L'Outsider...


Comment ne pas être fasciné par ce personnage ? Comment ne pas être fasciné par le concept même de ce personnage ?


Dishonored aura beau être Dishonored, on pourra applaudir ou dénigrer cette licence autant que l'on voudra, comment ne pas objectivement reconnaître ce trait de génie dans la création de ce protagoniste ? L'équipe aurait pu se contenter de créer un esprit quelconque. Voire un dieu quelconque.
Eh bien non, ils ont créé l'Outsider. L'Outsider quoi. Rien que ce nom est déstabilisant. L'Etranger... L'Exclu... le Marginal... Marginal d'une réalité qu'il observe depuis des milliers d'années, qu'il aime titiller sans toutefois jamais y pénétrer réellement. Un être énigmatique aux allures omniscientes, décidant d'offrir ou de retirer sa Marque à qui il l'entend, permettant ainsi aux heureux élus de jouir de pouvoirs fantastiques (et des emmerdes qui vont avec). L'Outsider n'est pas un dieu qui juge. L'Outsider n'est pas un démon qui piège. Le passe-temps favori de l'Outsider, c'est d'observer. Vous laisser seul responsable de vos actes, de l'utilisation de vos dons. A dessein ?
Situé à la marge de la Réalité, donc, l'Outsider vit dans sa propre dimension, que l'on nomme faute de mieux : le Grand Vide. Ah, le Grand Vide... un personnage à part entière. Les rares visiteurs ayant eu le privilège de pouvoir jeter un rapide coup d'œil dans le Grand Vide sont formels : à part l'Outsider et parfois quelques baleines qui s'y baladent, nul signe de vie dans le Grand Vide. Des baleines, hein ? Les mêmes d'où sont tirés les os sur lesquels sont liés des charmes... tiens, tiens.


Non vraiment, il est intéressant le concept de l'Outsider. Contrairement à un dieu standard dont la réalité serait tout à fait hypothétique, son existence ici ne fait en vérité aucun doute. Moult témoins ont croisé sa route, et peuvent en attester preuve à l'appui (les fameuses Marques). Un scénariste normal aurait donc pu facilement créer une religion autour, qui pour une fois aurait été légitime.
Eh bien non. S'il existe bien par le monde des individus le vénérant via quelques autels épars et bricolés, dans l'Empire des Îles la religion officielle, c'est l'Abbaye du Quidam. Abbaye dont le curieux credo est de lutter [u]contre[/u] l'Outsider, ce dernier étant considéré comme hérétique, allant à l'encontre de Sept Canons -un brin conservateurs, forcément- et donc présenté comme à proscrire absolument.
Et c'est là une situation absolument intéressante, lorsque l'on se rend compte que pour un être surnaturel supposément satanique, l'Outsider paraît étrangement abordable, toujours enclin à taper la discute, drapé de son petit costume de ville. N'étaient ces yeux d'un noir hypnotiquement profond, l'Outsider pourrait tout à fait passer pour votre aimable voisin. Alors quoi ?


Titillant ma curiosité dans Dishonored 1, et la secouant carrément dans Dishonored 2, l'Outsider est donc l'enjeu central de ce nouveau chapitre de Dishonored. Je ne pouvais donc qu'être attiré par celui-ci, autant qu'effrayé par son titre. Pardon ? La mort rôde autour de mon petit chouchou ? Mais qui-que-quoi ?


Que l'on se rassure, il ne s'agit pas là de la seule qualité du titre. Simple stand alone, donc aux ambitions plus légères dans sa forme que les deux jeux canons, DOTO a ainsi les mains libre pour partir sur un créneau que j'apprécie particulièrement : jouer les "jeux-coulisses" comme ont pu le faire les 2 DLC scénarisés de Dishonored premier du nom. Entendre par là : décrire des faits parallèles (dans le temps, dans l'espace ou dans les évènements) aux pérégrinations principales vécues par Corvo ou Emily.


