On m'avait prévenu et pourtant j'y ai joué. Je me suis pris pour un hipster, un de ceux capables de faire abstraction des éléments qui font de ce jeu une purge totale, pour y voir un chef d'oeuvre de narration et d'immersion.
Je me suis retrouvé avec entre les mains un truc du genre qu'on se force à lancer et pour lequel on se fixe des challenges inatteignables comme "aujourd'hui j'y joue au moins une heure d'affilée".

Après 25 heures de jeu étalées sur 8 mois je viens de battre l'immonde boss de fin et là encore, alors qu'il doit rester tout au plus quelques minutes de jeu, j'ai remis l'épilogue à plus tard.

C'est juste pénible, tout a été dit sur la maniabilité, les graphismes, les animations, la BO, qui sont tous aux fraises, mais ce n'est même pas de ça que je parle. Je ne me plains pas non plus des phases de tir, qu'on redoute autant pour leur pénibilité qu'on les attend parce qu'elles nous permettent au moins d'avoir quelque chose à faire. Le vrai problème, pour moi, c'est que pour progresser dans le jeu on ne fait rien à part véhiculer le personnage principal, qu'on conduit de checkpoints en cinématiques, de marqueurs bleus en marqueurs rouges. Ces derniers étant des indices que l'agent York se charge d'interpréter tout seul au travers d'imbitables flashs d'images granuleuses et de sons voilés, sans qu'on n'y comprenne rien. Au stade où j'en suis l'enquête est terminée, le meurtre est résolu, le tueur est démasqué mais je ne me souviens plus qui était la victime ni comment on en est arrivé là.

Je vais me forcer à terminer le demi-chapitre qui me reste, ce sera un vrai soulagement et je jure qu'ensuite je ne rejouerai plus jamais à ce jeu.

Pourtant quand j'y repense, j'ai quelques souvenirs qui me retiennent dans cette ville, quelques moments où je me suis pris au jeu et me suis vu à la place de l'agent York. Il y a cet indescriptible sentiment que la ville vit, que tout ne tourne pas autour du héros, que les PNJ vivent leur vie et ne sont pas à disposition du joueur. Le jeu à réussi, sans m'y contraindre, à me faire adopter ce rythme : c'est un open world, j'aurais pu y faire ce que je voulais quand je voulais (sauf phases scénarisées) mais pour une raison qui m'échappe quand la nuit tombait j'allais manger au diner puis je rentrais dormir à l'hôtel. Le matin j'allais prendre un petit dej avant de reprendre le fil de l'enquête. Et je trouvais ça super.

En plus de ça, les meilleurs moment de ce jeu sont probablement les cinématiques qu'on accueille avec soulagement et qui offrent de jolis intervalles en marge de la progression du scenario. Je me souviens notamment d'une longue séquence de repas au resto entre les quatre enquêteurs qui plaisantent et se racontent leur vie. Ou encore d'une discussion en pleine nuit dans une chambre d'hôtel entre l'agent York et la fliquette qui lui a tapé dans l'oeil. Autre intervalle marquant, jouable celui-là (spoiler) : la traversée de la ville sous l'orage, dans la peau du tueur, une hache à la main, entouré de "possédés", alors qu'une voix-off cristalline chante Amazing Grace. Comme souvent dans le jeu on n'est pas loin de basculer dans le ridicule mais en ce qui me concerne ça a fonctionné, c'est un des passages les plus étranges qu'il m'ait été donné de jouer.

Bref, avec quelques jours de recul, je me retrouve à partager l'avis des hipsters que je maudissais pour avoir suivi leur conseil, et contrairement à ce que je disais quelques lignes plus haut je me surprend à envisager de refaire le jeu pour faire toutes les rencontres annexes que j'ai raté. Au secours.
Laaris
7
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Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs jeux de la PlayStation 3 (PS3)

Créée

le 2 févr. 2014

Modifiée

le 10 févr. 2014

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Laaris

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