Comme le rouge

Derrière le titre qui porte le patronyme de notre communiste favoris se cache un puzzle-game qui peut se rapprocher d'un Braid pour quelques unes de ses mécaniques de jeu et d'un Limbo tant dans la physique du personnage que dans certaines phases de plateformes légèrement matinées die and retry.

Un puzzle-game ingénieux

Le concept est simple : vous pouvez changer la couleur de l'arrière plan pour faire disparaître des éléments du décors et ainsi vous frayer un chemin jusqu'au tableau suivant. Pour illustrer l'idée, imaginez avoir besoin d'une caisse jaune pour atteindre une porte bloquée par un mur vert. La caisse jaune se trouve au sommet d'une pile de caisses rouges : il suffira de passer par la couleur rouge sur le menu radial prévu à cet effet pour switcher très facilement de couleur et ainsi faire tomber à vos pieds la caisse jaune. Pousser cette dernière vers le rebord qui vous mène à la prochaine porte en prenant soin de changer la couleur de fond pour passer le mur vert et vous voilà aguerri au concept de Hue.

Un concept de gamedesign ne vaut rien s'il ne s'accompagne pas de mécaniques ingénieuses permettant de donner à se dernier tout son intérêt : Hue réussi le défi haut la main, avec six mondes à traverser remplis d'énigmes dans l'ensemble très habiles et toujours très lisibles, sans jamais que rien ne soit redondant ou se répète ad nauseam.
Concrètement, le contrat "puzzlegame intéressant" est rempli, et il devrait satisfaire la plupart des joueurs amoureux du genre; toutefois deux ou trois bémols à souligner, en dépit de ses qualités certaines.

Une épaisseur narrative inutile

D'abord, pourquoi à tout prix se donner un genre faussement mélancolique, nostalgique ou dépressif ? On a le sentiment que pour faire les choses biens, il faut forcément des thèmes au piano (sympas mais vus et revus) qui donne l'impression qu'on va tous mourir la semaine prochaine, massacré par un Oui-Oui radicalisé et ultra-fanatique.
Ce sentiment de "regardez on a fait un jeu triste car on est profond (ou l'inverse)" nous poursuit tout le long du jeu, entre une narration bancale à coup d'enveloppes qui parle et un homme mystérieux déguisé en tampax. Le tout pour un dénouement bateau d'une rare banalité. Rien de très grave pour un puzzlegame, mais qu'il est lourd de faire du misérabilisme pour faire du misérabilisme. Entre ça, et le fait que le jeu soit sorti en 2016, c'est à dire 8 ans après un Braid pour le citer une seconde fois, sans fondamentalement faire mieux que lui, il me paraît difficile de le recommander avec plus de ferveur que cela, bien qu'il faut encore une fois saluer la bonne facture des différents puzzles. Et c'est bien là l'essentiel pour un jeu du genre.

Hue est un puzzle-game qui fera le bonheur de celui qui tombe dessus un peu par hasard, le temps d'une après-midi. Son concept est suffisamment chouette pour qu'on se laisse prendre au jeu et ses mécaniques suffisamment intelligentes pour les saluer. Néanmoins, l'aficionados du genre prendra Hue pour un amuse gueule sympathique, et qui arrive 10 ans après un plat de résistance bien plus conséquent nommé Braid. Mais si on met de côté sa dimension narrative sans intérêt, on peut néanmoins lui faire une belle place au coin de nos petits plaisirs coupables.