C'est donc ainsi qu'en plus de l'Outsider, ce jeu signe les retrouvailles d'avec mon 2e personnage favori : Daud. Décidément, quelle fête !
Daud l'Assassin. Daud le Pénitent. Daud la pièce maitresse du basculement du destin impérial. A la fois Némésis de Corvo et allié de l'ombre aussi essentiel que méconnu. Un terreau forcément extraordinaire pour le dramaturge un tant soit peu inspiré.


Autant je dois l'avouer, entrer pleinement dans Disho 2 fut un exercice aux teintes légèrement poussives, autant ici j'étais plongé dedans dès le départ. Cette impression de retrouver de vieux amis, moins formels, moins distants que la famille royale. Et ce plaisir de constater que comme les DLC suscités, ce petit DOTO s'inscrit lui aussi dans un tout cohérent, en s'imbriquant parfaitement dans les pistes ouvertes par les jeux canons, pour une revisite des plus savoureuses de Karnaka.


Ce qu'on peut aisément pressentir à la lecture du titre se concrétise très vite : l'histoire est ici empreinte d'une gravité véritablement palpable, dont le cœur tourne autour de l'éternel thème de la rédemption, de la capacité à accorder son pardon. Billie Lurk, Daud et l'Outsider forment un trio tourbillonnant entre rancœur, absolution et passé. Le passé lointain, ou très lointain, qui finit toujours par vous rattraper. Qui finit toujours par tout apaiser. Par tout trancher.
Il est bien évidemment vivement conseillé d'avoir parcouru les deux chapitres principaux (ainsi que les DLC) pour apprécier comme il se doit cette belle et tragique aventure. Une scène en particulier de Disho 2, déjà déroutante sur le coup, se trouvera être prolongée, développée jusqu'à ce final qui ne pourra que procurer frissons et larmichette à tout joueur en ce bas monde un tant soit peu doté d'une âme (oui, rien que ça).


Je ne m'étalerai pas plus en avant sur le scénario pur du jeu, je laisserai à chacun le loisir de découvrir ses diverses surprises, ce dès la première mission. Je me contenterai juste de préciser qu'elle va crescendo, qu'elle est assez bien rythmée, qu'elle offre son lot de scènes bien badass, qu'elle fait voir du pays (enfin, de l'arrière pays plus précisément puisqu'on reste quand même sur Karnaka et sa région), ainsi que de nouvelles figures (il est si difficile de présenter tout ça sans gâcher).


Je ne m'étalerai pas davantage sur le game design et le gameplay, on est sur du terrain connu (que j'ai déjà assez développé sur mes avis des deux jeux précédents) : des pouvoirs, de l'infiltration (ou pas), des théâtres d'opération riches et verticaux, des séquences de jeu mémorables (le casse de la banque, la scène des enchères, la clé mélodique, le dernier niveau...), bref un bon cru Dishonored en quelque sorte, qui prouve si besoin était que petit jeu ne rime pas forcément avec produit miteux : Arkane s'est vraiment impliqué sur son petit bébé, et cela se ressent. Le jeu est agréable à suivre, à parcourir, et à terminer (non je plaisante, ça ça restera toujours triste malheureusement).


J'ignore s'il s'agit là du point final de la licence. Le cas échéant, je ne sais même pas si cela serait une nouvelle qui m'attristerait, en définitive. D'un côté, à l'instar d'un certain Tamriel, l'Empire des Iles est loin d'avoir dévoilé tous ses mystères. De l'autre, elle disposerait ici d'une jolie conclusion pour tirer sa révérence. Je suis tiraillé.


Il y a une chose qui ne me tiraille pas en revanche : c'est de vous ordonner chaudement de jouer à ce jeu.


...


L'Outsider quoi, merde...!

Kaiser-Panda
9
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Créée

le 10 avr. 2022

Critique lue 10 fois

Kaiser-Panda

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