Apollo Justice: Ace Attorney
7.3
Apollo Justice: Ace Attorney

Jeu de Shu Takumi et Capcom (2007Nintendo DS)

Alors qu’en France, le troisième épisode n’est pas encore sorti sur DS, Capcom bombarde avec le quatrième jeu de la série Ace Attorney, appelé Apollo Justice. Cet opus marque une rupture avec la trilogie GBA et cherche à s’orienter vers de nouveaux horizons. Ici, on incarne Apollo Justice (c’est le titre), jeune avocat de la défense, disciple de Kristoph Gavin. Il sera accompagné de Vérité et devra se confronter au procureur Konrad Gavin. Les personnages sont suffisamment chamboulés pour que la fan base hurle au scandale.


Mais alors, où est passé Phoenix Wright ? Eh bien, il est au chômage. Dans ce jeu, Wright a perdu son badge. Le fil conducteur sera cette fois une affaire qui s’est déroulée il y a sept ans, provoquant cet incident, et à l’instar des précédents jeux, sera résolue au climax du jeu. Si on s’attarde un peu sur les personnages, Apollo Justice montre tous les traits de l’inexpérience, de quoi rappeler Wright durant le premier jeu. Certaines personnes le descendent en disant qu’il est soit une copie de Wright, et donc n’a aucun intérêt, soit il est insipide, et ainsi n’a aucun intérêt. Le fait que ces deux camps coexistent montre l’absurdité de la chose. Apollo a une réelle personnalité dissociable de celle de Phoenix et il me semble qu’il réussit à s’imposer comme protagoniste qui évolue au cours de l’aventure en gagnant du charisme. Dans ce jeu, Maya est remplacée par Vérité, qui est une espèce de rayon de soleil ambulant un peu moins nunuche et pourtant plus jeune. Tektiv est remplacé par Ema Skye, jeune amatrice de sciences qu’on avait déjà connue dans le remaster du premier jeu sur DS. Enfin, le procureur est cette fois un blondinet, chanteur et guitariste dans un groupe de rock à succès, qui ne cesse de s’en vanter et de surnommer notre personnage « M. Grand Front ». Il me rappelle le mec populaire dans les universités américaines, stéréotype qui peut vite devenir agaçant. Là où Konrad gagne des points et se démarque de Hunter, von Karma ou Godot, c’est qu’il ne cherche que la vérité, quitte à aider la défense durant les procès. Et ça, c’est cool, ça change un peu.


L’absence de Wright est surprenante, mais comme le gameplay est quasi identique, on n’est pas perdu. Durant les enquêtes, le jeu propose des petites interactions avec l’écran tactile de la DS et son micro pour distraire le joueur. De plus, on a le droit d'avoir les pièces à conviction en 3D, ainsi que certaines reconstitutions de scènes avec des modèles et une caméra qui se déplacent. Tout cela rappelle l’épisode spécial d’Ace Attorney 1 sur DS. Le jeu en fait plusieurs références d’ailleurs. Le gros changement de gameplay réside dans l’absence du magatama et dans l’ajout du bracelet d’Apollo. Durant le procès, ce dernier indique à son porteur que l’interlocuteur est en train de stresser. À nous de l’activer sur la bonne fenêtre de dialogue et sur la bonne partie de la phrase pour repérer sur le sprite un détail qui s’anime. C’est assez distrayant et ça ajoute de la variété dans le gameplay des procès. Malheureusement, là où les procès, qui étaient déjà très bien, gagnent un ajout, les phases d’enquête, qui sont moins funs, perdent une fonctionnalité, les rendant encore plus barbantes. Je n’ai jamais commencé une enquête en étant emballé. Autre différence, cette fois-ci, le jeu ne nous donne plus la possibilité de présenter un personnage à un interlocuteur. C’est une bonne nouvelle, car depuis le deuxième épisode, cette possibilité ajoutait de la confusion dans les enquêtes. Le jeu ne résout pas les problèmes inhérents à ce système de jeu : si vous avez le malheur de trouver ou de comprendre trop vite ou trop tard, le jeu est infernal. Dans le premier cas, on a tendance à présenter des pièces à conviction qui fonctionnent, mais qui sont refusées, car elles sautent des étapes. Dans le second, soit on chope une soluce, soit on essaie de présenter toutes les pièces en relançant sa sauvegarde.


