Firewatch
7.2
Firewatch

Jeu de Campo Santo et Panic Inc. (2016PlayStation 4)

Attention, amoureux de la nature ou pyromane en herbe, cette critique contient quelques révélations.


Henry est venu dans ce parc naturel pour faire une pause. Perché en haut de sa tour de surveillance, ce guetteur scrute toute la journée le périmètre qui lui est affecté pour prévenir les départs de feu. Son métier, c’est voir. Et c’est en cela qu’est brillant Firewatch. Le jeu se focalise précisément sur ce que Henry – et donc le joueur – ne voit pas. Firewatch est un jeu sur le hors champ. Une vision littérale et métaphorique : Henry est venu ici pour voir clair dans sa vie également.


Placé sous l’autorité de Delilah, dont on ne voit que la pâle lueur de sa tour au lointain, Henry va vivre des événements à la lisière de l’étrange, du fantastique et de la machination, l’ensemble suggéré mais jamais montré. Au personnage donc de recoller les morceaux, de tisser les fils entre divers « symptômes » qui pourraient vouloir signifier quelque chose. A sa quête de sens que cherche Henry autour de ce mystère s’entrelace bien évidemment la quête de sens de sa propre vie. Comme Life is Strange (2015) la crainte d’un feu inévitable fait écho à la tornade qui approche : le récit est hyperbolique. Derrière le drame qui couve se cache la réflexion intime.


Dans la superbe nature de Firewatch, tout est dissimulé, fragmenté, indirect. On ne voit que des silhouettes, des morceaux de lettres, des fumées sans feux, des coïncidences, des sons ou des signes comme des présages, renforcés par le magique ou la spiritualité de cette nature prégnante. Tel un Robinson sur son île déserte, Henry va éprouver la solitude, mettre à l'épreuve sa santé mentale et interroger ses certitudes.


Alors évidemment, quand toute la narration rentre dans l’ordre, balayée par un feu salvateur, le joueur, hameçonné par la promesse d’une grande révélation, peut ressentir une certaine déception (tous les mystères perdent leur attrait une fois expliqués) voire une révolte à avoir été manipulé de la sorte. Personnellement, j’y vois une forme de courage. Celui de ne pas avoir cédé aux sirènes du spectaculaire. Avec Gone Home (2013) avec lequel il partage beaucoup de similitudes dans sa construction, Firewatch est un jeu qui passe « à l’âge adulte ». Il laisse tomber les mystères, les complots, les extraterrestres, les monstres et les fantômes pour rester dans l’intime, la seule chose qui compte vraiment.

numerimaniac
8
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le 17 juil. 2018

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numerimaniac

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