Rien ne se perd, tout se transforme

Discovery Tour nous propose d’arpenter le monde d’Origins, délesté de ses missions et de ses ennemis, pour découvrir la vie quotidienne et l’Histoire de l’Egypte ancienne. Installé par une mise à jour pour les possesseurs du jeu, il est aussi proposé à l’achat en stand alone.

Est-ce que ça vaut le coup ? On ne va pas faire durer le suspense, je ne suis qu'à moitié convaincue par cette proposition.

A qui se destine Discovery Tour ?

Je serai bien en peine de répondre à cette question. L’ennui, c’est qu’on n’a pas tranché pour savoir à quel public on allait s’adresser et qu’on se retrouve avec un contenu hétéroclite. Peut-être que je me trompe sur mon postulat, mais j’ai quand même l’impression que le but d’Ubisoft est de proposer une découverte de l’Egypte antique à un public pas forcément connaisseur qui pourrait être attiré par un format plus ludique (qui n’est qu’un trompe-l’œil, mais j’y reviendrai). Sauf que je ne vois pas comment un joueur sans un minimum de connaissances de bases peut s’y retrouver. C'est bien de parler de la XXIIIe dynastie ou de syncrétisme, mais sans contextualiser ou définir ce dont il s’agit, je ne suis pas sûre qu’il en reste grand-chose…

Les amateurs d’égyptologie en seront pour leur frais puisque les sujets ne sont pas non plus extrêmement creusés (et il y a quelques arnaques au niveau des contenus : quand on m'annonce l'historique de la dynastie ptolémaïque, j'attends autre chose qu'une présentation de la vie d'Alexandre le Grand...) (Surtout qu’il y avait moyen d’être racoleur avec cette dynastie, c’est quand même une famille magnifique où on se mariait entre frère et sœur, tant et si bien qu’on pense que la consanguinité a favorisé le développement d’une maladie déclenchant une forte agressivité qui expliquerait en partie le nombre particulièrement important d’assassinats commis dans le cercle familial…)

Une proposition à laquelle il manque une dimension ludique

Je suis sceptique sur les qualités de médiation de ce Discovery Tour : les différentes thématiques sont abordées par le biais de visites guidées somme toute assez classiques qui n’exploitent pas pleinement les atouts du jeu vidéo. Le rythme de ces présentations est assez lent et j’ai eu l’impression que la navigation d’un point à un autre avec à chaque fois l’ouverture d’une séquence informative, conjointe à la présentation d’éléments iconographiques, était un leurre en matière d’interactivité, mon action étant finalement assez limitée.

Le jeu des acteurs qui assurent le doublage renforce l’impression d’un manque de dynamisme : la tonalité des voix est froide, sans aspérité, comme si le texte était énoncé par des machines. L’exposé manque de flamboyance et semble surjouer le sérieux.

Il en résulte que l’on se demande ce que le jeu vidéo apporte vraiment dans la découverte de l’Egypte ancienne puisque Discovery ne propose pas de meilleur contenu que ce l’on pourrait trouver avec un bon documentaire vidéo, le montage dynamique en moins.

La volonté de transmission de Discovery est louable, mais au final, c'est tout de même en jeu qu'Assassin's Creed parvient le plus à donner à voir l'Histoire : les nombreuses heures passées à traverser villages reculés et temples majestueux permettent de s’imprégner des moments de vie quotidienne des paysans, prêtres, guerriers, nobles et citadins sans qu’on y prête attention, de manière autrement plus efficace que dans un parcours balisé trop scolaire qui oublie d'être didactique.

L'aspect le plus intéressant de ce Discovery Tour ne vient finalement pas de son discours scientifique mais de ce qui est dit entre les lignes, des choix opérés par les développeurs pour présenter la réalité historique et de la part cédée à l'artistique et au ludique. Ceci étant, la bonne vieille base de données à l'ancienne et un making of m'auraient tout autant comblée sans qu'il n'y ait eu besoin qu'Ubisoft se montre comme un élève consciencieux qui a bien fait ses recherches.

Sans doute ce Discovery Tour pourra t’il intéresser quelques personnes, pas tant pour ses visites guidées que pour la possibilité de découvrir le monde d’Origins sans ennemis : tel un walking simulator, il offrira à un public non adepte du gameplay de la série, le plaisir de la découverte et de l’exploration dans un univers vaste et travaillé, ce qui n’est déjà pas si mal. L’absence d’enjeux aurait tendance à me lasser personnellement, mais la démarche pourra sans doute répondre à certaines envies.

En résumé, si la démarche de Discovery Tour me semble intéressante, je ne suis pas pleinement convaincue par la formule adoptée qui n’échappe pas à une certaine forme de classicisme et ne tire pas pleinement partie de son média.