Le jeu commence avec une première affaire réellement excellente qui dépasse la simple condition de tutoriel. Cependant, après ça, ce qui fait que le jeu n’arrive pas à décoller est lié à son propos. Très vite, le jeu nous fait comprendre qu’il remet en question le système juridique mis en place, inspiré de celui du Japon. C’est cette prise de position qui vient freiner les climax passionnants qu’on avait dans les jeux précédents. L’enchainement d’objections et le feu d’artifice final représentent le sel de la licence. Ici, ça décolle très peu. Pour pouvoir étayer ce propos, je passerais en spoiler pour citer des éléments qui ont influencé mon appréciation. Je parle brièvement des affaires, d’une phase de jeu particulière et des révélations (qui représentent les vrais petits climax du jeu) :


- La deuxième affaire est certes sympathique, mais je n’ai cessé de me demander pourquoi avoir foutu l’arme dans le stand de nouilles avec Alita inconsciente. C’est bête.

- La troisième affaire se termine de façon décevante, car elle se résume à une impasse. Même si on résout le problème, on reste coincé pour prouver la culpabilité de Daryan. C’est particulièrement frustrant et finalement, la solution qui est celle de demander à Tomas de le dénoncer pour alléger sa peine est moins satisfaisante.

- La quatrième affaire est un pétard mouillé. On nous monte le bourrichon pendant des heures sur un incident qu’il y a eu il y a sept ans, qui finalement n’est pas aussi incroyable que prévu et qui, en plus, ne présente pas le bouquet final. Au moment où le procès est censé devenir passionnant, on annonce juste que c’est un jury qui va décider. Kristoph craque à ce moment. Rien d’incroyable et réellement frustrant si on compare aux jeux précédents.

L’introduction de Mason m’a laissé sceptique. C’est original et ça donne l’occasion de réutiliser le magatama, tout en combinant les preuves accumulées. Il n’y a pas d’anachronisme, comme j’ai pu lire ailleurs. Certes, Wright utilise une preuve du présent dans le futur, mais celle-ci est déjà présente dans le décor du passé. Dans les faits, c'est faisable. Je pense que c’est une maladresse du jeu qui souhaitait nous inciter à aller voir Kristoph dans la cellule 13 avant de casser les verrous psyché de Vera. D’ailleurs, les verrous de Kristoph qui ne sont pas brisables, afin de cacher qu’il a perdu une partie de poker et qu’il nous méprise… Je pense qu’on a vu pire comme secret. Enfin, les révélations qu'Enzo Gomez et Zachary Grimoire sont les mêmes personnes, ainsi que Lamiroir est la mère de Vérité et Apollo, sont réellement excellentes. Le jeu a aussi le bon gout de relier les affaires 1, 3 et 4, comme AA3, et ça, c'est une excellente chose aussi.


Bref, Apollo Justice – Ace Attorney est malheureusement détesté pour des raisons qui sont souvent contestables. Certes, on ne joue pas Wright. Certes, Justice est un débutant. Certes, il n’y a pas beaucoup de grands moments. Certes, ces moments sont moins grands que dans les jeux précédents. Cependant, le jeu cherche à lancer la série sur un nouveau terrain avec sa nouvelle trilogie. L’accueil n’a pas été au rendez-vous, et Capcom semble avoir fait machine arrière. Néanmoins, on est loin du mauvais jeu. Tout ce qui lui manque, c’est un feu d’artifice avec un bouquet final. Au lieu de ça, on a le droit à des pétards mouillés, c’est dommage.

PatateDeLespace
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il y a 4 jours

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PatateDeLespace

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