J'ai gaspillé (c'est le seul mot qui convient) tellement d'heures sur ce jeu (je n'oserais pas dire le nombre) que je me sens obligé d'en dire malgré tout un mot.
Une partie de mes études était consacrée à la formation classique (latin et grec). J'adorais et adore encore ça. Odyssey était une belle promesse de faire vivre ce monde, promesse non tenue (comme toutes les promesses d'Assassin's Creed depuis Revelations le mal nommé) mais on ne peut en tout cas pas lui reprocher de ne pas essayer. Si l'univers grec à mi-chemin entre histoire et mythologie du jeu a de quoi charmer les premières heures, très vite on se rend compte que le contenu est cloné ad nauseam. Le jeu est ridiculement long, mais pas pour de bonnes raisons, car vous allez faire tout le temps la même chose, et pratiquement sans variations. Généralement, dans un jeu, une fois que les bases du gameplay sont maitrisées, on introduit des petits twists, des contraintes, des nouvelles situations. Nope. Vous avez trouvé vos marques pendant les six premières heures du jeu ? Vous ne ferez plus rien de neuf pendant les 300 qui vont suivre. Plus rien. C'est à peine une exagération.
D'ailleurs la story line est laborieuse et tombe plus ou moins à plat (?), ce que les DLC ne corrigent pas (toute la quête de la First Blade introduit un véritable épilogue, certes, mais ne conclut pas vraiment les questions ouvertes avant et la quête Atlantis finit en eau de boudin). Mention spéciale pour l'écriture des dialogues, qui est affreuse, et tout particulièrement ceux liés au badinage (puisqu'Ubisoft a beaucoup insisté sur le fait qu'il y aurait de la fesse en veux-tu en voilà). C'est de la disquette de rue à tous les étages, et à la limite je peux entendre que parfois ça ait du sens (parfois on veut juste tirer un coup j'imagine), mais c'est le cas aussi face à des personnages plus récurrents, que notre personnage voudrait clairement sincèrement mieux connaitre (c'est du style "tu es doué au combat, je me demande ce que tu peux faire d'autre avec ces muscles saillants que tu exhibes", alors c'est un peu rigolo la première fois mais quand c'est la moitié des dialogues de drague oskour). Mais à la limite dans un AC je m'en balec des dialogues, mais y en a des tonnes. On a l'impression que le jeu veut absolument qu'on s'investisse dans un monde qui n'est pourtant pas crédible du tout et qui est un des moins vivants et denses de la série depuis longtemps (et je dirais presque depuis toujours, même le premier arrivait à reproduire l'effervescence de la Terre Sainte, ici c'est camp de soldats - chèvres - camp de soldats - random philosophe - camp de soldats). Résultat, on se tape des caisses de dialogues et de faux choix sur machin qui veut monter une pièce de théâtre et bidule qui a besoin qu'on lui ramène un bibelot volé. C'est infernal, et la palme revient à ce niveau au DLC d'Atlantis qui a zéro enjeu (c'est une simulation dans une simulation, merci je me sens investi) mais qui nous inonde de dialogues et de débats sur des simulations de simulations de personnages morts recréés sur base de souvenirs, holala attention tu vas faire quel choix qui va servir à rien ?
Ce qui est terrifiant avec Odyssey c'est qu'Ubisoft a clairement peaufiné une recette qu'ils cherchent à mettre au point depuis longtemps, une boucle de satisfaction qui enferme les joueurs vulnérables (c'est mon cas, je n'ai pas honte de l'admettre) dans l'obsession de finir chaque point d'interrogation sur cette infâme carte, dans la droite lignée de Skyrim (mais qui avait au moins la décence de rendre ses personnages un minimum intéressants). Ajoutez à cela une courbe d'xp qui est clairement cassée parce qu'Ubisoft espérait vendre des boosts aux plus désespérés et un système de leveling complètement nul (soit vous n'activez pas l'autoleveling et le jeu devient très vite beaucoup trop simple, soit vous l'activez et les ennemis deviennent juste des éponges à pv, notamment les boss qui sont nuls à crever mais qui te tuent en trois coups et ont des barres de pv dignes d'un MMO, la compagnie en moins) et vous obtenez un produit profondément irrespectueux du joueur.
Pourquoi je lui mets 6 alors ? Parce que bon y a quand même une énorme map et je pense qu'il y a moyen quand même d'y passer un peu de bon temps à condition de pas se prendre la tête. Le système de combat aussi est plutôt nerveux (alors que l'infiltration est comme d'hab cassée, cherchez l'erreur) et propose de la variété à condition de prendre la peine de jouer avec l'arbre de compétences (c'est pas non plus du génie hein, comme d'hab vous avez max quatre types d'ennemis et l'esquive rend le jeu trop simple). Et si la représentation de la Grèce antique du jeu est souvent navrante (comment ne pas cringer quand Socrate ouvre la bouche honnêtement ?), force est de reconnaitre que cet univers est souvent trop peu exploité et qu'il y a ici une réelle tentative.