’ailleurs pas à faire tant que ça au final.


Là où l’intrigue marche bien c’est pour illustrer les liens d’amitié entre les personnages principaux comme lorsque des éléments de langage des personnage sont expliqués avec Sully et Nate se renvoyant leur différence d’âge constamment pour se taquiner dès leur première rencontre, ou encore comment Nate épuisé tombant de fatigue sur les genoux d’Elena et attrapant délicatement sa main… Ce sont des petits moments comme ça qui m’ont procuré le plus d’émotion de par l’attachement que j’ai ressenti pour ces personnages. Malheureusement, ces derniers ne sont pas tous très bien travaillés, autant anciens que nouveaux.


Les antagonistes sont très peu charismatiques, adeptes du cliché nanard de ne pas tuer le héros à sa merci pour mieux le laisser s’échapper à 3 reprises, sans que leur motivation ne soit particulièrement élaborée, avec des événements quasiment surnaturels les entourant jamais expliqués… Le personnage de Chloé est devenu insipide, dépourvue de sa répartie et de son caractère imprévisible. Elle a été inclue là-dedans juste pour dire qu’elle était là, mais franchement à ce niveau-là il y aurait presque mieux valu la remplacer par un PNJ osef pour qu’elle conserve son image intact d’Uncharted 2 qui la propulsait parmi les meilleurs persos de la saga.


Toujours pour les défauts, j’ai trouvé que les transitions étaient un peu brutales et faciles entre certains chapitres où l’on change d’environnement, ce que j’ai compris quand j’ai appris que certains passages du jeu avaient été montrés alors que leur présence dans l’intrigue n’étaient pas encore écrites. Il y a beaucoup de retournements de situation qui sont très prévisibles, beaucoup plus que dans Uncharted 2 qui savait me surprendre à bien des occasions. Je pense sincèrement que l’écriture est moins ingénieuse, est-ce que c’est dû à Amy Hennig seule au poste ou au manque d’idées suite à toutes les bonnes idées du précédent opus, je ne sais pas mais il y a une régression objective à mon sens.


Pour finir sur une bonne note tout de même, les références sont nombreuses et appréciables à des grands classiques du cinéma comme Indiana Jones 3, du début où l’on voit le héros plus jeune jusqu’à une fin dans un canyon en plein désert où les personnages finissent par boire une eau aux propriétés surnaturelles. Ça fait sens comme choix de référence et ce n’est pas trop explicite pour crier au manque d’idées sur ce coup. Mais ça fait bien peu de qualités pour la suite d’un jeu assez solide sur son scénario et ayant mis en place des personnages sous-exploités par cet épisode, voire dénaturés.



CONCLUSION : 6 / 10



Si Uncharted 3 propose le grand spectacle qu’il promettait, il peine beaucoup plus à me convaincre quant à ses choix ludiques et scénaristiques qui sonnent comme des régressions pour moi à une époque où le TPS acquiert des standards de qualité qui exigent un tout autre niveau. Ça reste un bon jeu de sa console et qui ne commet aucune erreur réellement impardonnable pour la suite de la série, mais c’est l’épisode que j’apprécie le moins de la trilogie pour laquelle j’attendais meilleure conclusion et son phénoménal succès avoisinant les 10 millions de ventes me frustre un petit peu. Fort heureusement, Uncharted 4 rectifiera le tir et me plaira beaucoup plus.

damon8671
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le 27 juil. 2019

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damon8671

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